(Raleigh) L’idée d’un système ou d’un organisme qui est supérieur à la somme de ses parties est loin d’être neuve. Qui de Durkheim, Aristote ou Dick Irvin a été le premier à l’appliquer au hockey ? On ne le saura jamais.

Qu’à cela ne tienne, le temps passe et le concept, contrairement à nous tous, n’a pas pris une ride. L’évoquer en cette fin d’année nous mène, dans une logique implacable, à nous intéresser à la relation unissant David Savard et Mike Matheson.

Celle-ci se définit assez simplement : les deux défenseurs québécois sont meilleurs ensemble qu’individuellement. Tant la saison dernière que depuis le début de la présente campagne, le Canadien a obtenu une plus grande proportion de tirs cadrés, de buts marqués, de buts attendus et de chances de marquer de qualité lorsque le duo était réuni sur la glace que lorsque les arrières étaient utilisés l’un sans l’autre.

Dans une récente analyse, le site The Athletic remarquait que Matheson semble jouer, depuis un certain temps, avec davantage d’audace, au sens positif du terme. Le mérite lui revient de mieux calculer les risques qu’il prend. Mais il est impossible de faire abstraction de l’impact de son partenaire.

Consultez l’analyse de The Athletic (en anglais ; abonnement requis)

L’entraîneur-chef Martin St-Louis répète souvent que les chiffres ne disent pas tout, qu’il ne faut pas les isoler de leur contexte. Et il a raison. Par exemple, lorsque David Savard et Kaiden Guhle évoluaient ensemble, la saison dernière, les données analytiques n’étaient pas flatteuses à leur égard. Toutefois, ils étaient souvent la meilleure option, voire la seule, que St-Louis avait sous la main pour affronter les principaux trios adverses.

Cette saison, les chiffres sont révélateurs. Après avoir joué un nombre appréciable de minutes avec quatre partenaires différents, c’est avec Savard que Matheson s’en tire le mieux, et ce, alors que leur combinaison hérite des affectations les plus difficiles à cinq contre cinq.

Lorsqu’on aborde la question avec les deux principaux intéressés, la notion qui revient le plus souvent dans leurs réponses est sans conteste la complémentarité.

« Je pense que je suis plus défensif que d’autres partenaires qu’il a eus dans le passé », a supposé Savard, mercredi, après l’entraînement du Tricolore à Raleigh, à la veille d’un duel contre les Hurricanes de la Caroline.

J’essaie de [donner à Matheson] toutes les chances d’aller en attaque. C’est son style, il aime patiner avec la rondelle, tandis que je préfère la distribuer rapidement.

David Savard

Chacun protège les arrières de l’autre, a ajouté Savard. Si le numéro 8 se fait surprendre à l’avant, le 58 peut réparer les pots cassés. Et si c’est le natif de Saint-Hyacinthe qui est fautif, celui de Pointe-Claire a la vitesse nécessaire pour arriver en repli.

« Avec lui, le jeu est simple, a confirmé Matheson. Je sais toujours où il va être, et je pense que lui aussi sait où je vais être. On voit le jeu d’une manière similaire. »

Appui

L’œil de leur entraîneur voit la même chose.

« Savvy [Savard] est capable d’envoyer des rondelles à la bonne place, a noté Martin St-Louis. Quand Matheson est ouvert, qu’il a de l’espace et de la vitesse, c’est rare qu’il ne l’atteigne pas. Savvy, on le voit comme un défenseur défensif qui bloque des tirs, mais c’est un gars qui est capable d’amorcer l’attaque et de l’appuyer. »

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Mike Matheson (8) et Cole Caufield (22) après une victoire du Canadien

Les deux ont aussi souligné, sans qu’on l’aborde, leur amitié hors de la glace. À l’évidence, les atomes crochus sont nombreux entre les doyens de la défense, qui vont régulièrement souper ensemble. Les discussions sont franches, à l’aréna comme à l’extérieur.

« On crée des liens, on veut s’entraider, précise Savard. On n’essaie jamais de rejeter la faute sur l’autre. Si on fait des erreurs, on n’a pas de problème à dire qu’on aurait dû faire une meilleure job. On est très honnêtes l’un envers l’autre. »

Dans le contexte d’une défense très jeune, donc vulnérable, évoluer avec un partenaire expérimenté change aussi la perspective.

PHOTO MATT KROHN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Chaos en zone défensive pour le Canadien alors que Mike Matheson (8) est étendu devant le filet lors d’un match contre le Wild du Minnesota

Les qualités de l’un comme de l’autre sont soulignées à grands traits dans le vestiaire, particulièrement dans leur rôle de leaders auprès de leurs cadets. Reste que patiner avec un partenaire de 29 ans, qui approche les 500 matchs dans la LNH, induit « une relation différente », convient Savard. « On a moins de conversations par rapport à des choses que [Matheson] pourrait faire. On parle plutôt de ce qu’on peut faire ensemble pour se corriger si une situation arrive. »

De manière générale, David Savard apporte beaucoup de « calme » à son équipe, a encore rappelé Martin St-Louis, mercredi. Et son retour, le 10 décembre dernier, semble avoir eu un effet domino sur toute l’escouade défensive. Le duo de Justin Barron et Kaiden Guhle apparaît plus soudé, plus solide. Et Johnathan Kovacevic a pu être réinséré sur le troisième duo, où il est résolument plus à son aise.

Alors que Jayden Struble a remplacé Arber Xhekaj, et avec le retour au jeu imminent de Jordan Harris, il pourrait s’installer un équilibre au sein de la défense montréalaise qu’on a peu vu, voire pas du tout, depuis le début de la dernière saison. Comme si, pour une très rare fois, tout le monde était dans la bonne « chaise ». Ou, à tout le moins, s’en approchait.

Primeau et (probablement) Harris contre les Hurricanes

PHOTO ERIN HOOLEY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Cayden Primeau

Martin St-Louis a confirmé que le gardien Cayden Primeau affronterait les Hurricanes, jeudi soir. On s’attend aussi à ce que le défenseur Jordan Harris réintègre la formation. À l’entraînement, il a patiné à la droite de Jayden Struble, tandis que Johnathan Kovacevic et Gustav Lindstrom semblaient les hommes en trop. Autrement, Emil Heineman brillait par son absence. L’équipe n’a pas fait de remarque officielle à son sujet. Or, pour retirer le nom de Harris de la liste des blessés, il fallait céder l’attaquant au Rocket de Laval, ce qui ne pouvait arriver avant minuit, dans la nuit de mercredi à jeudi, en raison du gel de transactions imposé par la LNH jusqu’au 27 janvier inclusivement. On se doute donc que Heineman est resté à Montréal et que sa rétrogradation sera annoncée en matinée.