Il n’existe pas vraiment de traduction satisfaisante à l’expression anglaise « shit show ».

On parlera d’une catastrophe, d’un gâchis… Mais lorsque Hilary Knight affirme que les Jeux olympiques de Pékin ont été un « shit show » pour son équipe, aussi bien la citer au mot.

Le hasard fait en sorte que l’équipe nationale américaine se trouve ces jours-ci au Québec, un an jour pour jour après sa défaite en finale olympique aux mains du Canada par la marque de 3-2. Cette rencontre au sommet a certes été le théâtre d’un autre but gagnant de Marie-Philip Poulin. Mais dans le camp américain, on a tout fait, sauf gagner.

La gardienne canadienne Ann-Renée Desbiens a affronté un barrage de 40 tirs. Des joueuses vedettes – Knight et Amanda Kessel – ont sonné la charge dans une tentative de combler un déficit de 3-0. Mais en vain.

Ce revers, Knight ne l’a toujours pas digéré. Le jugement qu’elle pose est sévère, probablement exagéré, et il résonne encore davantage du fait qu’il vient de l’une des plus grandes athlètes à avoir porté le maillot étoilé.

Mais il ne sort pas de nulle part. « Avec tout le talent qu’il y avait dans ce vestiaire, on a complètement gaspillé notre chance, a nuancé Knight, vendredi dernier, en entrevue avec La Presse. C’est dur à accepter après un cycle complet de quatre ans, après avoir survécu à la COVID-19, après avoir réussi à amener tout le groupe là-bas sans test positif… C’est vraiment malheureux de voir comment le tournoi s’est déroulé pour nous. »

Le hockey féminin, à plus forte raison, a été particulièrement touché par la pandémie. Un championnat du monde a été annulé, un autre est passé tout près de l’être. Le ralentissement économique a nui au développement de la ligue professionnelle dont rêvent les meilleures joueuses de la planète.

Les Jeux olympiques représentaient donc une chance inégalée de rédemption après deux années misérables. Les Canadiennes y ont goûté. Pas les Américaines.

« Les gens ne voient pas tous les sacrifices qu’on fait, ajoute Knight. Évidemment qu’on doit contrôler seulement ce qu’on peut contrôler. Mais profiter de nos chances est une chose sur laquelle on doit reprendre le contrôle. Après les Jeux, il fallait mentalement appuyer sur le bouton reset [réinitialisation] et placer l’équipe dans une meilleure position pour gagner. »

Rivalité

Si l’équipe nationale américaine patine présentement dans la province, c’est parce qu’elle affrontera la sélection canadienne deux fois au cours des prochains jours dans le cadre de la Série de la rivalité, enfilade de sept rencontres entre les deux clubs qui a lieu depuis quelques années.

Même si l’évènement est moins prestigieux que les Jeux olympiques ou le Championnat du monde, chaque duel entre ces deux adversaires est susceptible d’être épique. À Trois-Rivières, ce lundi soir, les Américaines tenteront de s’assurer du titre de 2022-2023 en remportant une quatrième victoire. Les Canadiennes, en contrepartie, voudront égaler la série à 3-3. L’ultime rencontre, disputée peu importe le résultat de lundi, aura lieu mercredi soir à la Place Bell de Laval.

En discutant avec les joueuses, on saisit que l’enjeu du quatre-de-sept n’est pas une obsession. Les matchs, toutefois, valent leur pesant d’or.

On pourrait jouer contre cette équipe-là tous les jours de l’année et on voudrait chaque fois gagner. Il y a tellement de fierté en jeu. Les joueuses changent, mais l’objectif reste toujours le même.

Hilary Knight

Au-delà de la rivalité elle-même, il y a un bénéfice évident de visibilité. « Les gens, surtout aux États-Unis, n’ont généralement l’occasion de nous voir que tous les quatre ans », dit-elle.

Surtout, Knight reconnaît les « répétitions de grande qualité » qui sont offertes aux joueuses, surtout les plus jeunes. La formation américaine, par exemple, est dans une évidente phase de rajeunissement. Dans la mouture qu’elle présente pour cette série, 10 joueuses sur 26 sont nées en 1999 ou après.

« Je ne le dirai jamais assez : il n’y a pas assez de matchs à ce niveau, ajoute-t-elle. Ces sept rencontres-là sont déterminantes pour le développement des joueuses. »

Elle se dit d’ailleurs impressionnée par la qualité de ses nouvelles coéquipières, qui débarquent « avec une aisance qu’on n’a jamais vue avant ». Comme les garçons, les jeunes hockeyeuses suivent désormais à la trace leurs idoles sur les réseaux sociaux et reproduisent leurs exploits à l’entraînement. Conséquemment, lorsqu’elles se retrouvent dans un groupe plus âgé, « elles infusent leur dynamisme, leur créativité ».

« Ça nous tire toutes vers le haut », s’emballe l’attaquante de 33 ans qui, au demeurant, ne s’émeut que très peu de son statut de doyenne de l’équipe.

« Je pratique un sport que j’adore, dit-elle encore. En définitive, ce qu’on attend de tout le monde, c’est d’être compétitives. Je dois être jeune de cœur, j’imagine ! »

Le sixième match de la Série de la rivalité aura lieu ce lundi soir à 19 h au Colisée Vidéotron de Trois-Rivières.