Aurélie Rivard a gagné sa première médaille des Jeux paralympiques à Londres, en 2012. Son temps de 4 min 36,46 s lui a alors valu l’argent du 400 m libre de la catégorie S10. Un chrono qui la placerait tout de même loin derrière son record du monde des Jeux de Tokyo, à 4 min 24,08 s.

Comme Rivard, la paranatation a évolué à une vitesse fulgurante. L’athlète de 28 ans, 10 fois médaillée paralympique, n’a pu faire autrement que de s’adapter pour demeurer au sommet. À vrai dire, sa performance de 2012 l’aurait écartée du podium paralympique, neuf ans plus tard.

« Cet été, ça me placerait peut-être dixième au monde. Et c’est quelque chose qu’on pourrait probablement constater dans toutes les épreuves », croit-elle.

Ce développement est passé par les avancées technologiques, comme l’explique son coéquipier Nicolas-Guy Turbide. L’accumulation des données et l’analyse des mouvements l’ont mené à deux médailles paralympiques, puis à un titre de champion du monde en 2022. Des méthodes qui lui ont aussi permis de poursuivre sa carrière malgré les blessures et de se qualifier pour ses troisièmes Jeux paralympiques à Paris.

« On est capables de mieux évaluer nos courses et de déterminer des objectifs concrets. J’utilise les données à mon avantage pour savoir où je devrais me situer et ce que ça va me prendre en compétition », explique le nageur malvoyant, qui participera au 50 m libre de la catégorie S13 à Paris.

Rien n’est négligé dans ses longueurs, surtout dans une épreuve de 50 m, où le moindre détail peut le priver d’un podium. La vitesse et la vélocité des mouvements sont étudiées, comme la puissance des poussées aux extrémités du bassin, le nombre de respirations et à quel moment il les prend.

Les entraînements se sont perfectionnés partout sur la planète et ils ont mené à des compétitions beaucoup plus relevées. Une excellente nouvelle, insiste Turbide.

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Le nageur malvoyant Nicolas-Guy Turbide

« C’est ça qu’on veut en tant qu’athlète. On veut que le sport se développe et qu’il y ait le plus de monde possible qui le pratique, dit-il. Tu ne veux pas gagner parce qu’il y a peu de gens dans ta catégorie. Tu veux te démarquer dans un plus gros bassin d’athlètes et tu souhaites qu’il y ait un filtre qui se fasse jusqu’aux Jeux et aux Mondiaux. »

Depuis 2019, l’équipe nationale de paranatation a droit à l’expertise de l’Institut national du sport du Québec. Des services médico-sportifs et scientifiques sont offerts aux athlètes afin de maximiser leur préparation.

Aujourd’hui, Aurélie Rivard juge qu’il serait difficile de s’en passer, alors qu’elle se prépare à vivre ses quatrièmes Jeux paralympiques.

« Ça simplifie beaucoup l’entraînement. Je sais quels sont les détails qui auront un impact dans la piscine. Ça me pousse aussi à me concentrer juste sur moi et sur ce que je peux contrôler. Tout ce qui m’entoure dans le sport est tellement en mouvement, je ne peux pas me fier à ça pour me faire une idée. »

Un mouvement plus respecté

Les paranageurs ressortent gagnants de la popularité grandissante du sport. D’abord, parce qu’ils n’ont plus à expliquer leur discipline comme avant, ou même à justifier leurs mérites.

En 2012, on me demandait si j’étais une vraie athlète ou une paralympienne. Ça fait des années que je n’ai pas eu à expliquer ce que sont les Jeux paralympiques, alors que ça arrivait souvent quand j’étais plus jeune !

Aurélie Rivard

Le circuit des Séries mondiales a débuté en 2016 et a été remodelé en 2023, passant de six à neuf étapes. Il y a désormais plus d’occasions de se démarquer et les athlètes sont aussi plus nombreux à se faire contacter par des commanditaires.

« On nous prend plus au sérieux qu’avant par rapport à notre entraînement et à ce que ça prend pour livrer la performance souhaitée, au lieu de nous voir comme des athlètes de seconde classe », poursuit Aurélie Rivard, qui nagera le 50 m, le 100 m et le 400 m libre à Paris, en plus du 100 m dos.

Au cours de l’hiver, le Comité paralympique canadien a annoncé que les athlètes canadiens seraient récompensés financièrement pour chaque médaille remportée aux Jeux paralympiques. On parle de 20 000 $ pour une médaille d’or, 15 000 $ pour une deuxième place et 10 000 $ pour le bronze. De l’argent dont la signification va bien au-delà du compte en banque.

« Les choses évoluent tranquillement. C’est le fun, la récompense financière, mais c’est encore mieux de voir qu’on est placés sur un pied d’égalité », précise Rivard, qui serait plus riche de 165 000 $ si le programme avait été mis en branle avant les Jeux de Londres.

Les mentalités changent à un rythme moins effréné que le sport. Ce ne sont pas les athlètes qui vont s’ajuster et ralentir la cadence, déterminés à en faire toujours plus pour aller toujours plus vite.