(Newark) Dans une ligue où les prix de participation n’existent pas, cinq défaites de suite, même si l’équipe « mérite mieux », c’est quand même cinq défaites.

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C’est à cette froide réalité que doit faire face le Canadien depuis deux semaines. Le revers de 4-3 au New Jersey, samedi, a ressemblé aux précédents : un effort louable, mais aussi une quantité appréciable d’erreurs, individuelles ou collectives, qui amincissent, voire annihilent toute chance de l’emporter.

Prenez cette joute disputée samedi après-midi, au New Jersey. La première période nous a donné l’envie de ne plus jamais regarder un match de hockey de notre vie tellement c’était ennuyeux. Après une quinzaine de minutes, il y avait à peine plus de tirs (7) que de dégagements refusés (5). Or, pour le Canadien, c’était une bonne nouvelle. À la fin de l’engagement, c’est lui qui avait eu les meilleures chances de marquer (quoique rares) et qui avait tenu au silence un adversaire plus talentueux.

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Curtis Lazar (42) protège la rondelle face au défenseur Kaiden Guhle (21).

En deuxième période, la tendance a été essentiellement la même, mais le CH a baissé sa garde. Deux fois, la confusion s’est installée en zone défensive et de mauvaises couvertures ont laissé un tireur libre dans l’enclave. Timo Meier et Ondrej Palat, dont ce n’était pas le premier barbecue, n’en demandaient pas tant.

En troisième période, les visiteurs ont aussi tenu leur bout, mais pour une énième fois, le train a déraillé. Deux buts des Devils, inscrits à trois minutes d’intervalle, ont scellé l’issue de ce match.

« Pas encore !?! », s’est-on certainement exclamé dans les chaumières de la province, lorsque Nico Hischier a donné les devants 3-2 aux Devils. Qu’en était-il au banc des Montréalais ?

« Il restait beaucoup de temps au cadran, a rappelé Brendan Gallagher. On a essayé de rester positifs et optimistes. La situation n’était pas idéale, mais notre état d’esprit était : OK, on va marquer le prochain. Ce n’est pas arrivé. Mais on a réduit l’écart et on a poussé, à la fin. »

Prochaine étape

Dans le camp du Canadien, on a sorti la rengaine du club qui méritait un meilleur sort.

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Nico Hischier (13) et Nick Suzuki (14) bataillent pour la rondelle.

« Au cours des derniers matchs, on était dans le coup, mais on n’a pas trouvé la manière de finir le travail, a analysé le gardien Jake Allen. C’est la prochaine étape. On a quelques jours pour se regrouper, et on a la chance de se reprendre mardi. »

Tout cela est sans doute vrai. Mais au risque de se répéter, c’est aussi représentatif de la qualité de l’effectif qui est déployé sur la glace. Pour gagner, il faudra dorénavant que tout soit parfait. C’est beaucoup demander à une équipe de 27place.

Car si Martin St-Louis note souvent que ses hommes « manquent de finition » et peinent à « se séparer » de leurs adversaires pendant un match, il y a un endroit où le CH se distancie : au classement général. En effet, le perdant du duel de mardi contre les Coyotes de l’Arizona pourrait se retrouver au 28rang. Les passionnés de loterie et de repêchage doivent saliver.

Ce qu’on a remarqué, toutefois, après la rencontre au New Jersey, c’est un changement de ton.

Je trouve qu’on mérite mieux, mais il faut que ça flippe. Tu ne peux pas juste mériter mieux, tu ne peux pas juste bien jouer, être correct avec ça et perdre. C’en prend plus.

Martin St-Louis

Cette nuance est flambant neuve. Le défi, dorénavant, est « mental », a-t-il ajouté.

Il n’a pu fournir d’explication pour justifier le fait qu’en dépit de sa satisfaction à l’égard du jeu défensif de ses hommes, ceux-ci aient encore accordé quatre buts. On était, néanmoins, très loin de l’odeur de complaisance qui commençait à planer autour de l’équipe, comme l’a souligné le chroniqueur François Gagnon, de RDS, dans un texte publié vendredi.

Lisez « La complaisance s’installe ! »

Brendan Gallagher a lui aussi parlé d’un « test » mental et physique pour ses coéquipiers et lui. « C’est une bonne occasion de progresser et de gagner de l’expérience en tant que groupe », a-t-il dit au sujet de la vilaine séquence de défaites du moment.

Or, « on est des êtres humains », a-t-il ajouté.

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Brendan Gallagher a marqué un but en deuxième période.

