Simon Kean l'admet: la boxe était devenue un travail. Il avait hâte d'en finir avec ses adversaires pour passer à autre chose. Sa défaite contre Dillon Carman l'a ébranlé. Physiquement et mentalement.

Le Trifluvien de 30 ans a senti le besoin de s'isoler après que Carman lui eut passé le K.-O. au sixième round de leur affrontement du 6 octobre dernier. Il avait besoin de se retrouver, de se ressourcer, dit-il.

«J'ai décroché complètement ; j'ai beaucoup réfléchi, a-t-il déclaré jeudi, en marge de la conférence de presse en vue de son combat de samedi contre l'Argentin Rogelio Omar Rossi. Je me suis demandé pourquoi je suis arrivé dans le ring les deux doigts dans le nez, sans être motivé. Il a fallu que je réfléchisse beaucoup, ça n'a pas été facile. Je ne me sentais pas bien. Je pense même que j'étais déprimé après ce combat. Je ne m'attendais pas à ça. Mais je me suis replacé.»

Il est ressorti d'une semaine d'isolement au barrage Gouin et de vacances en Floride avec une nouvelle attitude, mais surtout, une passion retrouvée pour son sport.

«Il faut aimer ce qu'on fait. Avant, j'allais "puncher". Il ne faut pas penser comme ça. Ce qui nous amené dans le sport, c'est qu'on aimait ça. Il faut revenir aux sources.

«Le mental est plus important que le physique. Ma dernière défaite, elle n'était pas physique, mais mentale. J'ai perdu le combat pour des raisons psychologiques. J'ai eu besoin de chercher ce qui s'était passé, pourquoi ça s'était passé comme ça. Maintenant, j'aime ce que je fais, je suis plus heureux. J'ai réalisé que ce ne pouvait pas être un travail, mais une passion. Le côté psychologique aide le côté physique : en étant plus heureux au gym, je m'entraîne plus fort.»

Son promoteur, Camille Estephan, président d'Eye of the Tiger Management, est déjà passé par là avec David Lemieux et Steven Butler, notamment. Il est heureux que son poulain ait pu en prendre conscience et espère qu'il saura remettre sa carrière sur les rails. Comme Lemieux et Butler l'ont fait.

«Je suis bien content qu'il dise ça, a souligné Estephan. Simon était rendu une vedette: il est jeune, il paraît bien, tout le monde voulait le voir, lui parler. À un moment donné, ça te rentre dans la tête. Il aimait plus ce qui vient avec la boxe que la boxe. Maintenant, c'est l'inverse.

«J'espère (qu'il suivra les chemins de Lemieux et Butler). Ils ont appris. On fait de notre mieux pour les encadrer, mais quand ils reçoivent les coups de poing, ils sont seuls. On l'a fait auparavant, mais c'est à lui de se battre.»

En Rossi (20-7-1, 13 K.-O.), Kean n'affronte pas un champion du monde. Mais Estephan estime que ce combat est aussi important qu'un duel pour un titre.

«On est condamnés à gagner: s'il ne gagne pas samedi, il n'y aura jamais de championnat du monde.»

Kean (15-1, 14 K. -O.) promet de ne pas répéter les erreurs du passé.

«(Contre Carman), je m'en allais là pour une'p'tite vite'et je me suis rendu compte qu'il était plus coriace que je pensais. Mais c'est du passé. Maintenant, contre Rossi, il faut que je gagne round par round. À l'entraînement, tout ce que je faisais, je le faisais comme un enragé. Je me levais avec la rage au ventre pour chaque round d'entraînement. Je m'en vais là pour le casser en deux. C'est cette mentalité que je dois avoir.

«Je donne le mérite à Carman: il m'a entourloupé avec son plan de match. [...] On a beau dire n'importe quoi, chercher des excuses. La vraie raison, c'est que je l'ai sous-estimé, je pensais que ce serait un combat facile et qu'il venait chercher un chèque de paye. Lui, il a fait croire ça et je suis tombé dans le panneau. Il m'a eu "ben raide".»

Kean et Rossi viendront couronner une journée de 13 combats présentés par Eye of the Tiger Management au Casino de Montréal, samedi, à compter de 12h30. Le gala de l'après-midi mettra en vedette le poids lourd Arslanbek Makhmudov (6-0, 6 K.-O.), qui fera face à Avery Gibson (9-7-4, 3 K.-O.).