Lorsqu’il évoluait avec le Canadien, Alex Galchenyuk a inscrit deux buts en prolongation en séries éliminatoires. On peut dire qu’à ce compte, il a déjà donné du sien. Sa passe parfaite à Cole Caufield, en prélude au but de Nick Suzuki, n’a donc fait qu’alimenter sa légende.

Difficile d’imaginer un moment plus cathartique pour les partisans du Canadien — et pour le club lui-même — que de voir Suzuki marquer aussi aisément, au terme d’une longue descente à deux contre zéro, pour sceller cette victoire de 4-3 et transporter la série à Montréal pour un match no 6.

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Si le jeune joueur de centre a eu la vie si facile, c’est évidemment en raison du calme et de la précision dont Caufield et lui ont fait preuve dans cette séquence unique. Encore que la facilité soit toute relative quand vient le temps de marquer un but dans la LNH.

Mais même en postulant que ç’ait été facile, ne serait-ce que le temps d’un clin d’œil, ç’aura assurément été le seul souffle de facilité de ce match, voire de cette série, possiblement même de cette saison.

Ce que ce club peut être tannant, n’est-ce pas ? Offrir une performance aussi solide alors que tant de monde était préparé à un massacre. Survivre à une remontée de trois buts de l’adversaire — de cet adversaire-là, de surcroît. Gagner le pari de faire jouer Erik Gustafsson alors que le Québec prédisait une catastrophe. Défier la foi des partisans en écartant Cole Caufield et Jesperi Kotkaniemi au début de la série et soutirer des performances inspirées des deux jeunes hommes par la suite.

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Les joueurs du Canadien festoient à la fin de la rencontre

Ce n’est, ayons la politesse de l’avouer, pas rien.

« Ça n’a pas été parfait, mais j’ai aimé notre manière de travailler, de compétitionner », a souligné l’entraîneur-chef Dominique Ducharme après la rencontre.

La remarque est importante, car ses hommes, surtout ses attaquants, ont amélioré en un seul match leurs tendances de toute la série. D’une part en marquant autant de buts jeudi que dans les matchs 1 à 4 réunis. Et d’autre part en fonçant au filet et en appuyant le porteur de la rondelle comme jamais depuis une semaine.

Ce qui a mené directement à deux buts assez laids — le deuxième de Joel Armia et celui de Jesperi Kotkaniemi —, mais qui ont chaque fois récompensé un travail acharné.

« Il faut que tu trouves des manières de marquer de toutes les façons », a résumé Ducharme. En ce sens, mission accomplie.

Sang-froid

Un autre élément qui est ressorti de ce match, c’est le sang-froid dont ont fait preuve les joueurs du Tricolore.

Carey Price, au premier chef, qui n’a rien donné aux Leafs en première période, et ce, en dépit des chances de grade AAA accordées par ses coéquipiers. Phillip Danault, qui a rappelé à Auston Matthews qu’il n’aurait plus la vie facile en territoire montréalais. Et tout le reste de l’équipe, en fait, qui n’a pas paniqué lorsque Jake Muzzin a créé l’égalité 3-3 au dernier vingt.

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Carey Price (31) bloque un tir de William Nylander (88)

Price a salué la « résilience » de ses coéquipiers.

« Ce n’est pas facile d’arriver en prolongation avec un bon état d’esprit quand on perd une avance de deux buts en troisième période », a-t-il constaté, ajoutant à quel point le groupe était demeuré calme et maître de ses émotions pendant l’entracte précédant la prolongation.

« On était contents de notre match, a dit Danault. On a construit pendant toute la soirée, on ne voulait pas se laisser affecter [par l’égalisation]. Les gars ont montré du caractère, qu’ils veulent gagner. C’est important de rapporter ça à la maison. »

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Tomas Tatar (90) et Jack Campbell (36)

Son trio avec Brendan Gallagher et Tomas Tatar s’est montré « plus affamé » qu’auparavant, a indiqué le Québécois. Et c’est bien vrai, car à l’évidence, Sheldon Keefe, entraîneur-chef des Leafs, a tenté de soustraire Matthews à leur couverture en fin de partie. Cela n’empêche pas Danault d’estimer qu’« on peut être meilleurs, faire encore plus la différence ».

