(Tampa) On entend souvent dire que la Coupe Stanley est le trophée le plus difficile à gagner dans le sport. On peut certainement argumenter que remporter la Ligue des champions, en Europe, est un brin plus difficile, avec le nombre d’équipes et de pays impliqués.

(Re)lisez note couverture en direct du match Consultez le sommaire du match

Mais bon, là n’est pas le point. Et les joueurs du Canadien, après avoir fait connaissance avec la version 2021 du Lightning, ont une meilleure idée de la difficulté de remporter le gros trophée. Les quatre victoires qui les en séparent ne viendront visiblement pas facilement.

Le Lightning a en effet amorcé la finale avec une victoire sans appel de 5-1 sur le Tricolore, lundi, dans un Amalie Arena assourdissant.

PHOTO DOUGLAS DEFELICE, USA TODAY SPORTS

Les gradins étaient remplis à l’Amalie Arena pour le premier match de la finale de la Coupe Stanley, à Tampa.

La force de frappe offensive du Lightning était bien connue, et est venue des sources habituelles. Brayden Point et Nikita Kucherov, intouchables au cours des présentes séries, ont amassé trois points chacun.

Mais c’est un peu tout ce qui vient autour qui fait du Lightning une redoutable machine de guerre. Offensivement, par exemple, le Canadien n’a généré que 19 petits tirs, son plus petit total en un match depuis le début des séries.

« Ils gardaient de bons écarts avec le porteur de la rondelle et faisaient de bons replis défensifs, a résumé Luke Richardson. On parle toujours d’eux comme d’une équipe offensive. Mais ils créent cette attaque en se repliant avec énergie, en provoquant des revirements dans des zones dangereuses comme ils l’ont fait sur leurs trois premiers buts. Leur défense transforme cela en attaque. »

Les trois premiers buts étaient effectivement le résultat de relances rapides après des attaques interceptées, des interventions réussies dans l’ordre par Point, Jan Rutta et Mikhail Sergachev. Des jeux sur lesquels le Canadien était « statique », a analysé Richardson, qui a insisté sur l’importance d’une meilleure « gestion de la rondelle. ».

PHOTO KIM KLEMENT, USA TODAY SPORTS

Yanni Gourde (37) célèbre après avoir marqué un but en deuxième période.

Robustes à souhait

L’autre aspect moins attendu d’une équipe qui compte sur un tel noyau, c’est la robustesse. Particulièrement du trio du Québécois Yanni Gourde, une unité que Josh Anderson a identifiée comme le « trio d’identité » du Lightning. La formulation n’était pas anodine, c’est aussi le surnom prêté au fameux trio de Matt Martin, Casey Cizikas et Cal Clutterbuck chez les Islanders.

« On ne joue pas toujours le plus beau hockey », avait admis Blake Coleman, l’ailier droit de Gourde, lundi matin.

Le Canadien en a eu plein les bras avec les ailiers de Gourde, qui ont totalisé 18 mises en échec ! Coleman en a donné 11 (!), Barclay Goodrow, 7.

En fin de match, c’est justement Coleman qui est venu bousculer Brendan Gallagher et lui a fait perdre son casque, avant que Mikhail Sergachev ne le renverse, provoquant une coupure à la tête du petit ailier droit du Canadien.

PHOTO GERRY BROOME, AP

Brendan Gallagher (11)

Ce Sergachev, qui ne génère pas autant d’attaque qu’en saison, a montré qu’il n’avait aucun problème avec le hockey robuste. L’ancien espoir du Canadien s’est bien servi de sa charpente de 6 pi 3 et 216 lb pour tenir tête notamment à Josh Anderson, qui a trouvé chaussure à son pied. Les duels entre ces deux-là s’annoncent passionnants.

Au bout du compte, le Lightning a distribué 57 mises en échec, contre 58 pour le Tricolore. Les Montréalais s’imposent physiquement depuis le début des séries, mais jamais n’avaient-ils encore rencontré une telle résistance.

« Ça ne nous a pas surpris, a toutefois assuré Jeff Petry. On savait qu’ils étaient rapides et qu’ils allaient fermer rapidement les ouvertures. Mais notre gestion de la rondelle doit être meilleure, car ils carburent au jeu de transition. »

Comme au dernier tour

Le CH n’en est pas à sa première forme d’adversité en séries. C’est cette même équipe qui s’était retrouvée en retard 1-3 au premier tour contre Toronto, et qui avait aussi perdu le premier match contre les Golden Knights à Vegas. Cette équipe a prouvé par le passé qu’elle peut rebondir.

« C’est le premier match d’une série de sept, a rappelé Petry. On doit se servir de l’expérience à Vegas et retrouver cet état d’esprit pour rebondir. On va regarder de la vidéo de ce qu’on peut faire mieux. Notre effort est là, mais on peut en faire un peu plus. »

PHOTO DOUGLAS DEFELICE, USA TODAY SPORTS

Ben Chiarot (8) a marqué le seul but du Canadien.

Luke Richardson, éternel optimiste : « Le point positif à retenir, c’est qu’on n’a pas joué notre meilleur match. On peut s’améliorer », a dit l’homme qui remplace Dominique Ducharme.

