(Montréal) Rapidement, on comprend que Kwadwo Opoku possède sa propre doctrine hédoniste. Il le dit lui-même : être « heureux, c’est gratuit, alors pourquoi ne pas être joyeux » ? À n’en pas douter, il est le premier adepte de cette philosophie.

Tout au long d’un entretien d’une vingtaine de minutes avec La Presse, le nouvel attaquant du CF Montréal est presque incapable d’arrêter de sourire et de rire. Et ce, même si le Ghanéen de 22 ans vient de survivre à une séance d’entraînement de près de deux heures au Centre Nutrilait.

Acquis au début de juillet du LAFC contre une somme de 1,75 million en argent d’allocation générale, Opoku n’a pas tardé à faire sa marque à Montréal. D’abord, il a fait mouche à son premier match au stade Saputo. Ensuite, trois semaines après son arrivée dans la métropole, il s’est entendu sur une prolongation de contrat.

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Kwadwo Opoku a marqué un but dès son premier match au stade Saputo.

Même s’il admet que la transaction « est sortie de nulle part » et qu’elle l’a surpris, il est heureux de débarquer à Montréal.

Son langage corporel le confirme. À chaque match et chaque entraînement jusqu’ici, il se démarque par sa joie de vivre. En ce mardi ensoleillé, mais venteux, il se permettait déjà de tirer la pipe de ses coéquipiers à l’entraînement, particulièrement après la victoire de son équipe à un mini-tournoi.

Et ce n’est pas le seul moment où il a fait naître quelques sourires. Une fois l’entraînement terminé, il a signé les maillots d’une trentaine d’enfants participant à un camp de jour de l’Impact, et immédiatement, ils ont tous été conquis par Opoku.

Après quelques plaisanteries, les enfants chantaient en chœur au rythme du maestro ghanéen qui filait vers les vestiaires.

« Il faut aimer ce que l’on fait, explique-t-il. En ce qui me concerne, je m’amuse en jouant au football et j’aime vraiment ce que je fais. Si je suis heureux de montrer mon bonheur sur le terrain, cela va m’aider à être moi-même. »

PHOTO ERIC BOLTE, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Kwadwo Opoku devant Chris Durkin, du D.C. United

L’attente avant de devenir professionnel

Si Opoku retire autant de joie au quotidien, c’est parce qu’il sait que ce n’est pas toujours facile.

Celui qu’on surnomme Mahala a commencé à jouer au soccer à l’âge de 12 ans et, grâce à un talent indéniable, il est instantanément entré dans une académie à Accra. Ses qualités parlant pour lui à nouveau, il a été capable de profiter de la Coupe d’Afrique des nations de football des moins de 17 ans comme vitrine.

Beau joueur, il attribue tout le mérite à son père, qui sans être professionnel était « un sacré joueur de soccer ». « Je crois que le foot coule dans nos veines », dit-il, eh oui, en riant.

Pour devenir professionnel, l’opération a été un peu complexe. Après ce succès avec l’équipe ghanéenne, Opoku a fait des essais avec le FC Schalke 04, en première division allemande à l’époque, et le PSV Eindhoven, aux Pays-Bas. Finalement, il devait s’engager dans le club de la Bundesliga, mais les affaires ont traîné.

Son agent a plutôt passé un coup de fil à Bob Bradley, alors entraîneur-chef du LAFC, qui voulait également recruter Opoku. Le garçon de 18 ans se sentait fin prêt à faire le grand saut chez les professionnels.

Puis la COVID-19 est passée par là.

Pendant huit mois, Opoku a vécu seul à l’hôtel. Pendant huit mois, il s’est entraîné seul. Il a dû patienter tout ce temps avant que la MLS permette de nouveau d’embaucher des joueurs. On peut dire qu’il a triomphé là où Jack Torrance a échoué.

Être à l’hôtel ne m’a pas dérangé, car je sais ce que je veux dans la vie. Je veux être un grand joueur de soccer.

Kwadwo Opoku, attaquant du CF Montréal

« Je veux travailler fort pour ma famille. […] Mais c’est exactement comme ça que mon aventure s’est entamée ! À 18 ans, dans un hôtel, seul », continue Opoku.

Un gardien comme grand frère

Même s’il vient tout juste d’avoir 22 ans, Opoku a déjà beaucoup d’expérience. L’an dernier, avec le LAFC, il a remporté la Coupe MLS, le tout en jouant un rôle clé de l’attaque californienne aux côtés des vedettes Carlos Vela, Denis Bouanga et Gareth Bale.

Un joueur qui a lui a servi de « grand frère » au club n’est cependant pas un attaquant. C’est plutôt le gardien Maxime Crépeau. Le Québécois a d’ailleurs raconté quelques bons souvenirs mettant en scène Opoku lors d’une entrevue réalisée la semaine dernière.

Au moment où le représentant de La Presse commence à faire le récit, Opoku éclate de rire.

PHOTO KELVIN KUO, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Le gardien québécois Maxime Crépeau, lors d’un match du LAFC l’an dernier

Voici l’histoire : « Je lui disais tout le temps : “Lorsque tu vas jouer contre des gardiens, frappe fort au premier poteau, relate Crépeau. C’est tellement proche qu’à un certain moment, oui, tu peux croiser ta frappe, mais je te conseille de frapper fort au premier poteau. Les gardiens ne s’y attendent pas.” Puis, à l’entraînement, le nombre de ballons qu’on a mangés dans le nez parce qu’il frappait fort au premier poteau. Puis je lui disais : “Tu as juste à la placer, tu es à deux mètres de nous !” Mais non, il mettait des pétards directement dans notre face. »

Opoku a confirmé la véracité de l’histoire. Il a aussi expliqué qu’il demandait plusieurs conseils à Crépeau pour battre des gardiens, ce qui explique l’anecdote. Or, même à l’extérieur du terrain, Crépeau était un mentor pour l’attaquant.

« Si j’avais besoin de quoi que ce soit, je n’avais qu’à l’appeler. Il me donnait toujours de bons conseils », ajoute-t-il.

Maintenant, sa mission sera d’utiliser tous les tours qu’il a appris à Los Angeles et de les mettre à exécution à Montréal. Hormis peut-être les tirs sur le nez des gardiens…