(Laval) « J’ai honte de moi et de ce que j’ai écrit il y a plus de 10 ans », a laissé tomber Sandro Grande, émotif, lors d’une conférence de presse dans un hôtel lavallois, jeudi. Le Montréalais a présenté ses excuses à tous ceux qu’il a « blessés avec ses mots » au lendemain de l’attentat du Métropolis, en 2012.

Neuf jours après avoir été embauché comme entraîneur de l’équipe de réserve du CF Montréal, puis congédié 15 heures plus tard, Sandro Grande s’est exprimé publiquement pour la première fois au sujet de la polémique qui a fait les manchettes la semaine dernière. La conférence de presse a duré près de 45 minutes.

Dans un mot d’ouverture senti, l’homme de 45 ans a offert ses pensées aux victimes de l’attentat du 4 septembre 2012, mentionnant avoir écrit et envoyé une lettre à Pauline Marois afin de lui « offrir [s]es excuses les plus sincères ». « J’ai eu l’honneur de recevoir une réponse touchante de sa part », a-t-il fait savoir.

Rappelons qu’il y a un peu plus de 10 ans, Grande avait écrit sur Twitter que « la seule erreur que le tireur a commise la nuit dernière, c’est de rater sa cible », nommément Mme Marois. « La prochaine fois mon gars ! J’espère ! », avait-il ajouté. À l’époque, il avait invoqué avoir été la cible de piratage. Jamais, avant jeudi, il n’avait formulé d’excuses publiques à ce sujet ni reconnu être l’auteur du message.

Grande a noté qu’une rencontre prochaine est prévue avec le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, qui a été un des premiers à fustiger la décision du CFM la semaine dernière. Les deux hommes ont d’ailleurs déjà discuté au cours des derniers jours. Sur Twitter, M. St-Pierre Plamondon a salué le fait que Grande « reconnaisse et prenne l’entière responsabilité de ses propos » et a indiqué reconnaître « la sincérité de sa démarche ».

« Ce que j’ai écrit en 2012 est inacceptable. Ces mots ne font pas partie de mes valeurs en tant que mari, fils, et surtout… », a dit Grande avant de marquer une pause, les larmes aux yeux. « [Surtout en tant que] père de deux merveilleux enfants qui ont dû vivre des moments extrêmement difficiles. »

« Sachez que je suis reconnaissant envers la province de Québec, qui a accueilli mes parents dans les années 50. Mes parents sont très fiers d’avoir appelé le Québec leur maison. »

Menaces de mort

Au cours des derniers jours, Sandro Grande, sa femme et leurs deux enfants ont reçu de nombreux commentaires, dont des menaces de mort. C’est pour cette raison que le père de famille ne « pense pas à la suite » pour l’instant, lui qui se retrouve sans emploi.

« L’important est de garder notre santé mentale. La mienne n’est pas la plus importante. La plus importante, c’est celle de mes enfants et de ma femme. Imaginez-vous que la semaine d’avant, ils étaient très contents que je retourne après longtemps dans la famille du CF Montréal. »

Grande a d’abord été pressenti par le CFM pour le poste d’entraîneur-chef de l’équipe de réserve. Le Montréalais avait alors posé sa candidature, « comme tous les autres candidats ». Ses publications de 2012 avaient été abordées en entrevue.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Sandro Grande

J’ai dit que, depuis longtemps, j’ai montré que j’ai changé, que j’ai appris. Je pense qu’après cette conversation, [Gabriel Gervais, président et chef de la direction du club] était convaincu que j’étais la meilleure personne pour le poste.

Sandro Grande

Quand on a officialisé son embauche, Grande a quitté son poste de directeur technique du FC Laval, qu’il occupait depuis 2021. Le lundi 9 janvier, un peu avant 18 h 30, le club a annoncé l’arrivée de Grande dans un communiqué. En conférence de presse le lendemain, Gabriel Gervais avait expliqué que le club « s’attendait à ce qu’il y ait des gens mécontents », mais pas que la vague prenne une telle « ampleur ».

Interrogé sur la façon dont le CFM a géré la situation, Grande est demeuré prudent.

« C’est difficile de dire ce qui aurait été le meilleur processus, a-t-il répondu. Je connais Gabriel Gervais depuis longtemps. Depuis 11 ans, j’ai travaillé dans plusieurs organismes et ils ont vu Sandro Grande grandir. Pour eux, ils ont choisi la meilleure personne pour être entraîneur-chef des U23.

« Je suis triste, parce que finalement j’avais l’opportunité de retourner dans le club que je soutiens depuis longtemps, de travailler avec mes amis, du monde que je connais depuis longtemps. La façon dont [la nouvelle] a été transmise, ce sont des questions pour [les dirigeants du CFM]. Je ne suis pas un gars de relations publiques, ce n’est pas mon métier. »

Grande a fait savoir que le CF Montréal lui avait « offert de l’aide » à la suite des évènements de la semaine dernière. Il consulte d’ailleurs un psychologue.

Guérir

Quant à savoir s’il croit qu’il sera pardonné par la population, Sandro Grande a répondu que « la seule manière de regagner le respect est de montrer qui je suis ». Il a rappelé avoir offert, au cours des dernières années, des conférences aux jeunes du Centre national de haute performance. « Comme je l’ai fait avec mes enfants, j’ai essayé d’expliquer que les réseaux sociaux sont un outil extraordinaire, mais aussi dangereux. »

Nous ne sommes jamais trop vieux pour gagner en maturité. […] J’ai tout fait depuis 10 ans dans la communauté pour montrer qui je suis.

Sandro Grande

« Tout ce que je peux faire est de passer le message à mes enfants. J’ai juste deux enfants à la maison, mais j’en ai croisé des centaines et chacun a une place spéciale dans mon cœur. »

Grande se donne quelques semaines, voire quelques mois, « pour guérir », mais il a toujours espoir de travailler un jour pour le CF Montréal. Gabriel Gervais, Olivier Renard et la famille Saputo « ont tous [s]on numéro », a-t-il dit.

« Et si le peuple est correct avec ça, je serais très content d’y retourner. Quand même, c’est le club de ma ville, celui que j’ai toujours soutenu. »