Richardson a en outre reconnu que ses plus jeunes éléments ont pu ressentir une certaine nervosité. « L’aréna vibrait. On va s’y habituer. En frappant tôt, on pourra calmer la tempête. »

C’est effectivement loin d’être terminé. Mais le message du Lightning en ce premier match était clair : les victoires seront dures à aller chercher et elles pourraient faire mal. Et il y en a quatre comme ça à aller chercher.

Ils ont dit

Je ne veux pas parler du coup de Mark Scheifele, mais je veux remercier nos soigneurs. Je ne voulais pas précipiter mon retour, je souhaitais prendre mon temps, car c’était une blessure au cerveau. Et on m’a permis de prendre mon temps.

Jake Evans, à son premier match depuis sa commotion cérébrale

Joel était à la maison depuis quelques jours, sans patiner. Il avait sûrement vécu du stress avec le protocole et les tests. On se disait qu’après qu’il eut passé la journée dans l’avion, la meilleure chose à faire était de l’envoyer sur la patinoire pour l’échauffement, afin de réactiver ses jambes.

Luke Richardson, au sujet de sa décision de laisser de côté Joel Armia

On est en très bonne position. On est en finale. Il y a beaucoup de confiance dans notre vestiaire. On va prendre le positif de notre match, corriger les erreurs et traiter le prochain match comme un match qu’il faut gagner pour revenir à 1-1.

Josh Anderson

On a eu des chances quand le match était plus serré. Si on profite de ces chances, c’est un match différent. À 3-4 buts, on essayait de pousser, et c’est une équipe qui se nourrit à la transition. Ce n’était pas un massacre, mais on peut être meilleurs.

Jeff Petry

On a pleine confiance en nos centres. On ne serait pas ici si on n’avait pas confiance en eux. On ne contrôle pas les duels sur la route, mais on a confiance que ces gars-là peuvent faire le travail.

Ben Chiarot

Dans le détail

La drôle de journée d’Armia

Luke Richardson nous réservait une petite surprise à la suite de l’entraînement matinal : il nous annonçait en effet que Joel Armia était dans un avion nolisé en direction de Tampa. Il est demeuré évasif, mais toujours est-il que la présence du Finlandais dans le protocole de la COVID-19 de la LNH était une fausse alerte. Armia est donc arrivé à temps pour participer à l’échauffement, mais il était l’attaquant en trop et n’a pas joué. On devine que faire trois heures d’avion la journée d’un match n’est pas le scénario à privilégier pour une performance optimale. Son absence a permis à Jake Evans de réintégrer la formation, une première pour lui depuis le 2 juin à Winnipeg. Ça a été un retour au jeu discret pour Evans, qui prenait ses aises à la gauche de Phillip Danault au moment de sa blessure. Cette fois, il se retrouvait avec Eric Staal et Corey Perry. Mais ce trio n’a pas réussi à s’imposer en zone adverse comme il pouvait le faire quand Armia y est pour protéger la rondelle.

Séquence terminée

C’était à prévoir. La formidable séquence de succès du Canadien en désavantage numérique a pris fin de façon nette dans ce match. En toute fin de match, Steven Stamkos a marqué sur un tir sur réception, pour ainsi arrêter à 32 la séquence de pénalités que le CH a écoulées avec succès. C’était à prévoir parce que la circulation de rondelle du Lightning, à 5 contre 4, complique drôlement la tâche de l’adversaire. Lors de la première occasion, les passes transversales entre Stamkos et Nikita Kucherov, qui traversaient le carré défensif sans trop de problèmes, n’auguraient en effet rien de bon pour les visiteurs. C’est à se demander aussi si l’absence d’Armia, excellent à court d’un homme, n’a pas nui au Tricolore. Bref, ça reviendra à ce que les joueurs ont répété ces derniers jours : la meilleure stratégie demeurera la discipline, contre un club qui convertit près de 40 % de ses occasions.

Un repli crucial

Brayden Point s’est souvent retrouvé parmi les candidats au trophée Selke. Trois années de suite, en fait, il a terminé dans le top 10. Il ne joue cependant plus en désavantage numérique, ce qui a plombé sa candidature, si bien qu’il n’a pas reçu de vote cette année. Point a tout de même démontré son flair défensif en première période. Voyant que Jeff Petry appuyait l’attaque, le numéro 21 du Lightning s’est amené en repli et a intercepté la passe de Caufield à Petry. Point a aussitôt relancé l’attaque et quelques secondes plus tard, Erik Cernak redirigeait la passe d’Ondrej Palat pour donner une avance de 1-0 au Lightning. Point compte déjà 14 buts au cours des présentes séries, mais des jeux du genre rappellent qu’il sait se rendre utile même en ne marquant pas.

En hausse 

Shea Weber

Il n’a pas raté le premier match de sa carrière en finale, avec une passe, cinq tirs et même une échappée ! Jon Cooper lui a fait tout un compliment en lui opposant surtout ses deux derniers trios, afin d’éviter à ses meilleurs attaquants de l’affronter trop souvent.

En baisse 

Nick Suzuki

Rude soirée pour le numéro 14, qui se retrouve avec un - 3 à sa fiche. Pour une cinquième fois dans les sept derniers matchs, il a vu l’adversaire marquer après qu’il eut perdu une mise au jeu en zone défensive.

Le chiffre du match 

10

C’est le nombre de lettres qu’il y a dans Kotkaniemi. L’annonceur-maison du Lightning a maintenant 48 heures pour apprendre à prononcer convenablement le nom du jeune centre. C’était gênant.