Le simple fait d'avoir cette conversation avec un joueur de 17 ans tient déjà de l'exception. C'est qu'ils sont rares, les joueurs qui peuvent rêver à une place avec Équipe Canada junior près de deux ans avant leur repêchage.

Mais bon, Alexis Lafrenière n'est pas un joueur comme les autres, donc même s'il a fêté ses 17 ans le mois dernier, on peut l'interroger sur ce que constituerait pour lui une participation au Championnat du monde des moins de 20 ans.

«C'est un rêve. Depuis que je suis jeune, je regarde le Mondial junior à la télévision, explique Lafrenière, rencontré mardi matin. Je vais rester moi-même, jouer mon match, et si j'ai la chance de représenter le Canada, ce serait spécial.»

Y a-t-il des moments marquants du tournoi qui lui viennent en tête? «Il y a le but de Jordan Eberle [en 2009]. Et il y a aussi les tirs de barrage de Jonathan Toews. Il y avait été quelques fois.»

Passe toujours pour le but d'Eberle; Lafrenière avait 7 ans. Mais le 3 janvier 2007, quand Toews a marqué ses trois buts en fusillade contre les États-Unis, Lafrenière avait... 5 ans! «Je n'étais pas vieux, mais je me souviens où j'étais, j'étais chez ma grand-mère, je regardais ça, c'était fou. Je me souviens aussi que c'était Carey Price dans les buts.»

«C'était un moment incroyable pour Toews, ça m'a fait voir que c'était un très bon joueur. Et à Chicago, il a tout gagné. C'était le fun de voir jouer ces joueurs-là», poursuit l'attaquant de l'Océanic de Rimouski.

Dans les plans

On s'entretenait avec Lafrenière à Sherbrooke en marge de la série Canada-Russie. Le concept du tournoi: une équipe formée de Russes dispute six matchs au Canada, soit deux contre les meilleurs espoirs de chacune des trois ligues juniors du pays.

«Ce n'est pas un match des Étoiles», prévient Marc-André Dumont, un des adjoints au sein de l'équipe de la LHJMQ. Ce tournoi aide en effet les décideurs d'Équipe Canada à déterminer qui sera invité au camp final de décembre, en vue du Mondial junior.

Au Canada, il est très rare qu'un joueur participe au Mondial junior deux ans avant son année de repêchage. Connor McDavid et Sidney Crosby l'ont fait (ils avaient toutefois 16 ans). En raison de son anniversaire en octobre, Lafrenière sera seulement admissible au repêchage de la LNH en 2020, et il a une chance bien réelle de porter les couleurs d'Équipe Canada junior dès cet hiver. Car jusqu'ici, il a excellé à chaque étape.

• Meilleur compteur de l'Océanic (9e de la LHJMQ) à sa première saison l'an dernier, avec 80 points en 60 matchs;

• Meilleur compteur d'Équipe Canada au tournoi Hlinka-Gretzky l'été dernier, avec 11 points en 5 matchs;

• Meilleur compteur de l'Océanic (2e de la LHJMQ) cette saison, avec 36 points en 21 matchs.

Alors, il a des chances? «Aucun doute », assure Dumont, et ce, même si Lafrenière n'a pas participé au camp estival d'Équipe Canada. C'est que ce camp coïncidait avec le tournoi Hlinka-Gretzky.

«C'était important qu'il soit avec les moins de 18 ans, explique Dumont. C'était important qu'il s'établisse au sein de son groupe d'âge, qu'il s'établisse au hockey international. Cette expérience-là était plus valable que notre camp, qui est aussi important.»

En attendant la prochaine étape, Lafrenière a droit à une vraie chance de se faire valoir contre les Russes. L'équipe l'emploie en effet au sein du premier trio, avec Antoine Morand, choix de deuxième tour des Ducks d'Anaheim en 2017, et Raphaël Lavoie, vu par certains experts comme un des dix meilleurs espoirs en vue du repêchage de 2019.

Gérer les attentes

Lafrenière connaît du succès individuellement, mais c'est plus difficile pour l'Océanic, qui présente une fiche de 11-9-1, bonne pour le 9e rang au classement général. Pourtant, les experts voyaient de façon relativement unanime l'Océanic parmi les puissances du circuit Courteau cette saison.

«L'an passé, il n'y avait pas vraiment d'attentes pour nous. On a surpris beaucoup de gens, rappelle Lafrenière. Cette saison, il y a plus d'attentes, mais on est encore une jeune équipe et on apprend.»

S'il obtient un poste avec Équipe Canada junior, il devra là aussi composer avec des attentes élevées, même si, à son âge, il n'y occuperait pas un rôle aussi central qu'il le fait à Rimouski.

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Faire mentir les listes

Lafrenière fait déjà jaser pour le repêchage de 2020, où plusieurs le voient comme le tout premier choix. Pour celui de 2019, Raphaël Lavoie se démarque, et il est généralement suivi par Samuel Poulin. Ce sont les deux seuls Québécois à avoir reçu la cote A au classement préliminaire de la Centrale de recrutement de la LNH.

Parmi les espoirs cotés B, on retrouve Jakob Pelletier, un petit attaquant de 5 pi 9 po et 163 lb qui connaît un meilleur départ (statistiquement) que les deux autres. En 20 matchs avec les Wildcats de Moncton, il totalise déjà 30 points.

«Le hockey a beaucoup changé. Dans la LHJMQ, les gens me disaient que je suis petit, mais ça ne change pas grand-chose, assure Pelletier. Jack Hughes n'est pas si grand, un peu plus gros, un peu plus grand que moi, mais il va sortir premier. C'est sûr que [ma taille] peut me désavantager, mais tant que je patine et que je suis intense, de bonnes choses vont arriver.»

Lors du match d'hier, à Sherbrooke, Pelletier était répertorié comme 13e attaquant, signe que ses chances avec Équipe Canada junior pour cet hiver sont minces.

Photo André Vuillemin, Spectre Média

Samuel Poulin