(Columbus) Était-ce l’air de la Californie ? Le fait de se retrouver entre potes pour une dizaine de jours loin de la maison ? Ou, platement, le fait d’affronter des équipes de fond du classement ?

Toujours est-il que, comme tout bon épisode de Scooby-Doo, ce long voyage du Canadien a connu un dénouement des plus inattendus.

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Gustav Lindström et Joel Armia

Inattendu parce que, faut-il le rappeler, cette série de cinq matchs sur les patinoires étrangères s’était amorcée par un fiasco à Boston, au terme duquel Martin St-Louis avait qualifié son équipe de « molle ». L’adjectif est rarement un compliment ; il est, au mieux, purement descriptif lorsqu’il sert à décrire un matelas ou une crème glacée.

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Or, cette même équipe, mercredi, a pu se permettre de faire jouer I Won’t Back Down, de Tom Petty, dans son vestiaire. L’humeur était telle que même l’ultra timide Joel Armia s’est présenté devant les caméras et y est resté pendant trois bonnes minutes. Il n’était pas plus un tribun, mais affichait néanmoins un large sourire.

Même Cole Caufield, pas toujours bavard après les matchs, est resté pour discourir. Il souriait de toutes ses dents quand on l’a questionné au sujet d’une montée à trois contre deux dont il a profité avec son trio, lorsque les Blue Jackets ont complètement bousillé un changement. « C’était bizarre. Je n’avais aucune idée de ce qui s’était passé ! J’ai demandé à Martin de me raconter ce qui s’était passé », racontait Caufield.

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Cole Caufield (22)

Telle était l’humeur dans le vestiaire de l’équipe qui venait de l’emporter 4-2 sur les Blue Jackets. Montréal conclut sa série de cinq matchs sur la route avec une fiche de 3-2-0. Les puristes rappelleront que ce n’était pas un voyage de cinq matchs à proprement parler, puisqu’ils sont rentrés à la maison après la bastonnade subie à Boston.

Ce sont donc trois victoires en quatre sorties depuis qu’ils sont repartis de Brossard, mais on note que ces trois gains ont été signés contre Columbus, Anaheim et San Jose, parmi les six pires équipes de la LNH au classement.

« L’important, c’est la victoire, a proclamé Caufield, clairement pas dans le camp des partisans du processus. Il faut trouver des façons de gagner. On revient avec une bonne fiche, même si on a des choses à corriger. Il faut remettre ça [ce jeudi]. »

La progression

N’empêche que collectivement et individuellement, l’équipe a mis à profit le drôle de calendrier à sa disposition pour parfaire son travail. Rares sont les voyages, comme celui-ci, où une équipe profite de quatre entraînements complets.

« Ces derniers jours, on a travaillé sur des choses qui nous ont donné de la misère en Californie, en backcheck [repli défensif], pour ne pas donner trop de passes transversales, et je pense que ça a aidé », a noté Samuel Montembeault.

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Samuel Montembeault

« On a beaucoup travaillé sur notre échec avant et on a été forts », a ajouté Mike Matheson. Mercredi, ça a donné une équipe qui a pu embouteiller les Jackets pendant quelques longues séquences. Pendant l’une d’elles, Juraj Slafkovsky s’est retrouvé en plein milieu de l’enclave avec deux occasions de tirer de grande qualité. S’il a été lent sur la première, il a dégainé à toute vitesse la deuxième fois, là aussi un élément qui avait été travaillé à l’entraînement ces dernières semaines.

Parlant de Slafkovsky, en voilà un qui a fait des pas dans la bonne direction. Lors du fameux match à Boston, il avait été l’un des pires joueurs de son camp, même s’il avait fini la soirée avec deux points. Il était employé aux côtés de Sean Monahan et la sauce n’a jamais vraiment pris.

Voilà qu’il vient de passer les quatre derniers matchs avec Caufield et Christian Dvorak. Ce n’est pas exactement Marchand-Bergeron-Pastrnak, mais le tout premier choix du repêchage de 2022 a globalement connu une bonne semaine. Contre Columbus, il a réussi la sortie de zone qui a mené au but de Caufield.

À 22 ans, Alex Newhook fait partie des jeunes, même si son expérience laisse croire le contraire. Il rentre à Montréal avec trois buts à ses quatre dernières sorties. « Il a une belle progression, il s’intègre à l’équipe, à nos concepts. Il en a encore beaucoup à apprendre, mais j’aime son engagement », a vanté St-Louis.

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Alex Newhook (15) et Boone Jenner (38)

Kaiden Guhle continue de jouer avec un aplomb impressionnant pour un type qui en était mercredi à son 62match dans la LNH. Justin Barron a gobé des minutes tout en limitant les bévues flagrantes. Même Jayden Struble, dans un rôle plus effacé, a connu de belles séquences mercredi. Lui rentre en ville avec ses quatre premiers matchs derrière la cravate.

