Il ne faudra pas râler, le 8 mars à 16 heures, au terme de la date limite des transactions, si Kent Hughes n’a aucun échange à commenter lors de son allocution aux médias.

Le DG du Canadien a déjà réussi l’un des seuls coups espérés, et possibles, dans sa position : obtenir un choix de premier tour pour Sean Monahan avant que celui-ci ne se blesse.

Que reste-t-il à échanger ? Presque rien. Tanner Pearson et Chris Wideman sont les deux seuls autres éventuels joueurs autonomes sans compensation, donc étiquetés joueurs de location. Pearson, 31 ans, vient de revenir au jeu récemment. Son manque de vitesse est flagrant. Il a obtenu trois points à ses 25 derniers matchs. Et il touche 3,25 millions annuellement. Sa valeur est presque nulle.

Au moins, Hughes a déjà obtenu un choix de troisième tour en 2025 lors de son acquisition des Canucks, en retour du gardien Casey DeSmith. Wideman n’a pas joué de la saison en raison d’une blessure au dos.

Il y a évidemment le cas des gardiens. Il serait mieux avisé de garder celui de 24 ans, Cayden Primeau, au salaire annuel de 890 000 $ pour encore une saison. Mais qui vaudra de Jake Allen, 33 ans, avec son salaire annuel de 3,85 millions pour cette année et la suivante, et de piètres statistiques, avec une fiche de 5-9-3, sa moyenne de buts alloués de 3,43 et son taux d’arrêts de .901 ? Même en retenant la moitié de son salaire, Allen ne sera pas facile à transiger.

Et David Savard ?

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

David Savard

Le collègue Guillaume l’a rappelé avec justesse ce week-end : Montréal a échangé Tyler Toffoli et Artturi Lehkonen en 2022 même si ceux-ci auraient encore été liés contractuellement à l’organisation après cette saison-là.

Le CH est toujours en reconstruction, du moins en réinitialisation, mais le contexte a changé légèrement depuis deux ans. L’organisation était alors en décroissance, de façon à accumuler les choix au repêchage, et pourquoi pas repêcher au sommet ? Montréal vise désormais une croissance, et l’objectif l’an prochain sera de se battre pour une place en séries éliminatoires jusqu’à la fin de la saison. Il faut bien remonter la pente un jour.

Ainsi, le défenseur David Savard, 33 ans, joueur autonome sans compensation à compter du 1er juillet 2025, pourrait avoir une valeur intéressante sur le marché, mais le manque de profondeur à droite en défense, et son ascendant sur les jeunes, en font un atout inestimable pour encore un an. Kent Hughes ne refusera pas une offre époustouflante, mais elle devra justement l’être.

Pourquoi ne pas avoir conservé Monahan si on voulait entrer en période de croissance, se demandent encore certains ? Monahan, après tout, avait accumulé 35 points en 49 matchs et brillait dans la plupart des facettes du jeu.

Contrairement à Savard, Monahan était à quelques mois de son autonomie complète dans une saison désormais perdue pour le Canadien. En outre, Hughes lui avait fait la promesse de l’échanger à un aspirant à la Coupe Stanley si Montréal était écarté de la course aux séries à l’approche de la date limite des transactions.

Le Canadien a probablement aussi conclu qu’il ne serait pas sain au plan salarial d’offrir à Monahan, 30 ans en octobre et usé par de nombreuses blessures au fil des ans, une entente à long terme payante.

Rappelons-nous seulement Brendan Gallagher. Il avait 28 ans à la signature de sa prolongation de contrat de six ans en octobre 2020 par Marc Bergevin. Il venait de connaître une saison de 43 points, dont 22 buts, en 59 matchs dans cette saison écourtée par la pandémie, un rythme de 60 points, dont 31 buts, sur un calendrier de 82 rencontres. Il constituait encore un élément essentiel de cette équipe, comme Monahan l’était encore jusqu’à son départ, vendredi dernier.

Gallagher a marqué 23 buts, obtenu 54 points en 143 matchs depuis. En ramenant cette production sur une saison complète, il s’agit de 13 buts et 31 points sur une année de 82 rencontres. Il lui reste encore trois années de contrat à une moyenne salariale de 6,5 millions au sein du plafond. Le CH lui a donné 8 millions cette saison et lui versera 9 millions l’an prochain, selon le site capfriendly.com.

Un rachat de contrat sera nettement plus avantageux dans un an, à compter de juin 2025. Il restera alors 10,5 millions à lui donner sur deux ans, et non pas 19,5 millions sur trois saisons comme ça sera le cas cet été.

Dans un tel contexte, Gallagher est évidemment impossible à échanger, vous l’aurez deviné. Tout comme Josh Anderson d’ailleurs. Anderson, 30 ans en mai, est sous contrat lui aussi pour trois années supplémentaires, à un salaire annuel moyen de 5,5 millions. Il reçoit 8 millions cette année et touchera 7 millions la saison prochaine.

Anderson a marqué sept buts cette année, et obtenu treize points, trois de moins que Gallagher, 16 points, dont 8 buts, en 48 matchs. Geoff Molson crache donc cet hiver 16 millions pour 15 buts…

Un jeune défenseur peut toujours être sacrifié

Avec l’arrivée probable de Lane Hutson ce printemps, peut-être celle d’Adam Engström s’il offre des performances convaincantes à Laval au départ, et une défense déjà congestionnée à gauche, il faudra faire de la place. Mais il n’y a pas d’urgence non plus. Arber Xhekaj peut encore être renvoyé dans la Ligue américaine sans être soumis au ballottage. Kaiden Guhle peut rester à droite. Et Jordan Harris revisiter la tribune de presse s’il ne s’améliore pas.

Il arrive qu’on échange de plus jeunes joueurs à la date limite. Mais ce type de transaction survient généralement plus souvent l’été, à l’aube du repêchage ou pendant l’évènement. Rien n’est impossible, évidemment, mais plus improbable que le contraire.

Brandon Gignac récompensé

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Brandon Gignac

Il faut retenir ce moment lors d’un match préparatoire contre les Sénateurs d’Ottawa, le 27 septembre. Kirby Dach et Johnathan Kovacevic ont été punis successivement en début de troisième période. Qui Martin Saint-Louis a-t-il envoyé sur la glace comme seul attaquant à trois contre cinq ? Pas Monahan, pas Suzuki ou Harvey-Pinard, mais bien Gignac, un centre pourtant sous contrat par le Rocket de Laval.

Gignac a aussi marqué le premier but du Canadien ce soir-là, joué 13 minutes et obtenu un taux de succès de 68 % lors des mises au jeu. Sa vitesse sautait aux yeux. Mais il a été renvoyé au camp d’entraînement du Rocket deux jours plus tard avec 28 compagnons de travail.

On a mis quatre mois à le récompenser, mais, muni désormais d’une entente de deux saisons de la LNH, avec un volet pour la Ligue américaine, et le départ de Sean Monahan, Gignac peut s’attendre à rester à Montréal pour le reste de la saison. Et prouver qu’il peut devenir le quatrième centre du Canadien pour l’an prochain, devant Luca Condotta, l’autre candidat.