Avec deux ados qui pratiquent le hockey de haut niveau, la famille Lévesque passait déjà le plus clair de son temps dans les arénas. Ce n’était pas suffisant, semble-t-il, parce que trois d’entre eux, le papa et les deux ados, ont décidé de se lancer dans l’arbitrage. Une implication qui nécessite beaucoup d’organisation, mais surtout, qui amène son lot d’impacts positifs.

Ça fait beaucoup de hockey, dites-vous ? « On est passionnés ! », vous répondra Chloé, 15 ans.

C’est exactement ce qu’elle nous dit quand on passe ce même commentaire lors de notre entretien avec la famille sur la plateforme Zoom.

Pour être passionnée, la famille Lévesque est passionnée.

C’est Chloé elle-même qui a été la première à faire le pas vers l’arbitrage. La défenseure pour les As de Québec M18 AAA féminin a eu cette idée en discutant avec des coéquipières. « On s’est dit qu’on pourrait suivre notre formation, qu’on allait commencer et voir si on a du fun, raconte-t-elle. Finalement, j’aime vraiment ça. »

Comme elle n’a que 15 ans, Chloé n’a pas encore de permis de conduire. Nécessairement, un de ses deux parents devait l’accompagner aux matchs. « Mon père a dit : tant qu’à venir te reconduire, je vais embarquer sur la glace avec toi ! », relate l’adolescente.

Son père esquisse un sourire. « On avait [déjà] un horaire assez chargé. Mais là, je me suis dit : tant qu’à venir et rester assis… »

Même chose du côté de Jacob qui, étant donné l’horaire de transport compliqué, devait assister aux matchs de sa sœur. « Rester assis dans les estrades une soirée, ce n’est pas tout le temps le fun, donc j’ai décidé d’arbitrer aussi », lâche le jeune homme de 14 ans.

PHOTO FOURNIE PAR GUILLAUME LÉVESQUE

Jacob Lévesque

Affirmation de soi

Guillaume Lévesque est gestionnaire pour une compagnie d’assurances. À 43 ans, il ne perçoit pas son implication dans le hockey mineur comme un travail ou un revenu secondaire. « C’est vraiment par passion et pour redonner », explique-t-il. Sa conjointe et lui se réjouissent surtout des impacts positifs de cet emploi sur leurs enfants.

« Ce qu’on se disait, c’est que [c’est bon] pour la gestion des émotions quand ils jouent eux-mêmes. Ils apprennent qu’une erreur, ça arrive. »

Sa fille abonde dans le même sens. « En tant que joueur, on a tendance à chialer après les arbitres. Mais quand tu es une arbitre et une joueuse, tu te dis : “je pourrais être à sa place en ce moment”. »

« L’autre élément, c’est beaucoup l’affirmation de soi et de se faire confiance, continue M. Lévesque. Tu es dans une situation où il faut que tu sois en contrôle, que tu sois conséquent des décisions que tu prends. Il faut que tu sois capable de les expliquer. C’est une analyse qui vient rapidement. »

Ça sert autant dans leurs matchs de hockey, où il faut que tu t’ajustes rapidement, qu’à l’école ou dans des situations de tous les jours, où tu fais face à une situation où il faut que tu analyses et que tu prennes une décision rapidement.

Guillaume Lévesque

Comme les membres de la famille n’arbitrent pas souvent les trois ensemble, celui ou ceux qui sont dans les gradins prennent des notes.

« On se permet d’être critiques envers les uns et les autres », lance M. Lévesque.

« On veut s’améliorer ! ajoute sa fille. On prend des petites notes. »

PHOTO FOURNIE PAR GUILLAUME LÉVESQUE

Chloé Lévesque

Des matchs « plus intéressants »

Au cours des cinq derniers mois, il n’est arrivé que deux fois que les trois membres de la famille soient assignés au même match, dont la journée où a été prise la photo qui coiffe cet article. Les fins observateurs auront remarqué que c’est Chloé qui porte les bandes orange d’arbitre en chef.

Cette journée-là, le trio s’est donné comme mission d’arbitrer avec intensité, « pour les jeunes », nous raconte le paternel. « On était vraiment dedans, on patinait, on faisait les appels à longueur de la glace. Les petits gars étaient dedans, les coachs tripaient. »

« Ça fait des matchs plus intéressants », note Chloé.

Quand on est sur la coche et qu’on garde le contrôle sur notre match, ils ont le goût de se forcer même si c’est un lundi soir et qu’ils ont eu une grosse journée.

Chloé Lévesque

« Si toi tu apportes l’intensité en tant qu’arbitre dans ce que tu as à faire, ça n’a pas le choix de donner un bon spectacle pour les joueurs, les coachs. Les parents aussi, note M. Lévesque. Si tu es tout mou et qu’il y a un mauvais call, ça va crier. Si tu es dedans et que tu en manques une, le pardon est plus facile aussi. »

Dans le secteur de la Rive-Nord de Québec, les situations problématiques impliquant parents ou entraîneurs sont plutôt rares, selon le co-responsable des arbitres, Sébastien Aubry. M. Lévesque en a une en mémoire, où un entraîneur-adjoint « l’a complètement échappé » ; il s’en est pris verbalement et gestuellement à sa fille en début de match. Mais ça demeure « une minorité », insiste-t-il.

« Ça arrive parfois, mais c’est rare, complète Chloé. J’ai fait plus de 30 matchs depuis le début de l’année et c’est arrivé deux ou trois fois. »

PHOTO FOURNIE PAR GUILLAUME LÉVESQUE

Jacob et Chloé Lévesque

« Ça nous responsabilise »

Comme Chloé et Jacob passent la grande majorité de leurs fins de semaine à l’extérieur pour leurs propres matchs, les Lévesque arbitrent principalement les soirs de semaine. En matière d’organisation, la famille est bien rodée ; les parents ont créé un « calendrier consolidé » incluant le travail, les activités hockey et les activités hors hockey.

« Quand ils reçoivent leurs assignations, ils savent déjà où ça peut entrer et où ça ne peut pas entrer », explique le père de famille.

« Ça nous responsabilise, ça nous aide avec notre autonomie, note Chloé. On voit comment ils font les horaires, on apprend de ça, on est capables d’avoir une routine. On garde tout ça serré. »

Alors que notre entretien tire à sa fin, on demande au trio s’il a quelque chose à ajouter. Le papa précise : « Nous, c’est vraiment de l’implication positive. »

« Je comprends qu’on ne peut pas tout le temps être les trois ensemble, mais c’est vraiment quelque chose quand ça arrive. »