(Laval) Il y a un peu moins de deux ans, Cédric Paquette soulevait la Coupe Stanley avec le Lightning de Tampa Bay. Il y a un an, il signait un contrat avec le Canadien de Montréal, l’équipe de son enfance. Jeudi soir, il portait l’uniforme du Rocket de Laval, dans la Ligue américaine.

La dernière portion de cette énumération ne figurait évidemment pas dans le plan de carrière du Gaspésien. Du moins pas à ce stade-ci. Les choses sont toutefois ce qu’elles sont.

C’est néanmoins ce même Paquette qui, devant les journalistes, a déclaré en fin de soirée avoir « du fun à jouer au hockey présentement ». Il venait, peu de temps avant, de marquer le but gagnant des Lavallois, dans une victoire de 4-1 qui a donné l’avance 2-1 au Rocket dans cette série trois-de-cinq. Le club-école du CH pourrait éliminer le Crunch de Syracuse dès samedi, à domicile.

Un peu avant le milieu de la troisième période, et alors que le Rocket évoluait en avantage numérique pour la septième fois de la soirée, Paquette a fait dévier un tir de Jean-Sébastien Dea derrière le gardien Maxime Lagacé. La célébration a été celle qu’a décrite avec exactitude l’auteur du but : celle d’un gars qui a du fun.

Paquette, depuis que le Tricolore l’a rétrogradé à la mi-mars, a été beau joueur. Il a accepté son sort, malgré la déception évidente, à 28 ans, de prendre ce pas de recul. Incapable de produire offensivement dans la LNH, il s’est ressaisi et a répondu avec 9 buts en 14 matchs en fin de saison à Laval.

Blanchi lors des deux premiers duels de la série, il a inscrit deux points jeudi.

L’équipe est soudée, je m’amuse, c’est tout ce dont j’avais besoin, a-t-il encore expliqué. Ça fait du bien au moral, et j’espère que ça continue comme ça.

Cédric Paquette

Paquette n’est pas devenu un joueur parfait. C’est un tir raté de sa part qui a mené à la contre-attaque du Crunch qui a permis aux visiteurs de marquer leur unique but. Il n’est toujours pas un virtuose au cercle de mises en jeu.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

L’entraîneur-chef du Rocket, Jean-François Houle

Mais il a assurément retrouvé l’essence de son jeu. Tout au long de la soirée, il a été visible. Quelques minutes avant le but gagnant, le Rocket croyait avoir pris les devants, mais l’arbitre a jugé que Paquette avait dérangé le gardien dans son geste – les officiels n’ont pas révisé la séquence, qui aurait certainement reçu pas mal plus d’attention dans la LNH. Sur la même séquence, qui venait de compléter une mise en échec dans le coin de la patinoire ? Le même Paquette. C’est aussi lui qui, peu après, a bousculé Gabriel Dumont, qui se chamaillait avec des joueurs assis au banc du Rocket.

L’entraîneur-chef Jean-François Houle a volontiers témoigné du rôle important que le vétéran joue dans son vestiaire. Il souligne évidemment les qualités du joueur « physique, fatigant à affronter » qu’il connaît très bien pour l’avoir dirigé il y a 10 ans chez l’Armada de Blainville-Boisbriand, dans la LHJMQ.

Mais il apprécie tout autant le « gars d’équipe », « aimé » de ses pairs. Celui qui a « gagné une coupe », qui « a de l’expérience, et ça paraît ».

« C’est le fun de le voir avoir du plaisir », a conclu l’entraîneur. Et il a bien raison.

Effort collectif

C’est bien beau parler de Paquette, mais il y avait tout de même toute une équipe en uniforme autour de lui, jeudi. C’est justement un effort collectif qui a contribué à cette victoire.

En matinée, les joueurs avaient mis l’accent sur l’importance de resserrer le jeu défensif global, après avoir accordé 70 tirs lors des deux premiers matchs. Le Crunch a cette fois été limité à 23 lancers cadrés, et Cayden Primeau, en pleine possession de ses moyens, a fait du bon boulot pour garder les tireurs adverses au silence.

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Cedric Paquette (13) met en échec Darren Raddysh

« On a disputé un match solide, tout le monde sur la glace a bien joué », a résumé Xavier Ouellet.

« De la manière que notre équipe est construite, si on donne 25 lancers ou moins, on va toujours se donner une bonne chance de gagner. C’est une priorité pour nous », a ajouté Jean-François Houle.

L’effort défensif est même venu de ceux qu’on n’attendait pas – ou plus. Devante Smith-Pelly était, par une marge appréciable, le joueur le plus lent sur la glace de la Place Bell. En toute fin de deuxième période, alors qu’il était épuisé par une longue présence, l’ancien du Canadien a toutefois bloqué deux tirs coup sur coup, inspirant des « DSP ! DSP ! » dans la foule satisfaite.

Dans un autre match disputé à haute intensité et sous le signe de la robustesse, Smith-Pelly a trouvé le moyen de se démarquer, en allant notamment à la défense de ses coéquipiers.

Lui aussi, au fait, a une bague de la Coupe Stanley, gagnée en 2018 alors qu’il portait l’uniforme des Capitals de Washington. Comme Paquette, sa présence dans un groupe de joueurs qui ont étonnamment peu joué de matchs éliminatoires dans leur carrière apporte une touche qui ne s’apprend pas.

Ce que le Rocket apprend, toutefois, c’est à gagner. Et s’il devait l’emporter encore samedi, qui sait jusqu’où cette équipe pourra aller ?

En bref

  • On a largement parlé du fait que ce match était le premier de l’histoire du Rocket en séries, et le premier d’un club-école du Canadien depuis des temps immémoriaux. L’organisation du Rocket et ses partisans ont donc pris les choses au sérieux. Dès l’avant-match, et tout au long de la rencontre, la Place Bell a vibré dans une atmosphère typique du hockey printanier. « La foule a été extraordinaire, a dit Jean-Sébastien Dea. C’était vraiment impressionnant. Ça fait longtemps que je suis dans la ligue, mais je n’avais jamais vu ça avant. »
  • Le même Dea a eu des mots moins tendres à l’endroit de son unité d’avantage numérique, composée de Rafaël Harvey-Pinard, Cédric Paquette, Xavier Ouellet et Jesse Ylönen et lui-même. C’est ce quintette qui a produit le but gagnant, mais il avait fallu se ressaisir, alors que malgré les nombreuses punitions au Crunch, ça ne fonctionnait pas trop pour eux à cinq contre quatre. « On ne se le cachera pas, c’était une catastrophe pour notre unité, a lancé Dea. On n’était pas capables de rentrer dans la zone. On est revenus à la base, on s’est ajustés. On a montré de la force de caractère et on a été récompensés. »
  • La force de caractère, c’est aussi ce qui a retenu l’attention du capitaine Xavier Ouellet. Dans un match serré, avec un haut niveau d’émotion, les joueurs du Rocket sont demeurés concentrés, loin du banc des punitions, en plus de rebondir rapidement après le but refusé. « On a bien réagi, a-t-il estimé. Les gars ont gardé le focus et sont restés motivés. On a capitalisé en avantage numérique et on a trouvé une manière d’aller chercher la victoire. »