Le cancer a touché ses deux parents, et pourtant, l’ailier de l’Océanic a su maintenir ses performances sportives

Se concentrer sur le positif. Toujours. C’était le mot d’ordre de Julien Béland et de sa famille, ces dernières années, quand la vie leur envoyait des épreuves.

Julien Béland venait enfin d’atteindre son objectif de percer la formation d’une équipe de la LHJMQ, celle de l’Océanic de Rimouski, en septembre 2021. Un exploit on ne peut plus satisfaisant, un an après avoir été retranché du camp des Olympiques de Gatineau, l’équipe qui l’a repêché en 2019.

Pour la première fois de sa vie, le jeune homme a quitté la demeure familiale de Québec pour déménager dans le Bas-Saint-Laurent. Mais son bonheur a rapidement été assombri par une mauvaise nouvelle. Lors d’une visite à Rimouski, en octobre, ses parents lui ont appris que sa mère était atteinte d’un cancer du sein.

« J’avais su pendant l’été que ma mère avait une masse sur un sein et qu’elle allait se faire ausculter par les médecins, mais on ne savait pas encore ce que c’était. On n’en avait pas reparlé », raconte le jeune homme à La Presse après un entraînement au Centre d’excellence Sports Rousseau, à Boisbriand. La LHJMQ a publié l’histoire de Julien sur son site internet, en novembre, dans le cadre de son initiative « Le hockey pour vaincre le cancer ».

Un scénario connu

La nouvelle a été douloureuse. D’autant plus que ce scénario, Julien l’avait déjà vécu. Quatre ans plus tôt, c’est son père qui avait reçu un diagnostic de cancer. Du côlon, cette fois.

À l’époque, Julien évoluait dans le bantam AAA. Du haut de ses 14 ans, il comprenait la situation, sans vraiment réaliser à quel point « c’est gros et dangereux », se souvient-il. « Quand il a commencé ses traitements de chimiothérapie, c’est là que j’ai compris. »

Il a vu son père fatigué, affaibli. Mais ses parents ont « toujours gardé le cap », lance-t-il, fier. « Ils étaient toujours positifs. C’est ça qui m’a permis de rester positif. »

Quand la foudre s’est de nouveau abattue sur sa famille, l’année dernière, Julien avait 18 ans. Il comprenait encore plus « l’ampleur » de la chose. Et cette fois, il était loin. Loin des siens. De son frère Tristan. De sa sœur Emma. De la maison.

Plutôt que de s’apitoyer, de se demander pourquoi c’était encore sa famille qui était affectée, il a choisi de se concentrer sur le positif. Comme ses parents l’ont toujours fait. Après tout, la pomme ne tombe jamais bien loin de l’arbre…

« Le plus important, c’était qu’elle se fasse opérer rapidement. »

Le hockey comme échappatoire

C’est ce qui est arrivé. « [Les médecins] ont enlevé la masse rapidement, donc il n’y avait pas de danger de… mourir », hésite Julien.

Sa mère a ensuite suivi des traitements de chimiothérapie « pour s’assurer qu’il n’y ait pas de masse cancéreuse qui revienne », explique-t-il. Pendant ce temps, le jeune homme maintenait sa routine à Rimouski. « J’essayais de rester le plus fort possible. »

Son échappatoire ? Le hockey.

J’aime tellement le hockey. Pouvoir m’échapper là-dedans, j’aimais ça. Mais je m’assurais aussi de toujours être présent pour mes parents, de les appeler le plus souvent possible pour m’assurer que tout était sous contrôle.

Julien Béland

Son entraîneur, Serge Beausoleil, a néanmoins vite remarqué que quelque chose clochait. « Je trouvais qu’il allait moins bien, qu’il y avait moins d’acuité dans son jeu », explique-t-il.

« C’est un gars extraordinaire à diriger, une bonne personne, continue l’entraîneur. Il est rempli de bonnes intentions. Sur la glace, c’est incroyable, combien il est passionné. Je trouvais qu’il y avait un ralentissement, qu’il était moins focus. »

Beausoleil a donc rencontré son attaquant, qui s’est ouvert à lui et lui a avoué ce qu’il traversait.

« Ce ne sont pas tous les jeunes qui le font. Nous, on essaie de bâtir une relation de partnership avec les jeunes, où on leur dit qu’on les apprécie, qu’on les aime. […] Ce sont des données que j’ai besoin de savoir. Je n’irai pas hard sur un gars qui ne feel pas bien. On va l’aider autrement. »

L’entraîneur ne tarit pas d’éloges à l’endroit de Julien. « C’est un être exceptionnel. Il a la cote R la plus élevée qu’on ait jamais vue. C’est indécent d’en parler ! », lance-t-il d’ailleurs à la blague, impressionné.

« On lui a donné du temps. Il est allé appuyer ses parents, sa mère, et il est revenu. Il se sentait tellement mieux. […] De diriger des gars comme ça, ça nous reconnecte avec le sport. »

Quand l’Océanic jouait à Québec, à Victoriaville ou encore à Drummondville, Beausoleil permettait à son attaquant d’aller passer du temps avec ses parents. « C’était le fun d’avoir l’appui de mon entraîneur là-dedans », laisse entendre Julien dans un sourire, encore reconnaissant un an plus tard.

Des performances inspirantes

Malgré les obstacles, Julien Béland a amassé 29 points en 56 rencontres à sa toute première saison dans la LHJMQ. Et ça lui a valu une invitation dans un camp de la LNH, celui des Ducks d’Anaheim, à la fin de l’année. Après la pluie, le beau temps.

« J’étais tellement content. Si tu m’avais dit ça un an avant, je ne t’aurais pas cru. J’ai vraiment eu un apport important de mes coéquipiers. Ils ont toujours été là pour moi. Et l’Océanic m’a donné une vraie chance de me faire valoir », soutient celui dont le plan B est d’être médecin.

En 38 matchs jusqu’ici cette saison, le jeune homme a déjà 14 buts, dépassant ainsi son total de buts de l’an dernier (10).

Au moment de rencontrer La Presse, il était l’un des « meilleurs joueurs » de l’Océanic, dixit Serge Beausoleil.

À la fin de notre entretien, Julien nous raconte à quel point ce que sa famille a traversé lui a « ouvert les yeux » sur les ravages du cancer. « Dès qu’on a une petite inquiétude, il faut en parler à un médecin pour s’assurer qu’ils le découvrent rapidement. C’est ça qui peut nous sauver », insiste-t-il.

Par-dessus tout, il a réalisé à quel point le temps est précieux.

« On ne sait jamais ce qui peut arriver le lendemain », laisse-t-il tomber.