Huit Américains pourraient être repêchés dès la première ronde ce soir au Centre Bell, soit presque 27% des joueurs sélectionnés.

Ils étaient cinq l'an dernier, 10 l'année précédente et neuf en 2006. Des Américains ont constitué le premier choix de la Ligue nationale de hockey en 2007 et 2006, respectivement Patrick Kane et Erik Johnson.

Le Canadien, comme plusieurs autres équipes, a lui aussi pris des Américains comme premiers choix ces dernières années : Mike Komisarek en 2001, Chris Higgins en 2002, David Fischer en 2006, Ryan McDonagh en 2007 et Danny Kristo en 2008.

Même les Red Wings de Detroit ont emboîté le pas. Cinq de leurs 11 choix dans les deux dernières années jouent dans la NCAA ou la USHL.

Et le développement du hockey aux États-Unis n'est pas en voie de s'éteindre. La nouvelle n'a pas fait beaucoup de bruit, mais la LNH a annoncé récemment qu'elle verserait une somme annuelle de 8 millions au programme USÀ Hockey. C'est une hausse gigantesque puisqu'elle octroyait seulement 400 000$ à cet organisme jusqu'en 2005, et 1,2 million l'an dernier.

La stratégie de la LNH est facile à comprendre. Rien de tel que de développer le maximum de joueurs américains pour stimuler le hockey aux États-Unis et réaliser la percée tant souhaitée. Pas pour rien que le commissaire Gary Bettman tient à ce point à garder des équipes dans des marchés américains ciblés, malgré des pertes financières importantes.

La situation n'est pas sans inquiéter le grand patron de Hockey Canada, Bob Nicholson, croisé hier, à l'hôtel où avait lieu une conférence de presse pour annoncer les entraîneurs en prévision des Jeux olympiques d'hiver. Nicholson semblait heureux qu'un journaliste aborde la question avec lui.

À l'heure actuelle, les trois circuits juniors canadiens, les ligues de l'Ouest, de l'Ontario et du Québec, qui fournissent à la LNH un large bassin de joueurs, reçoivent une somme comparable à ce que l'on donne aux Américains, mais Hockey Canada, dont la mission est de développer les jeunes joueurs canadiens, doit se contenter d'à peine plus de 100 000$ par année.

«Ça donne aux États-Unis une structure et un avantage certain, a confié Nicholson hier matin. Je peux comprendre qu'ils veuillent renforcer le hockey aux États-Unis. Ils ont un nombre important d'équipes de la Ligue nationale là-bas. Mais j'espère que la Ligue nationale continuera à se souvenir que le Canada lui fournit 58% des joueurs. Nous avons besoin qu'elle en fasse plus pour nos programmes de hockey mineur. Et je ne parle pas seulement d'argent ici, mais de diverses ententes semblables à celles qu'ils ont avec USÀ Hockey. Nous avons plusieurs immigrants au Canada et nous devons faire la promotion de notre sport différemment. C'est notre responsabilité, mais nous avons besoin de l'aide de la LNH en raison de sa visibilité.»

Nicholson demeure optimiste malgré tout. «Nous avons une bonne relation avec la Ligue nationale. La LNH a eu de gros dossiers à gérer récemment, mais nous entendons discuter à nouveau avec Bill Daly et John Collins. Plus souvent nous leur parlerons, meilleures seront nos chances d'obtenir les ententes nécessaires.»

L'autre désavantage marqué pour les jeunes joueurs canadiens par rapport aux hockeyeurs américains, c'est cette entente qui permet aux équipes de la LNH d'attendre quatre ans avant de devoir offrir un contrat à un jeune repêché dans la NCAA, comparativement à deux ans pour ceux qui proviennent des ligues juniors canadiennes. Dans le cas des jeunes issus des écoles secondaires américaines, les clubs de la Ligue nationale ont cinq ans pour leur soumettre une offre de contrat.

Mais la situation ne changera pas de sitôt, selon le commissaire de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, Gilles Courteau.

«Dans un monde idéal, le système serait uniforme, a-t-il dit à la même conférence de presse. Nos bons joueurs vont être repêchés tôt mais après les premières rondes, les équipes qui veulent jouer d'audace vont opter pour les joueurs des États-Unis avant les nôtres parce qu'ils auront quatre ans pour les mettre sous contrat. Nos joueurs (moins en vue) ne seront donc pas repêchés, mais invités à des camps d'entraînement. Et s'ils font l'affaire, on va leur offrir un contrat à deux volets. Je n'aime pas le fait que la situation ne soit pas pareille selon les circuits. Mais c'est une question à régler entre l'Association des joueurs de la LNH et la Ligue nationale. Tant que les dirigeants de l'Association des joueurs insisteront pour que ça reste deux ans parce que c'est la meilleure façon de développer les joueurs juniors, ça ne changera pas.»

La suite des choses sera intéressante. Mais elle ne sera peut-être pas à l'avantage du hockey au Canada...