On n'avait pas vu Max Pacioretty aussi expressif depuis belle lurette, pour son retour au Centre Bell. Son match, fort énergique, d'ailleurs, lui a valu de véritables montagnes russes d'émotions. On l'a vu touché par l'hommage au début du match, ravi au cours des premières minutes en faveur des Golden Knights, déçu de la réplique de ses anciens coéquipiers.

Pacioretty avait le meilleur siège en ville pour voir l'évolution du Canadien de Montréal entre l'année dernière et cette année. Le Canadien, version 2018-2019, a gagné 5-4, en plus d'effacer deux déficits.

Le Canadien dont il était le capitaine, la saison dernière, n'aurait jamais réussi tel exploit. En déficit 2-0 en première période, les partisans, tout comme les joueurs d'ailleurs, auraient depuis longtemps perdu tout espoir de l'emporter.

Il faut dire, par exemple, que la première période du Canadien a laissé un goût amer. Pour beaucoup, c'était un mauvais flashback d'une époque pas si lointaine où le Canadien manquait d'énergie et d'audace. Aucune créativité, aucune relance, une défensive constamment sous pression, de mauvais revirements.

C'était encore pire de voir la défensive débordée, Karl Alzner plus que tout autre, alors que Xavier Ouellet et Noah Juulsen étaient laissés de côté pour le match.

Puis, entre la première et la deuxième période, quelque chose a changé. Le Canadien s'est rappelé ce qui avait fait son succès cette saison, la raison pour laquelle beaucoup s'étaient enflammés pour le style nouveau du Canadien.

« Claude a parlé, mais tous les gars, on devait se regarder dans le miroir, a dit Charles Hudon. On n'était pas pareils. Claude a eu un bon discours qui a rallié les troupes, et ça a fonctionné. »

C'est Hudon, d'ailleurs, qui a ouvert le bal. Victor Mete a fait une passe rapide, Jesperi Kotkaniemi a remis à Hudon, et ce dernier a déculotté Marc-André Fleury d'une belle feinte. De jeunes joueurs portés vers l'attaque, la relance sans hésitation, bref, le nouveau style.

Andrew Shaw a suivi en profitant de la cohue devant le filet, tandis que tous les membres de son trio avaient convergé au filet. Encore le nouveau style. Kotkaniemi a marqué le troisième but après avoir profité du travail acharné d'Arrturi Lehkonen en échec avant. Vous nous voyez venir, le nouveau style. Encore.

« On savait qu'on ne s'était pas présentés, a ajouté Hudon. Tu vois comme le caractère a changé cette année. On croit en nous. On est sortis en deuxième et en troisième comme une vraie équipe. Il faut le faire pendant 60 minutes. »

ÉVITER LE RETOUR EN ARRIÈRE

Ce match est un exemple concret de la nouvelle mentalité. D'un autre côté, c'est aussi le rappel que le Canadien marche sur une glace mince.

Le Canadien a lancé sa saison avec une succession de décisions audacieuses qui ont vitalisé l'équipe et rapidement suscité l'espoir chez les partisans. Karl Alzner laissé de côté, Tomas Plekanec aussi, Jesperi Kotkaniemi dans la formation malgré ses 18 ans, Victor Mete et Noah Juulsen avec des rôles clés. Le virage jeunesse était bien amorcé et Claude Julien insistait sur la rage de vaincre, la rapidité, l'échec avant, la recherche du revirement. Les résultats ont été instantanés, le spectacle a plu.

La première période du match d'hier doit servir d'avertissement. Le Canadien doit garder le même feu, aussi éprouvant que ce soit, et Claude Julien doit faire preuve de la même audace dans ses décisions. 

C'est la fougue du Canadien qui a électrisé son début de saison, c'est sa fougue encore qui lui a fait gagner le match d'hier. Et c'est la fougue, fournie en grande partie par les jeunes, qui donnera le ton à la prochaine génération du Canadien. 

« On va y aller avec le positif, a renchéri Hudon. On est sortis avec la victoire, on a montré l'effort et le caractère. L'année passée, on ne l'a pas fait souvent, revenir de deux buts. Il faut arrêter de laisser plus que trois buts [à l'adversaire], mais on a la victoire. On pensera au négatif plus tard. » 

Au fait, c'est là aussi l'un des problèmes du Canadien. C'était la 13e fois cette saison qu'il accordait trois buts ou plus. Il a encaissé 30 buts à ses sept derniers matchs. C'est beaucoup trop. Claude Julien a jonglé avec son top 6 défensif, dernièrement. Hier, Juulsen et Ouellet mangeaient des hot-dogs sur la passerelle (façon de parler, bien sûr), mais ce n'est peut-être pas eux qui sont les plus à blâmer. 

« Il ne faut pas penser qu'on peut continuer à jouer comme ça. On va essayer de corriger certains détails. On part dans l'Ouest canadien pour un voyage important [à Edmonton, Calgary et Vancouver] et il faudra que notre jeu soit beaucoup mieux sans la rondelle. » 

Audace et fougue, encore et toujours. Le Canadien ne doit plus regarder en arrière... comme il l'a fait pendant 20 minutes hier.