David Reinbacher s’imagine bien terminer la saison avec le Canadien. Et il pourra reprendre son chemin vers la Ligue nationale cette semaine. Le jeune joyau est en effet revenu au jeu vendredi soir, après avoir raté sept matchs sur trois semaines, une absence bien moins longue que ce qui était craint à l’origine. La Presse l’a rencontré.

(Kloten, Suisse) On pouvait entendre une mouche voler au Stimo Arena, amphithéâtre un brin rustique en banlieue de Zurich, lors du passage de La Presse en ce jeudi matin d’octobre.

L’entraînement de l’EHC Kloten, le club de Reinbacher en ligue nationale suisse, achevait quand le 1er choix du Canadien s’est amené sur la patinoire. Un à un, les joueurs rentraient au vestiaire, jusqu’à ce qu’il ne reste que le jeune éclopé et Kimmo Rintanen, un des entraîneurs adjoints, chronomètre au cou. Reinbacher devait effectuer le plus de tours possible dans un laps de temps. D’un passage à l’autre, il penchait, il grimaçait.

« Kimmo peut te casser ! Mais c’est correct, j’en ai besoin », admet le jeune homme, à sa sortie de la patinoire.

Le retour de Reinbacher en Suisse, après son passage au camp d’entraînement du CH, ne s’est pas exactement déroulé comme il l’entendait. Dès son troisième match, le 13 octobre, il s’est blessé. « C’était un accident. Il a essayé de contrer une mise en échec, mais il s’est coincé le poignet et le genou », décrit l’entraîneur-chef de Kloten, le Montréalais Gerry Fleming.

Lors de notre visite, 13 jours après l’incident, le genou était déjà guéri, mais pas la main, même si, à l’origine, c’est son articulation qui semblait touchée. À un certain point, il y avait même une possibilité que Reinbacher rentre à Montréal, scénario écarté quand sa blessure s’est avérée mineure.

« J’ai d’abord senti de la douleur à mon genou, donc je ne sentais pas celle à ma main, raconte Reinbacher. J’étais vraiment inquiet, je ne pouvais pas bouger mon genou, je me demandais si j’avais une fracture. C’est seulement une fois au vestiaire que j’ai commencé à avoir mal au poignet. J’avais eu une fracture il y a deux ans et c’était la même douleur. Donc, je pensais que j’en avais pour six à huit semaines. »

Des examens approfondis n’ont finalement révélé aucune fracture, mais l’équipe a opté pour la prudence. Reinbacher patinait donc sans manier de rondelle lors de notre visite. Mais le coup de patin était fluide. Le « bas du corps » semblait bel et bien réparé.

On a beaucoup parlé des absences de Kirby Dach et de Kaiden Guhle en cette jeune saison. L’espoir no 1 de l’organisation n’a pas échappé à la poisse, mais il a finalement été chanceux dans sa malchance.

Montréal en mars ?

Reinbacher peut donc amorcer ce qu’il espère être le parcours qui le ramènera à Montréal.

D’ailleurs, le directeur général du club, Larry Mitchell, est très réaliste : il estime à « 99 % » les chances que ce soit la dernière saison de Reinbacher en Suisse.

« La porte est toujours ouverte. Si Montréal juge que c’est préférable qu’il revienne, on ne dira assurément pas non ! nous explique Mitchell, dans un corridor de l’aréna. Mais ma compréhension, c’était que s’il ne gagnait pas un poste avec le Canadien au camp, on le reprenait pour la saison, mais il ne reviendra pas l’an prochain. »

C’est sans oublier qu’avec Kloten qui traîne déjà la patte au classement, sa saison en Suisse pourrait prendre fin tôt. Le calendrier de Kloten se conclura le 4 mars si l’équipe rate les séries ; il restera alors 21 matchs à celui du CH, qui se conclura le 16 avril. La saison du Rocket de Laval se termine le 20.

Je ne sais pas encore ce qui arrivera. J’imagine que Larry [Mitchell] connaît le plan, mais ils veulent que je me concentre sur mon jeu. Mais j’imagine que je vais y retourner.

David Reinbacher

D’ici là, l’Autrichien de 19 ans devra composer avec un calendrier morcelé, typique de l’Europe en raison des pauses pour tournois internationaux. Il y aura une première pause de deux semaines après le match du 4 novembre au soir, puis une autre en décembre pour le Championnat du monde junior.

Reinbacher est en âge d’y participer, mais ça s’annonce compliqué. L’Autriche fait partie du groupe 1A, soit l’équivalent de la deuxième division. La France et le Kazakhstan font notamment partie des rivaux de l’Autriche dans ce tournoi à six équipes.

À Montréal de décider

Les clubs européens ne peuvent pas empêcher un joueur de participer aux tournois internationaux si son équipe nationale le convoque. Reinbacher est cependant prêté à Kloten par le Canadien ; c’est donc à Montréal de décider. Mais Larry Mitchell a déjà son idée : il serait étrange que Reinbacher affronte des juniors de pays marginaux.

Il dispute sa deuxième saison dans une des meilleures ligues au monde. Je ne vois pas de valeur pour lui. Mais il y en a une pour l’Autriche, car il peut l’aider à remonter dans le premier groupe.

Larry Mitchell, directeur général de l’EHC Kloten

« Mais ça s’ajouterait à tout ce qu’il a vécu dans la dernière année : le voyagement, le camp d’évaluation, le repêchage, le camp des recrues, son retour ici et sa blessure. On profite d’une pause pendant le tournoi, et une période d’entraînement pourrait lui être plus bénéfique pour son objectif final, qui est de devenir joueur de la LNH. »

Reinbacher reste évasif, bien qu’il dise aimer « jouer pour nos couleurs ». Il s’emporte un peu plus en évoquant ceux qui y seront, notamment un autre espoir autrichien du Canadien, l’attaquant Vinzenz Rohrer. C’est sans oublier Lenz Moosbrugger, son vieux pote qu’il connaît depuis l’âge de 4 ans. « S’il y va, c’est sûr que j’aimerais y être ! Ça serait la première fois depuis longtemps qu’on jouerait ensemble. »

Au moins, ce n’est pas une blessure qui l’empêchera d’y aller, à moins qu’il soit profondément malchanceux d’ici un mois.

Sa blessure l’a toutefois empêché de jouer lors de notre passage, ce qui est bien malheureux, il va sans dire. Mais Reinbacher fait partie de ces types optimistes, qui voient une occasion dans chaque malheur.

« Oui, je suis blessé en ce moment, mais je peux me botter le derrière et revenir plus fort », balance-t-il.

C’est également vrai pour La Presse. L’entrevue du jeudi allait bon train, mais Reinbacher devait filer pour dîner avec un ancien coéquipier nouvellement retraité. On lui propose donc de poursuivre la discussion samedi, jour de match à domicile de l’EHC Kloten. Il acquiesce immédiatement. « Je dois m’entraîner le matin et comme je ne jouerai pas, j’aurai du temps. On ira prendre un café après », propose-t-il.

Compte-rendu de nos rencontres en Suisse, et de notre visite dans son village natal de Lustenau, en Autriche, dans nos prochaines éditions.