À peine débarqué d'Afrique du Sud, le président d'Haïti a reçu hier à Port-au-Prince le Québécois d'origine haïtienne Adonis Stevenson sur le site de l'ancien palais national, détruit par le terrible séisme du 12 janvier 2010. Arborant l'une des ceintures victorieuses du champion mondial de boxe mi-lourd, il a réitéré le sentiment de fierté qu'il a éprouvé après ses victoires.

«En plus de notre champion [Adonis], Dany Laferrière a été nommé [jeudi] à l'Académie française, a-t-il rappelé. Nous avons les capacités pour des étoiles. Il s'agit de nous prendre d'abord au sérieux nous-mêmes et de continuer dans ce sens.»

Le président haïtien a profité de l'occasion pour annoncer que la vedette de la boxe sera nommée ambassadeur de bonne volonté lors de son prochain séjour au pays. Ce titre honorifique, déjà conféré à des gens comme Sean Penn et Wyclef Jean, s'accompagne d'un passeport diplomatique. Stevenson recevra également la décoration de l'ordre national Honneur et Mérite.

«C'est un grand honneur pour moi que le président ait accepté de me rencontrer et qu'il me donne ce titre, a confié Stevenson. C'est avec fierté que je représente Haïti au niveau international.»

Le boxeur était visiblement ému de rencontrer cet ancien chanteur, avouant être un grand fan de sa musique. Il a de son côté remis au président haïtien les deux gants qu'il portait sur le ring en juillet dernier, lorsqu'il a remporté pour la première fois son titre de champion du monde du WBC.

Un grand fan

«Les gants qui allaient à Haïti, rouge et bleu, les couleurs du pays!», s'est exclamé Michel Martelly, lui-même grand amateur de boxe.

«J'ai vu les matchs, mais je n'ai pas pu les regarder au complet, a ajouté la femme du président, Sophia Martelly. Je suis un peu princesse, incapable de voir ça, mais le président, c'est sa maladie.»

L'un des fils du couple présidentiel prépare d'ailleurs l'ouverture d'un nouveau club de boxe à Cité Soleil, un quartier populaire de la capitale, a-t-elle confié à La Presse.

Michel Martelly a également salué le modèle de réussite de Stevenson, malgré les «zones d'ombre» dans son passé. Il a appelé les jeunes Haïtiens à surmonter les moments difficiles de leur vie, comme le boxeur à ses côtés, en faisant preuve de discipline.

«Pour les jeunes, c'est important qu'ils voient [les réussites] d'un jeune Haïtien. Ils se reconnaissent dans Adonis. Je crois qu'il aura mis en eux ce souffle dont ils ont besoin pour un avenir meilleur. Parce que tout commence d'abord par un rêve.»

«J'ai connu beaucoup de difficulté, des moments durs, a ensuite expliqué Stevenson. J'en suis sorti, et j'ai travaillé très fort pour y arriver. Il faut toujours persévérer pour garder la bonne direction.»

Michel Martelly a également salué le travail du promoteur de boxe Yvon Michel, qui accompagnait son poulain.

«Si c'était moi le promoteur, même comme grand fan de boxe, je n'aurais pas réussi ce qu'Yvon a réussi.»

Le président haïtien, qui critique souvent la couverture négative faite sur son pays, a aussi demandé aux étrangers d'être plus «ouverts» à l'endroit d'Haïti.

«Les problèmes que nous avons sont réels, mais nous avons aussi des choses positives qu'on hésite à montrer. Il faudrait faire la part des choses et montrer ce bon côté d'Haïti aussi. Quand on ne fait que dire des mauvaises choses, ça atteint aussi notre pays et notre mentalité. Donc, changeons la donne.»

À la fin de la rencontre, Michel Martelly, qui partage le rêve de voir Stevenson combattre un jour en Haïti, a chuchoté quelques mots au boxeur, loin des caméras.

«Déjà à 36 ans, on va vers la fin, a par la suite expliqué le président haïtien à La Presse au sujet de cet aparté. Mais avec beaucoup d'engagement, il peut encore nous donner quatre bonnes années. Je lui ai dit de prendre tout ça au sérieux et aussi de préparer les lendemains.»

Adonis Stevenson termine aujourd'hui un séjour de 48 heures en Haïti. Il s'agit de son premier voyage dans ce pays plus de 30 ans après son départ avec sa famille en 1982. Il était alors âgé de 5 ans.