C’est l’histoire d’un passionné qui n’abandonne jamais pour atteindre ses objectifs.

Les Lions de Trois-Rivières ont annoncé la nomination d’Éric Bélanger comme premier entraîneur-chef de leur histoire, mardi midi. Le principal intéressé a accepté de raconter son parcours à La Presse.

Natif de Sherbrooke, Éric Bélanger est issu d’une vraie famille d’athlètes. Deuxième d’une fratrie de trois enfants, tous hockeyeurs, il a enfilé ses premiers patins à l’âge de 4 ans, en route vers une grande carrière.

« Chez nous, c’était hockey, baseball, soccer, football, basketball… On faisait tout ensemble. Ça a viré en bagarre assez souvent, lance à la blague l’homme de 43 ans. Mes parents ont beaucoup sacrifié pour nous. Je leur dois pas mal mon succès. »

Dès l’enfance, son talent sur la patinoire était indéniable. Sa persévérance et sa volonté l’étaient aussi.

« Quand tu commences à graduer, tu deviens bon et tu sens que tu es bon. Les professeurs te demandent ce que tu veux faire dans la vie, tu réponds “joueur de hockey” et ils roulent les yeux en voulant dire “tu sais bien que tu ne joueras pas dans la Ligue nationale”. Moi, ça m’a servi de motivation. »

Éric Bélanger a traversé de nombreuses embûches pour atteindre la grande ligue. Au fil des années, il a vécu les déceptions d’être retranché du midget AAA à sa première année d’admissibilité, puis d’Équipe Canada junior à 18 ans, et de voir son nom glisser au quatrième tour au repêchage de 1996.

Au moment de faire sa place dans la Ligue nationale de hockey (LNH), à son deuxième camp d’entraînement avec les Kings de Los Angeles, il s’est cassé une main et a dû retourner dans la Ligue américaine. Affligé par plusieurs blessures cette année-là, le joueur de centre n’a pas été rappelé. L’année suivante, il a été victime d’une thrombophlébite au bras droit et a dû se faire opérer d’urgence une semaine avant son troisième camp avec les Kings.

À son quatrième camp d’entraînement, en 2000, il a finalement obtenu sa place dans l’alignement, avant de retourner dans la Ligue américaine pour 13 matchs.

J’aurais pu abandonner souvent en s’il vous plaît, mais j’ai toujours cru en moi et en mon rêve. Des fois, il faut que tu sois persévérant, et c’est le message que je dis à mes joueurs. Des déceptions, j’en ai vécu en câline.

Éric Bélanger, entraîneur-chef des Lions de Trois-Rivières

Mais chaque fois, il s’est relevé. Acharné et tenace, il aura eu une carrière de 13 ans, 820 matchs – dans 7 équipes différentes – et 358 points dans la LNH.

La piqûre du coaching

Tout au long de sa carrière de joueur, Éric Bélanger avait en lui la fibre du coaching.

« J’aimais étudier la game, comprendre certaines décisions des coachs. J’étais joueur de centre : je pouvais analyser des bandes vidéo pendant très longtemps pour voir l’avantage que je pouvais avoir sur les autres centres. »

Sa carrière d’entraîneur s’est amorcée en 2016 avec le Typhon, au niveau bantam AAA, au sein de la structure du Séminaire Saint-François.

PHOTO PATRICE LAROCHE, ARCHIVES LE SOLEIL

Éric Bélanger était l’entraîneur-chef des Chevaliers de Lévis depuis deux ans.

J’étais prêt à faire les sacrifices, à commencer en bas de l’échelle.

Éric Bélanger

Il a ensuite été entraîneur-chef dans le Midget Espoir, atteignant la finale de la Coupe Dodge en 2018 et la remportant en 2019. Il s’est joint aux Chevaliers de Lévis, dans la Ligue de hockey midget AAA du Québec, l’année suivante. Quand la pandémie a éclaté, son équipe se trouvait au deuxième rang du classement général.

Ce qui nous amène à aujourd’hui. Le voilà dans l’ECHL, à la tête des Lions. C’est le moment idéal pour lui, alors que ses filles ont maintenant 15 et 18 ans et que son nouveau poste l’amènera souvent sur la route.

« Je me suis rapproché beaucoup de mes enfants depuis ma retraite et mon divorce. J’ai mis mon rôle de père à l’avant-plan. Mais j’ai des rêves aussi », dit-il.