Il sera toutefois intéressant de voir comment les vétérans réagiront au cours des prochains jours, car s’il y en a qui traînent la patte, c’est au sein de ce groupe. Certains ont dû quitter Columbus encouragés. Monahan, par exemple, a habilement préparé le but gagnant d’Armia en maîtrisant la rondelle avec calme, comme il le faisait si bien en octobre. Armia lui-même a sans doute apprécié sa fin de soirée, avec ce but un brin chanceux, entendons-nous, puis un jeu important en fond de territoire qui a mené au but d’assurance dans un filet désert.

Ça demeure toutefois aussi énigmatique pour Josh Anderson, que St-Louis a bien tenté de dynamiser en le déléguant avec le premier trio pour amorcer le match contre son ancienne équipe.

On aura les réponses avant longtemps, car le CH reprend le boulot dès ce jeudi soir contre les Panthers.

En hausse : Kaiden Guhle

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Kaiden Guhle

Pour la quatrième fois cette saison, il a été le joueur le plus employé de son camp, passant près de 25 minutes sur la surface. Il a certes commis un revirement sur le deuxième but des Jackets, mais a réparé plusieurs bévues.

En baisse : Tanner Pearson

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Tanner Pearson

Une autre soirée effacée pour le vétéran, qui ne compte que 2 points à ses 17 derniers matchs.

Le chiffre du match : 37

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Elvis Merzlikins bloque un tir de Juraj Slafkovsky

C’est le nombre d’arrêts de jeu dans ce match au cours duquel les pauvres descripteurs n’ont pas eu beaucoup de répit. Ça explique pourquoi la rencontre s’est jouée en 2 h 12 min.

Dans le détail

Les malheureux s’éclatent

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Patrik Laine (au centre)

Les cas de Patrik Laine et de Johnny Gaudreau ont fait jaser dans les chaumières de l’Ohio ces dernières semaines. Yegor Chinakhov, lui, a suscité moins de réactions, mais selon le collègue Brian Hedger, du Columbus Dispatch, l’attaquant souhaite un changement d’air. « Il ne sent pas qu’ils lui font confiance », a écrit l’agent de Chinakhov à Hedger. Peut-être changera-t-il d’idée s’il découvre les allées de quilles du Pins Mechanical Co., mais d’ici là, ses performances n’en souffrent pas, au contraire. Le Russe a marqué dans un deuxième match de suite et il a bien failli briser l’égalité de 2-2 en début de troisième période. Laine a lui aussi trouvé le fond du filet et compte trois points en cinq matchs depuis que Pascal Vincent l’a envoyé dans les gradins.

Un point non mérité

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Gustav Lindström

La statistique du différentiel est critiquée pour plusieurs raisons, bonnes et moins bonnes. Le but de Laine servira certainement aux pourfendeurs de cette mesure. Gustav Lindström, qui avait le jeu devant lui, a néanmoins décidé de filer au banc, même s’il était sur la patinoire depuis une quarantaine de secondes. Lindström a donc sauté par-dessus la bande pour éviter que son équipe soit prise en défaut, mais le pauvre Justin Barron, qui l’a relevé, a évidemment été pris à contre-pied et n’a pu que regarder Laine déjouer Samuel Montembeault et déclencher le satané canon. Barron a donc hérité d’un -1 qui n’aurait pas dû lui revenir, l’équivalent d’un point non mérité au baseball. Et Lindström s’en est tiré sans tache à sa fiche. À méditer quand on notera qu’il a fini la soirée à +2.

Les hauts et les bas de Caufield

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Cole Caufield et Boone Jenner

Les mauvaises langues diront que Cole Caufield, réputé pour ses talents de marqueur, s’est découvert des talents de passeur en première période. Ses passes à Zach Werenski et à Johnny Gaudreau étaient en effet directement sur le ruban adhésif, le seul problème étant évidemment que les deux bipèdes portaient un chandail bleu. « On commettait trop de revirements en première période », a commenté Caufield, sans citer de noms. Il reste que le petit numéro 22 est revenu en force en deuxième période, jouant avec nettement plus d’explosion dans son coup de patin. Ses efforts se sont concrétisés lorsqu’il a marqué, même s’il devrait sans doute offrir un bon chianti à Elvis Merzlikins, qui lui a donné un généreux retour sur le tir de Christian Dvorak. Des tirs « dans le toutou », de la sorte, ne devraient pas générer de tels retours. C’était seulement un troisième but à cinq contre cinq pour Caufield cette saison, mais un deuxième à ses trois derniers matchs.