« On est conditionnés à penser d’une certaine manière, c’est dur, bloquer ça complètement. Il faut savoir comment composer avec nos émotions. C’est une chose que tout le monde traverse à un point de sa carrière. »

« On veut gagner, a-t-il encore dit. [Sur le plan individuel], je vais regarder mon match et trouver où m’améliorer. En tant qu’équipe, on se concentre à obtenir un résultat et à construire sur ça. »

Le ton n’est pas le seul à avoir changé : le vocabulaire aussi. Le mot « résultat » n’est à peu près jamais prononcé, chez le Canadien, depuis deux ans. On sent toutefois s’installer une lassitude, même un agacement, dans ce vestiaire, devant les défaites qui s’accumulent. Quand Jake Allen parle de la « prochaine étape », ça semble soudain moins abstrait, moins lointain.

Ce qui nous rappelle que les joueurs, même s’ils ont toute la patience du monde face aux objectifs de l’organisation, ont quand même choisi ce métier pour gagner des matchs.

Pas juste pour participer.

En hausse

Tanner Pearson

L’apparition d’un joueur de centre de plus grande qualité sur le quatrième trio le sert bien. Trois tirs cadrés et deux chances de marquer de qualité en 10 min 36 s.

En baisse

Joel Armia

Son match pourrait s’intituler « comment bousiller son retour sur le deuxième trio ». Aucune de ses initiatives ne semblait fonctionner, et il a complètement abandonné Timo Meier sur le premier but des Devils.

Le chiffre du match

25 %

D’ordinaire très fiable au chapitre des mises en jeu, Jake Evans a connu une sortie misérable, ne remportant que 4 de ses 16 duels.

Dans le détail

Le meilleur des remèdes

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Pour relancer un avantage numérique qui en arrache, pas de meilleurs remèdes que d’affronter le Canadien.

L’avantage numérique des Devils, avant cette rencontre, n’allait absolument nulle part. À leurs 46 dernières tentatives, ils n’avaient inscrit que deux buts. On a un peu compris pourquoi en deuxième période, lorsque Michael Matheson a été puni pour obstruction : on peut avoir tout le talent du monde, mais quand la cohésion n’y est pas, ça ne fonctionnera pas. Les locaux ont eu une seconde chance en troisième période, et ce fut la bonne. Dès le départ, la rondelle a mieux circulé, et Jake Allen a dû se signaler sur Nico Hischier, Luke Hughes et Jesper Bratt. Le Tricolore nous a ensuite rappelé qu’il demeurait le meilleur remède à un club en léthargie. Un mauvais positionnement de Mike Matheson et un repli mou de Joel Armia ont permis à Hischier de s’avancer seul jusqu’à Allen pour le déjouer entre les jambières. « On l’avait tuée, cette punition-là. C’était quasiment fini », s’est navré Martin St-Louis. Vérification faite, il restait 29 secondes. Ce n’était pas si fini que ça, finalement.

Bon pour Nick, moins pour Nico

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Nick Suzuki célèbre son but marqué en deuxième période.

Nick Suzuki a accru son avance au premier rang des buteurs du Canadien en inscrivant ses 21e et 22buts de la saison. Un rendement bien mérité pour le numéro 14, qui demeure une rare locomotive au sein d’une attaque boiteuse. Maintenant, on conviendra que sans les largesses de Nico Daws, le capitaine n’aurait peut-être pas deux buts de plus à sa fiche. En deuxième période, le gardien avait bien réussi son déplacement latéral avant d’affronter le tir de Suzuki. Il a toutefois été déjoué du côté rapproché sans qu’aucune forme d’obstacle ne se trouve dans le chemin. Ce n’est pas exactement le rêve d’un gardien. En fin de match, sur le but qui a permis au CH de réduire l’écart à 4-3, l’odieux revient certes à Jesper Bratt, qui a complètement raté son dégagement, mais c’est quand même Daws qui a « pondu » la rondelle vers son filet. Si les Devils aspirent aux séries éliminatoires, ce n’est pas avec le personnel en place que leurs chances se solidifieront. Après la rencontre, l’organisation a d’ailleurs annoncé avoir rappelé Akira Schmid de la Ligue américaine.

Pauvre Josh…

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Josh Anderson lance au filet.

Il y a de ces matchs, comme c’est arrivé si souvent en début de saison, où on ne peut faire autrement que se sentir mal pour Josh Anderson. En première période, profitant d’un surnombre, Jake Evans a servi une passe parfaite au gros ailier, qui a tiré loin, très loin d’un filet complètement ouvert. Puis, au dernier tiers, alors que les Devils venaient de prendre les devants, l’aréna en entier a entendu le cri d’Anderson qui réclamait la rondelle pour s’échapper. Il l’a reçue, a foncé au filet, et a tiré directement sur la barre horizontale. Anderson a ainsi étiré à 13 matchs sa séquence sans but, lui qui n’en a inscrit qu’un seul à ses 20 dernières joutes. « C’est un gars qui se présente chaque jour au travail ; on veut tous qu’il réussisse à sortir de cette disette, a souligné Brendan Gallagher. Il mérite d’être récompensé. Il a marqué des buts toute sa vie, il va le faire encore. Il faut qu’il continue de faire les bonnes choses. »

Simon-Olivier Lorange, La Presse