À Trois-Rivières, il travaillera au quotidien avec son ancien coéquipier et ami Marc-André Bergeron, le directeur général de l’équipe.

« Je sais que je vais pouvoir avoir confiance en Marc-André et que lui va avoir confiance, qu’on va se challenger », soutient-il.

« Je ne me suis pas mis le doigt au vent pour décider, lance pour sa part Bergeron. Il a quand même été approuvé par beaucoup de personnes autour de moi, mais il y a une partie de feeling là-dedans. C’est un gars qui dégage, qui a du leadership, qui fait sentir sa présence et je pense que ce sont tous des éléments importants pour un entraîneur-chef. »

Ensemble, ils misent sur la fibre québécoise, comme l’a répété Bergeron à plusieurs reprises au cours des derniers mois. Bélanger est en processus pour trouver son premier entraîneur adjoint, « quelqu’un d’expérience » qui pourra venir « combler certaines facettes », dit-il.

Honnête, juste et passionné

Joints par La Presse, plusieurs anciens collègues et actuels amis d’Éric Bélanger ont été élogieux à son endroit. Du lot, son ancien coéquipier avec le Wild du Minnesota et bon ami Guillaume Latendresse.

« Quand j’ai été échangé au Wild, Éric m’a appelé une demi-heure après l’annonce de la transaction pour m’inviter à habiter chez lui dans son sous-sol, relate-t-il. Je ne l’avais jamais rencontré, jamais salué ou autre. On ne se connaissait pas du tout, à vrai dire. Il m’a appelé et m’a dit : “Entre Québécois, il faut prendre soin les uns des autres.” Ça démontre le type de personne. »

Les anciens collègues de Bélanger le décrivent presque tous comme un entraîneur honnête, juste et passionné.

« Il est exigeant, mais très honnête et équitable avec tout le monde, affirme le président des Chevaliers, Martial Robert. Chaque joueur sait à quoi s’attendre avec Éric, tout le temps. Pour lui, tous les joueurs sont égaux et ont besoin de respect. »

« Je suis content parce que ça valide la culture que je veux avoir comme coach envers mes joueurs, réagit le principal intéressé. Ça me rend fier. »

Je suis quelqu’un de très intense. Je vais aller à la guerre pour mes joueurs. À date, le succès que j’ai eu, c’est que mes joueurs aiment ça jouer pour moi et c’est ce que je veux continuer d’amener.

Éric Bélanger

« De nos jours, les jeunes ont besoin de se faire dire ce qu’il en est, soutient pour sa part Marc-André Bergeron. Être un gars honnête, direct, qui communique bien, je pense que c’est une bonne combinaison pour essayer de garder le monde dans le bateau. »

Mine de rien, le Sherbrookois fait un autre pas vers son objectif ultime : être entraîneur dans la LNH.

« Est-ce que je vais me rendre ? Je crois en moi, je l’espère. »

Et il vaut mieux ne pas parier contre lui.

Ils ont dit

Au-delà d’avoir un bon alignement, il faut que tu sois capable de gérer le vestiaire et de l’amener à l’autre niveau, de faire progresser ton système de jeu. Je l’ai toujours dit, mais pour moi, dans la Ligue midget AAA, il y avait Félix [Potvin] et Éric [Bélanger] qui étaient à part dans leur façon de faire. Je pense qu’Éric était rendu là.

Guillaume Latendresse, ancien coéquipier et bon ami d’Éric Bélanger

Quand on l’a rencontré en entrevue, il disait : « Moi, j’ai un but. Je veux être entraîneur dans la LNH. Je veux être un bon entraîneur, faire mes leçons et apprendre. »

Martial Robert, président des Chevaliers de Lévis

Sa porte est toujours ouverte. S’il y a une problématique ou quoi que ce soit, il est ouvert à discuter avec les joueurs. L’approche était excellente.

Ugo Bélanger, entraîneur des gardiens chez les Chevaliers de Lévis

Il était vraiment apprécié des joueurs. Il disait la vérité, qu’elle soit bonne ou mauvaise. Il était tout le temps capable de se remettre en perspective selon ce qu’il aimait ou pas quand lui était joueur. Il était capable de dire : je sais qu’on vous demande ça comme coach en ce moment et que vous n’aimez pas ça comme joueur, mais voici pourquoi on le fait.

Jonathan Deschênes, entraîneur adjoint des Chevaliers de Lévis