Longtemps réservé à la gente masculine, le monde du vin change aujourd'hui de sexe. Le nombre de femmes inscrites dans les cours de sommellerie au Québec est en constante croissance.

À l'hiver 2000, à peine le tiers des étudiants en sommellerie à l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec (ITHQ) était des filles. Elles sont maintenant aussi nombreuses que les garçons. Le constat est le même à l'École hôtelière de Laval.

Jacques Orhon a enseigné la sommellerie à l'École hôtelière des Laurentides pendant 30 ans. Il remarque que depuis le début des années 90 les filles s'inscrivent davantage dans les cours sur le vin.

Mais si la présence des femmes est aujourd'hui acquise dans ce milieu, elles n'ont pas toujours été les bienvenues.

Jacques Dupont est chroniqueur en vin pour l'hebdomadaire français Le Point. Il raconte dans son livre «Choses bues» qu'à une époque, les viticulteurs refusaient l'entrée de leur cave aux femm, de peur que si elles étaient en période de règles cela ne fasse tourner le vin.

Jacques Orhon confirme cette pratique.

«C'est connu! Les vignerons ne voulaient pas donner accès à leurs caves aux femmes, raconte-t-il. C'était comme ça il y a 40 ans.»

Si les femmes peuvent désormais visiter tous les vignobles du monde, elles doivent encore faire leur place dans plusieurs régions viticoles du globe.

«Dans certains pays, on a pensé que j'étais la secrétaire de mon collègue masculin. Dans d'autres, on ne me tendait même pas de verre pour déguster», explique Nadia Fournier, co-auteure du Guide du vin.

Expérience similaire pour la sommelière Jessica Harnois. En charge du courrier vinicole et de la cave de garde pour la Société des alcools du Québec, elle s'est retrouvée au Liban pour sélectionner des vins. Elle se remémore que les producteurs avaient alors ignoré sa présence. Pourtant, c'est à elle que revenait la décision de l'entrée de leurs produits au Québec.

Vin et grossesse

La grossesse pose aussi problème dans la carrière des femmes du vin. Elles ont toutes noté que leurs sens sont devenus plus puissants, plus efficaces lorsqu'elles portaient un enfant. Mais le regard des gens sur une femme enceinte qui déguste du vin n'est pas toujours positif.

«En Italie, tu es une déesse lors que tu es enceinte et que tu dégustes, dit Jessica Harnois. Mais aux États-Unis, tu es le diable en personne. Je comprends leur vision, mais c'est ma profession !»

Même son de cloche pour Véronique Rivest qui était enceinte lors de sa participation au concours du meilleur sommelier du Québec en 1999.

«Je me rappellerai toujours qu'il y a eu un bruit commun dans la salle quand je suis montée sur scène. Toute la salle a fait «Ahhhhh !» en me voyant la bedaine. Est-ce que l'expression traduisait un malaise ou une admiration, je ne sais pas», dit la sommelière.