Même avec trois Coupes Stanley et 330 points en 509 matchs dans la Ligue nationale avec le Canadien, Gilles Tremblay, mort hier à l'âge de 75 ans, a probablement marqué davantage le Québec sportif dans son rôle d'analyste à la Société Radio-Canada que dans l'uniforme tricolore.

«Il a joué neuf ans avec le Canadien, puis passé 25 ans à Radio-Canada, en plus de tous nous ouvrir la porte, les anciens joueurs qui sont passés derrière le micro, alors on comprend pourquoi sa deuxième carrière nous a marqués davantage», a confié hier Mario Tremblay, l'un de ses dauphins à la Société Radio-Canada.

C'est d'ailleurs pour sa contribution dans le domaine des médias que le Temple de la renommée de la LNH l'a accueilli en 2002.

Sa carrière de hockeyeur, même si elle a été écourtée en raison de la maladie alors qu'il avait seulement 30 ans, demeure éloquente. Il s'est joint au Canadien en 1960 au sein d'un formidable trio complété par les légendaires Jean Béliveau et Bernard Geoffrion.

Dès son premier match, on lui a confié la tâche de surveiller le grand Gordie Howe, mission dont il s'est acquitté avec aplomb pour le reste de sa carrière grâce à sa vitesse. Par la suite, Howe n'a jamais manqué une occasion de vanter son rival.

«Howe est probablement la personne qui m'a fait la meilleure publicité dans la ligue, a déjà déclaré Gilles Tremblay. En plus d'avoir critiqué mon absence à un match des Étoiles, un jour, il m'a dit: "En te voyant la première fois, j'ai su que tu pouvais me couvrir."»

De la patinoire au micro

Sans le savoir au départ, Gilles Tremblay a révolutionné à sa façon le monde sportif télévisuel en devenant le premier hockeyeur québécois à faire le saut directement de la patinoire au micro, en 1969.

«C'était très audacieux pour l'époque, rappelle le producteur de la Soirée du hockey, Jacques Bérubé, un collaborateur de la première heure. Les joueurs n'avaient pas la même éducation à l'époque. Un gars comme Henri Richard était prêt à me payer pour ne pas passer à la télé tellement il craignait de faire des erreurs à l'écran. C'était un phénomène assez récent. Le baseballeur Sandy Koufax avait été le premier athlète à faire carrière dans le domaine après sa carrière.»

Les débuts ont été difficiles. «Il a mis plusieurs années à trouver sa zone de confort, se souvient Jacques Bérubé. (Le descripteur) René Lecavalier l'a beaucoup aidé. Il avait une foule de notes pour lui et il calmait sa nervosité. Camil Chouinard, le linguiste à Radio-Canada, notait chacune des erreurs qu'il entendait à la télévision, non seulement celles de Gilles, mais de tous les autres. C'était aussi un rôle particulier parce qu'il voyageait avec l'équipe comme analyste et non plus comme joueur; les femmes se parlaient à la suite de ses commentaires, c'était délicat.»

«Tellement de bons conseils»

Gilles Tremblay a été contraint à la retraite en raison d'une pneumonie mal soignée qui s'est transformée en asthme chronique. Mario Tremblay a croisé sa route en 1986, lorsqu'une blessure à une épaule a mis fin à sa carrière. Les deux hommes ont travaillé pour la même société pendant les huit années suivantes.

«Il m'a donné tellement de bons conseils. Il était un exemple à suivre. Il a travaillé fort à sa carrière autant comme analyste que comme hockeyeur. Il trouvait que mon débit était trop rapide. Je lui dois beaucoup.»

Tremblay dit s'être amélioré au contact des René Lecavalier, Richard Garneau, Lionel Duval, Claude Quenneville, René Pothier et Jacques Moreau.

Il a couvert les plus grands hockeyeurs de l'histoire, de Bobby Orr et Guy Lafleur à Wayne Gretzky en passant par Mario Lemieux.

Sa voix chaleureuse a contribué à bercer des millions d'amateurs, grands et petits. Il fait partie des souvenirs d'enfance de l'ailier droit du Canadien Pierre-Alexandre Parenteau.

«Il a contribué à mon amour du hockey. Quand j'étais petit bonhomme, j'écoutais les matchs le samedi soir avec mon père, c'est là que tout a commencé. Quand les choses sont bien expliquées et exprimées comme il le faisait, ça accroche.»