Première joueuse autochtone dans l’équipe nationale de hockey et aux Jeux olympiques, Jocelyne Larocque dit travailler sans relâche afin d’être « un modèle » pour les jeunes des différentes communautés du pays. « Si tu ne vois pas quelque chose, c’est difficile de rêver et d’avoir l’aspiration de devenir ce que tu veux devenir », dit-elle.

La hockeyeuse de 33 ans, qui est de la Nation métisse, affirme avoir été, « comme tout le monde, bouleversée » par la nouvelle de la découverte des restes de 215 enfants sur le terrain d’un ancien pensionnat autochtone en Colombie-Britannique à la fin du mois de mai. Si elle affirme n’avoir jamais elle-même été victime de racisme, elle souligne que son père s’est toujours assuré que sa sœur et elle « connaissent [leur] culture et les injustices » qui touchent certaines communautés partout au pays.

Mais plutôt que de discourir longuement sur le sujet, Jocelyne Larocque préfère être dans l’action. En travaillant bénévolement dans des camps de hockey pour jeunes Métis au Manitoba. En allant donner des conférences dans des écoles.

En janvier, son travail a été souligné par le Conseil autochtone des sports et des loisirs du Manitoba qui l’a nommée « Athlète autochtone de la décennie ». En 2018, elle avait aussi remporté le prix Tom Longboat de l’Aboriginal Sports Circle canadien. Ce prix récompense un athlète autochtone s’étant illustré dans son sport au Canada.

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Jocelyne Larocque célèbre un but marqué par son équipe avec la gardienne Charline Labonté, lors d’un match contre les États-Unis que le Canada remportera 3-2, à Sotchi, en février 2014.

En 2014, Jocelyne Larocque a été la première joueuse autochtone de la compétition de hockey féminin aux Jeux olympiques à Sotchi. « Je n’avais jamais réalisé que j’étais la première. C’est un journaliste qui m’a posé la question et je n’en revenais pas… » Jocelyne Larocque dit s’être sentie « très fière, mais en même temps triste » que de nombreuses années se soient écoulées avant de voir cette barrière franchie. « Le hockey féminin est un sport relativement jeune, mais il existe quand même depuis quelques années… », note-t-elle.

Passionnée de hockey dès l’enfance

Née dans la municipalité de Sainte-Anne au Manitoba, à environ 40 minutes de Winnipeg, Jocelyne Larocque a commencé à jouer au hockey à l’âge de 5 ans. « J’ai suivi les traces de ma sœur qui a un an et demi de plus que moi », raconte l’athlète.

La passion pour le sport est immédiate.

Je suis une personne très compétitive. J’aime repousser mes limites. Dès que je suis sur la glace, j’oublie tout. Je suis dans le moment présent. Pour moi, c’est un endroit où je ne ressens que du bonheur et de la joie.

Jocelyne Larocque

Enfant, Jocelyne joue avec les garçons pendant quatre ans pour ensuite évoluer avec des équipes féminines. Elle fait son entrée à l’Université du Minnesota à Duluth en 2007-2008, où elle aide son équipe à remporter la médaille d’or du championnat universitaire du circuit de la NCAA.

En 2009-2010, elle met sa carrière universitaire sur pause et tente sa chance pour faire partie de l’équipe canadienne qui ira aux Jeux olympiques de Vancouver. « Mais vers le temps des Fêtes, j’ai malheureusement été retranchée », explique la défenseure. La déception est grande.

Rapidement, elle réalise que pour garder sa motivation, elle doit enfiler de nouveau ses patins. Elle décide donc de retourner en cours d’année à l’Université du Minnesota. « Je laissais tomber une année d’admissibilité. Je m’imposais de terminer mes études en trois ans et demi au lieu de quatre ans », explique-t-elle.

Jocelyne Larocque doit mettre les bouchées doubles pour obtenir son baccalauréat en comptabilité. « La dernière année d’études a été pas mal stressante », dit l’athlète qui ne regrettera pas son choix. Car dès son retour en 2009-2010, son équipe gagne de nouveau le championnat.

Chemin olympique

De retour au pays après ses études, Larocque joue au Manitoba dans la Ligue de hockey féminine de l’Ouest (WWHL) avant de migrer dans la Ligue canadienne de hockey féminin (LCHF), où elle joue pour Calgary, et ensuite pour Brampton. En 2014, elle parvient à être choisie dans l’équipe nationale et participe aux Jeux olympiques de Sotchi, où elle remporte une médaille d’or.

Elle participera aussi aux Jeux olympiques de PyeongChang en 2018. Après une défaite en finale, Larocque fait parler d’elle en retirant prestement sa médaille d’argent de son cou lors de la remise transmise en direct à la télévision.

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Jocelyne Larocque, aux Jeux de PyeongChang, en Corée du Sud, en février 2018

« J’avoue que je ne réalisais pas que la planète entière regardait à ce moment. J’étais juste tellement concentrée sur le fait qu’on avait perdu. On avait travaillé tellement fort pour obtenir l’or. J’étais déçue, entre autres pour mes coéquipières », dit-elle. Mais aujourd’hui, Jocelyne Larocque assure être « très fière » de cette médaille d’argent et avoir appris de cette crise.

En 2018, Jocelyne Larocque a appuyé la création de l’Association professionnelle des joueuses de hockey (Professional Women’s Hockey Players Association), qui vise à mettre sur pied une ligue féminine professionnelle de hockey en 2022.

La pandémie a freiné les activités du groupe. Les hockeyeuses ont essayé d’obtenir des exemptions pour s’entraîner. « Mais puisqu’on n’est pas une vraie ligue, c’était difficile », dit Larocque.

Trois camps ont aussi eu lieu avec l’équipe canadienne dans la dernière année. Jocelyne Larocque compte bien faire partie de l’équipe pour les prochains Jeux olympiques à Pékin.

En 2018, une deuxième joueuse autochtone, Brigette Lacquette, a rejoint les rangs de l’équipe canadienne de hockey féminine. Une excellente nouvelle pour Larocque, qui estime qu’« on s’en va dans la bonne direction ». « J’espère que nous pourrons inspirer d’autres athlètes autochtones à travailler vers cet objectif […] J’espère qu’il y en aura beaucoup d’autres après nous », dit-elle.