Dale Weise rêvait d'être Keith Tkachuk. Tout petit enfant, il suivait les Jets et cet attaquant de puissance qui, de concert avec Alexei Zhamnov et un jeune du nom de Teemu Selanne, réchauffaient un peu les hivers de Winnipeg.

À l'âge de 7 ans, il a vu ses Jets décoller vers Phoenix. Personne d'autre dans la maison n'a versé de larmes, car ses parents étaient de farouches partisans du Tricolore.

«Depuis toujours, mon père est un fan des Habs et il adorait Guy Lafleur, raconte-t-il. Après le départ des Jets, j'ai suivi les traces de mon père et on s'est mis à regarder les matchs du Canadien ensemble...»

Dès ce moment-là, la graine était semée pour que, des années plus tard, les Weise puissent vivre un grand moment d'exaltation.

Ça s'est passé le 3 février, à Detroit. Ce matin-là, Weise a enfilé le chandail des Canucks de Vancouver en se demandant s'il affronterait les Red Wings le soir même. Jouerait-il quatre minutes dans le match? Cinq, peut-être?

«Je n'ai fait qu'un tour de patinoire à l'entraînement matinal avant qu'on me dise de sortir pour aller voir l'entraîneur. John Tortorella m'a alors annoncé que j'étais échangé, mais il ne savait pas où.

«J'essayais d'imaginer des destinations possibles... Jamais je n'aurais pensé à Montréal. Puis, un préposé à l'équipement est entré dans le vestiaire et il m'a dit: «comme ça, c'est Montréal?» Comment se faisait-il qu'il était au courant et pas moi?

«Oui, tu es échangé contre Raphael Diaz», a-t-il ajouté.

Weise a bondi et a saisi le téléphone pour appeler à la maison. Sa mère ne l'a pas cru.

«Elle pensait que je lui montais un bateau. Je n'ai pas pu parler à mon père avant d'arriver à l'hôtel à Montréal. De lui annoncer la nouvelle a été un moment assez spécial. Il avait eu cette fierté de voir son fils atteindre la LNH, mais là, d'être échangé à son équipe favorite...»

À la sauce hollandaise

Ignoré à sa première année d'admissibilité au repêchage, puis réclamé en quatrième ronde en 2008 par les Rangers de New York, Weise n'annonçait rien de bien légendaire.

Mais comme quoi nul n'est prophète en son pays, il a profité du lock-out de 2012 pour acquérir un surnom bien particulier, The Dutch Gretzky.

Le Gretzky néerlandais, rien de moins!

Ce n'est pas que Weise soit d'origine néerlandaise - il semble que les premières branches de la famille aient poussé en Bavière, au Moyen Âge. C'est plutôt que l'attaquant du Canadien a été le seul joueur de la LNH à s'exiler aux Pays-Bas pendant le conflit de travail.

Et il a fait un malheur là-bas.

«Il n'y avait pas d'endroit particulier où je préférais aller, je voulais juste jouer, nous a raconté Weise. Mon agent a lancé quelques lignes à l'eau, puis il m'est revenu en me demandant ce que je pensais des Pays-Bas.

«En l'espace de quelques jours, j'étais rendu là-bas. Je ne savais pas à quoi m'attendre, mais l'atmosphère était folle en arrivant sur place. Le jour de mon arrivée, il y avait une grosse conférence de presse et 20 000 personnes s'étaient rassemblées à l'extérieur de l'aréna!

«Les Trappers de Tilburg ont les plus importants commanditaires et ils dominent année après année. Ils ont les meilleurs joueurs et dans un pays fou de soccer, ils adorent le hockey à Tilburg.»

En seulement 19 matchs là-bas, Weise a récolté 22 buts et 48 points. La légende du Dutch Gretzky était née...

La confiance de Therrien

Ç'a été un amusant interlude pour un joueur qui, à l'échelle de la LNH, ne peut se permettre de lâcher le pied de l'accélérateur, sous peine d'être confiné aux estrades.

Weise l'a appris à la dure sous les ordres de Tortorella - d'abord avec les Rangers de New York, ensuite avec les Canucks. Weise n'est plus trop enclin à déverser son fiel sur son ancien entraîneur et préfère tourner la page sur des mois de frustration.

