« Un ballon de soccer dans chaque foyer, ce serait mon rêve absolu. » Voilà le souhait de la nouvelle présidente de Soccer Québec, Felicia Schiro.

La plus importante fédération de sport au Québec a fait l’annonce de cette nomination mardi dernier. Jeudi, La Presse s’est entretenue pendant une trentaine de minutes avec celle qui occupait, en quelque sorte, les fonctions de présidente intérimaire du conseil d’administration depuis la démission de Pari Arshagouni, à l’automne dernier.

Au cours de l’entrevue, il a été question de la gouvernance de la fédération. De ses récents enjeux de transparence. De la recherche du prochain candidat à la direction générale. De l’équilibre à trouver entre le développement des joueurs d’élite et l’accessibilité du soccer.

Mme Schiro a aussi lancé quelques idées en germination chez Soccer Québec (SQ) quant aux possibilités de faire vivre la Coupe du monde 2026 ici, dans la province, malgré l’absence de matchs. Le Québec pourrait-il devenir une terre d’accueil, le camp de base pour une ou des équipes participant à la grand-messe du football mondial ?

Trouver un DG et de la « stabilité »

Nous y reviendrons. Parce que de toute façon, il y a des dossiers bien plus urgents à régler à la fédération, la direction générale demeurant le fichier au sommet de la pile.

Rappelons qu’Arshagouni, après sa démission à titre de président, avait rapidement été élu au poste de DG au terme d’un processus bâclé, en octobre dernier. Quatre mois plus tard, en février, Soccer Québec a finalement décidé de rompre ses liens avec Arshagouni. Philippe Bernard, DG de l’Association régionale de soccer de Québec, occupe l’intérim chez SQ depuis, assurant un mandat de 30 à 90 jours.

Felicia Schiro est bénévole à plusieurs niveaux dans le soccer québécois depuis 2005. Aujourd’hui, elle assure vouloir faire des « bonnes pratiques en matière de gouvernance » son « cheval de bataille », en plus de mettre fin aux conjectures quant à la transparence de la fédération. Ainsi, cette dernière se fera accompagner dans le processus d’embauche par la firme Octave Maecenas, spécialisée dans le recrutement de cadres. Le poste devrait être affiché la semaine prochaine, indique Schiro.

C’est un cliché, mais il faut s’assurer de prendre le temps d’aller chercher la bonne personne. [Le prochain DG] va aider l’ensemble de la fédération à trouver une stabilité qui, je pense, est nécessaire et méritée.

Felicia Schiro, présidente de Soccer Québec

La nomination pourrait se faire après les 90 jours du mandat de M. Bernard, qui devrait se terminer vers la fin du mois de mai, explique-t-elle, afin de « rester flexible et de s’adapter en conséquence ». Et pour que la fédération ne soit pas contrainte de « prendre une décision qui ne devrait pas être prise » à ce moment.

On fait remarquer à Felicia Schiro qu’au vu des évènements des derniers mois, sa propre nomination à la présidence s’est faite rapidement. D’autant que lors de son dernier entretien avec La Presse, le 6 mars dernier, elle affirmait qu’il était trop tôt pour annoncer ses intentions de devenir officiellement présidente. Trois semaines plus tard, force est d’admettre que les choses ont bougé vite, non ?

« Selon les règlements généraux, le C.A. a le droit de pourvoir n’importe quel poste vacant à l’interne du C.A. », explique-t-elle.

En gros, pour demeurer conforme à ses règles, le conseil d’administration avait jusqu’au 1er avril pour nommer quelqu’un à sa présidence. Sinon, puisque ce poste n’était en théorie pas en élection pour les assemblées générales de 2024, la présidence serait restée vacante jusqu’en 2025.

« Plus on est proches de nos membres, plus ils ont de réponses »

Il fallait en outre agir rapidement, parce que voilà maintenant plusieurs mois que la fédération est embourbée dans ses enjeux de gouvernance. Au détriment d’autres dossiers, comme ceux sur lesquels le C.A. présidé par Felicia Schiro souhaite maintenant se pencher.