Doigté

Dominique Ducharme l’a souligné lui-même : une descente à deux contre zéro n’arrive pas souvent, alors imaginez en prolongation en séries éliminatoires.

À plus forte raison avec une glace qui était « boboche », selon Danault, la situation devait être abordée avec doigté. Et elle l’a été.

Caufield et Suzuki se sont échangé la rondelle avec une aisance déconcertante. Et alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que Caufield opte pour un tir, il a préféré remettre la rondelle à son joueur de centre. On connaît la suite.

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Nick Suzuki (14) déjoue Jack Campbell (36) en prolongation

Invité à partager son niveau de confiance lorsqu’il a vu les deux joueurs détaler avec la rondelle sans opposition, Carey Price a esquissé un sourire et répondu qu’il avait « assez bon espoir » que la rondelle terminerait sa course dans le filet adverse.

Toutes ces réussites et ces félicitations sont bien belles, mais encore faudra-t-il répéter l’expérience, deux fois plutôt qu’une, même, car aux dernières nouvelles, les Maple Leafs ont encore l’avance 3-2 dans cette série. Ça aussi, c’est tannant.

Cela n’empêche pas que cette équipe qui cherche à remporter une première série en 17 ans vient de laisser échapper un cinquième match d’élimination en quatre ans. Le doute a-t-il été semé ? La suite nous le dira.

Dans tous les cas, la suite se déroulera au Centre Bell, samedi, devant quelque 2500 spectateurs, une première au Canada au cours des présentes séries éliminatoires.

Les partisans montréalais, a estimé Danault, « méritent ce match ». « Ce sera fou, incroyable », a-t-il prédit.

« On a attendu ça toute l’année. En plus, un match no 6, contre Toronto, un samedi soir… J’ai hâte d’être là. »

En hausse

Phillip Danault

Pas de point sur la feuille de match, mais une performance magistrale contre Auston Matthews. Un grand match pour le Québécois.

En baisse

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Jon Merrill (28) et Carey Price (31)

Jon Merrill

Loin d’une contre-performance pour lui, surtout avec un temps de glace limité, mais il était au nombre des nageurs dans le demi-cercle de Price sur le premier but des Leafs.

Le chiffre du match

1

Selon les chiffres officiels de la rencontre, Alex Galchenyuk ne s’est rendu coupable que d’un revirement. On vous laisse deviner à quel moment il s’est produit.

Ils ont dit

Tu regardes les buts qui se marquent en séries, ça commence souvent par des jeux brisés ou forcés. Tu veux faire payer l’autre équipe pour ses erreurs. [En début de série], on a eu ces chances et on n’a pas réussi à les convertir. [Jeudi] soir, on a créé davantage de ces chances, avec et sans la rondelle. On a appliqué de la pression et on a frappé vite.

Dominique Ducharme

Il y a quelques gars qui se sont levés au banc et qui ont dit : on retourne à ce qu’on est capables de faire et on va chercher le prochain but. Et c’est arrivé. Les gars sont restés calmes et concentrés sur ce qu’ils avaient à faire.

Dominique Ducharme, sur la réaction de ses joueurs après le but égalisateur

[Carey Price] réalise des arrêts spectaculaires chaque soir. Il nous donne des ailes. Il fallait répondre, l’aider à notre tour.

Phillip Danault

Je ne pense pas que quiconque ait eu besoin de parler. Tout le monde savait à quoi s’en tenir.

Carey Price, sur l’ambiance dans le vestiaire avant la prolongation

On a un paquet de leaders dans cette équipe. Dans une rencontre, hier, des gars comme Corey Perry nous ont rappelé que des chances comme celles qui s’offrent à nous ne reviennent pas souvent.

Nick Suzuki

Quand tu as le dos au mur, tu pousses et tu te bats. Ce sera un bon test samedi. Il faudra rebondir.

Zach Hyman

Le Canadien est sorti fort, et on a mal géré ça. Est-ce que ça fait partie de l’apprentissage ? Ça ressemble certainement à ça.

Sheldon Keefe