Il faut dire que l'ailier de 25 ans a maintenant trouvé son bonheur de hockeyeur. Il est utilisé avec le Canadien pour ce qu'il est vraiment. Certes, le Manitobain va jeter les gants si la situation l'exige - et elle l'exigeait à Vancouver, le soir où Bob Hartley a envoyé ses goons des Flames de Calgary pour amorcer un match - mais il ne s'est battu qu'une fois depuis son arrivée à Montréal. Weise est un joueur intense, certes, mais qui aime aussi utiliser sa vitesse pour presser l'adversaire en échec avant.

Et nourrissez la confiance d'un joueur, valorisez-le, et son rendement en sera décuplé. On l'a constaté contre le Lightning de Tampa Bay.

Même si Weise ne sera plus jamais confondu avec Wayne Gretzky, il a connu des moments exaltants en première ronde. Le but qu'il a marqué en prolongation dans le premier match est le genre de but auquel il rêvait depuis qu'il est enfant.

«J'ai marqué ce but des centaines de fois dans mon entrée de garage», a-t-il d'ailleurs confié après avoir lancé le CH en avant dans la série.

Puis il y a eu cette brillante passe à Daniel Brière qui a donné les devants au Tricolore dans le dernier match.

«Je ne sais pas pourquoi le défenseur du Lightning a décidé de s'amener vers moi, mais ça a libéré Danny, qui était fin seul devant le filet», a-t-il noté.

Avec les Bruins de Boston qui attendent le Canadien dans le détour, il était clair que Michel Therrien aurait recours à Travis Moen, désormais rétabli de sa commotion cérébrale. Restait à savoir qui allait écoper.

Dale Weise a fait tout ce qu'il fallait pour que ce ne soit pas lui.

____________________________________________________

Fierté et acceptation

Dale Weise a passé deux ans et demi avec les Canucks de Vancouver. Il en garde de bons souvenirs.

«Peu importe le niveau où j'ai joué, je n'avais jamais vu une équipe tissée aussi serré, raconte-t-il. Toutes les familles sont proches les unes des autres.»

Sachant cela, comment le vestiaire du Canadien se comare-t-il à celui des Canucks? «Ici (à Montréal), quand l'équipe saute sur la glace, elle pousse vraiment dans une seule direction, répond Weise. Il n'y a pas de gros ego, et je ne pourrais en dire assez sur notre capacité à bien jouer en équipe. Tout le monde se protège l'un et l'autre. Quand je me suis fait frapper par-derrière contre Boston, Travis Moen est immédiatement venu à ma défense. À Ottawa, c'est Jarred Tinordi et même Alex Galchenyuk qui ont prêté main-forte aux coéquipiers. Ces gestes-là soudent une équipe.

«La différence entre les deux équipes, c'est qu'ici les joueurs acceptent davantage leur rôle et en retirent plus de fierté qu'à Vancouver.»

____________________________________________________

Des moments forts en première ronde

Avant cette saison, Dale Weise n'avait que six matchs d'expérience en séries éliminatoires. Il a pu goûter en première ronde à ce que c'est de vivre le hockey du printemps à Montréal, et son audimètre personnel a vibré en quelques occasions.

«Quand Ginette Reno est sortie pour chanter les hymnes nationaux, c'était pas mal cool, elle a vraiment galvanisé la foule, souligne-t-il. Quand elle est revenue pour le match suivant, c'était encore plus fou. Je retiens aussi la mise en jeu avec 20 secondes à faire dans le troisième match, alors que la foule nous a encouragés à protéger notre avance... Mais quand Max Pacioretty a marqué avec une quarantaine de secondes à faire dans le dernier match, c'est peut-être ce que j'ai entendu de plus bruyant.

«Ç'a été des moments-clés... mais j'espère qu'il y en a d'autres qui nous attendent!»

____________________________________________________

À Montréal pour longtemps?

Dale Weise sera joueur autonome avec compensation à la fin de la saison et il sera admissible à l'arbitrage. S'il semble avoir doublé son ami Ryan White dans la hiérarchie du Canadien, il ignore encore ce que l'avenir lui réserve. Chose certaine, s'il n'en tenait qu'à lui, il resterait avec le CH. Et pour longtemps.

«J'aime Montréal, j'ai l'impression de jouer un bon rôle ici et je crois que je pourrais être utile, fait-il valoir. J'aimerais pouvoir rester ici à long terme, et ma fiancée aime beaucoup Montréal. Nous n'étions jamais venus ici auparavant et nous nous sommes établis dans le Vieux-Montréal, c'est très agréable.»

Weise écoule un contrat d'un an d'une valeur de 750 000 $.