En l’occurrence, l’« accessibilité » du soccer ainsi que la « rétention » des joueurs, des arbitres et du personnel.

« Qui dit accessibilité doit parler des frais, avance-t-elle. Tout augmente dans la vie. Comment Soccer Québec, en travaillant avec ses régions, va faire en sorte de rendre le sport accessible pour les parents, pour un jeune qui veut jouer au soccer ? »

D’où l’idée du ballon de soccer dans toutes les chaumières de la province. Felicia Schiro aimerait que « quand [les familles] décident de choisir un sport ou un loisir, [elles] pensent au soccer ».

À ce sujet, on lui fait part de certains échos transmis à La Presse par des lecteurs et des parents, lesquels font état notamment de tournois parfois très onéreux.

Une partie de la solution passe par la communication de part et d’autre, croit Mme Schiro.

« On va devoir impliquer les clubs [en les encourageant] à informer leurs membres, pour savoir pourquoi on fait un tournoi. Est-ce que c’est pour le plaisir ? Est-ce que ce tournoi coûte plus cher peut-être parce qu’il y a du recrutement, des dépisteurs qui seront là ?

« J’inviterais les parents à parler avec leur club. Nous, la communauté soccer, on est très accessibles. Je peux le dire, parce que j’ai travaillé à plusieurs niveaux comme bénévole. Plus on est proches de nos membres, plus ils ont de réponses. »

Elle est aussi d’avis qu’avec le programme de reconnaissance des clubs mis en place par Canada Soccer, qui vise à « donner une structure pour faire évoluer le sport ici », la recherche d’un « équilibre » est nécessaire.

« Il doit y avoir de la place pour tout le monde », autant pour le développement de l’élite que pour la masse de joueurs.

Pas de Coupe du monde à Montréal : « oui, c’est décevant »

On le disait : voilà maintenant près de 20 ans que Felicia Schiro s’implique bénévolement dans le soccer au Québec. « Le président du premier club avec qui j’ai fait du bénévolat m’a dit : “Felicia, tu sais quand tu rentres, mais tu ne sais jamais quand tu vas en sortir !” », lance-t-elle en souriant. En accédant à la présidence de Soccer Québec, Mme Schiro est devenue la première femme à occuper cette fonction dans l’histoire de l’organisation. « C’est tout un privilège. Je suis vraiment honorée de pouvoir être assise à cette position. […] Mais le travail ne fait que commencer. »

Et comment ! Les deux prochaines années d’ici la Coupe du monde de 2026, conjointement organisée par le Canada, les États-Unis et le Mexique, s’annoncent foisonnantes pour le soccer. « Au Québec, on ne reçoit aucun match, rappelle-t-elle. Oui, c’est décevant, je ne dirai pas le contraire. Mais ça ne veut pas dire qu’on ne peut rien faire. » Et pour « mettre le Québec sur la carte », elle aimerait bien parvenir à attirer une ou des équipes participant au Mondial à venir installer leur camp de base ici. « On a de beaux terrains qu’on peut offrir à certaines équipes », lance Mme Schiro.

Tout bonnement, comme ça, elle parle d’un partenariat déjà existant entre Soccer Québec et l’équipe de France. « Pourquoi pas ? » La seule infrastructure de classe mondiale pouvant potentiellement accueillir une telle sélection qui nous vient en tête est le Centre Nutrilait du CF Montréal. « Le CF Montréal est un partenaire fort, répond la présidente de SQ. C’est sûr et certain que dès qu’on a la possibilité de collaborer avec eux, on va le faire. Ça va être parmi les premiers appels qu’on va faire. »

La fédération aimerait aussi organiser des fêtes de visionnement à travers la province, notamment pour les matchs de la sélection canadienne. « Tout le monde [chez SQ] a des idées. Ça va être de les prendre, les mettre ensemble, de créer des groupes de travail, de faire des heures de bénévolat. Quand on parle de Coupe du monde et d’équipe nationale, il y a une fierté qui fait en sorte que bénévolat ou pas, on est là et on est prêts. »