C'est la semaine du Super Bowl, le grand rendez-vous du football américain. Partout en Amérique, et même ailleurs, des milliers de jeunes joueurs vont rêver d'être aux côtés des Brady, Gurley, Donald ou Gilmore; un rêve inaccessible pour la grande majorité d'entre eux, mais que caressent pourtant deux espoirs québécois: Mathieu Betts et Maurice Simba.

En fait, les deux joueurs n'en sont pas encore là, ou du moins, ils n'en parlent pas. Encore étudiants-athlètes, respectivement avec le Rouge et Or de l'Université Laval et les Stingers de Concordia, Betts et Simba espèrent simplement pour l'instant susciter l'intérêt d'une équipe de la NFL pour au moins recevoir une invitation au prochain camp d'entraînement.

Et ils ont déjà commencé à le faire!

Il y a quelques jours, Betts et Simba ont pris part à des matchs réunissant plusieurs des meilleurs espoirs du football universitaire américain. Chacun de leur côté, ils ont marqué des points auprès des recruteurs des équipes, tout en acquérant une confiance qui devrait bien les servir au cours des prochaines semaines.

Mathieu Betts: prêt pour les pros

Mathieu Betts n'a eu que quelques heures pour apprécier sa performance au Shrine Bowl, le 19 janvier à St. Petersburg, en Floride. Rentré à Québec le lendemain, il était déjà en classe le lundi matin.

«J'ai appris en arrivant que je devais passer les tests physiques liés à mon bac en enseignement de l'éducation physique et à la santé», a-t-il raconté en entrevue téléphonique il y a quelques jours. «Je vais aussi devoir passer mon test général de synthèse vendredi, ce qui exige quand même beaucoup de révision. Si tout se passe bien, je vais avoir terminé mon bac à la fin de la session.»

Une étape importante, que Mathieu tenait à franchir avant d'aborder la suite de sa carrière au football. Sacré l'automne dernier meilleur joueur de ligne du football universitaire canadien pour la troisième année consécutive, après avoir été la recrue de l'année en 2015, Betts est considéré comme le meilleur espoir canadien en vue des repêchages professionnels.

Après avoir aidé le Rouge et Or à remporter trois titres provinciaux d'affilée, deux finales de la Coupe Vanier, l'athlète est prêt pour le prochain niveau. Pas question, en principe, de jouer une cinquième année au football universitaire, Betts se prépare maintenant pour les pros. Il reste à voir où ce sera.

«Le Shrine Bowl, c'était la première étape du processus et je pense l'avoir bien réussie. J'ai bien fait sur le terrain et je pense avoir montré que je fournissais un effort constant sur tous les jeux et à l'entraînement. J'ai aussi pu affronter d'excellents joueurs tout en améliorant mes connaissances sur le football américain. Au total, donc, je ne pouvais espérer mieux.

«La deuxième étape, c'est maintenant de me préparer pour les tests physiques du mois de mars. J'ai déjà accepté l'invitation pour le Combine de la LCF, à Toronto, du 22 au 24 mars. Plusieurs équipes ont aussi exprimé un intérêt pour un Pro Day ici, à Québec, et on essaie de voir si on ne pourrait pas organiser quelque chose à la mi-mars.»

Ces fameux tests, au cours desquels on mesure la force, la vitesse et l'agilité des athlètes, sont très importants aux yeux des recruteurs et les résultats sont toujours passés au peigne fin. Betts y accorde donc beaucoup d'importance et se prépare au PEPS de l'Université Laval avec d'autres joueurs du Rouge et Or.

«Nous sommes sept à préparer le Combine et c'est stimulant de travailler ensemble. Ça me permet aussi de continuer à côtoyer les autres joueurs de l'équipe, les entraîneurs aussi et ils peuvent me conseiller.»

À 6 pi 3 po et tout près de 260 lb, Betts est l'un de ces joueurs défensifs «hybrides» qui, dans la NFL, pourraient jouer sur la ligne (à l'extérieur dans une formation 4-3-4) ou sur la secondaire (dans une formation 3-4-4). «Il n'y a pas une grande différence, estime-t-il. De toute façon, je crois que les équipes s'adaptent aux qualités des joueurs qu'elles ont et que je serais utilisé là où je pourrais les aider.»

Pour conserver cette polyvalence dans l'esprit des dépisteurs, Betts apporte un soin particulier à sa préparation physique, à son poids en particulier. «J'ai pris un peu de muscle récemment, mais je veux garder mon explosivité. Je ne pense donc plus gagner de poids d'ici aux tests physiques. Comme me l'a souvent dit Glen [Constantin, entraîneur-chef du Rouge et Or], l'important est de ne pas prendre LA livre de trop, celle qui va commencer à te gêner et à te ralentir.»

À ceux qui doutent qu'ils puissent se tailler une place dans la NFL, Betts réplique: «Au fond, le football, ça reste quand même assez simple. L'objectif est de pouvoir mettre le ballon dans les mains de tes meilleurs joueurs et de les laisser utiliser leur talent pour marquer des points; et en défense, tu veux que tes meilleurs joueurs soient là pour les arrêter.»

Partout où il a joué, Betts a été parmi les meilleurs. Ce serait étonnant qu'il ne le soit pas encore au prochain niveau.



Maurice Simba: un potentiel intrigant

On a parlé l'automne dernier de l'improbable parcours de Maurice Simba, cet étudiant-athlète originaire de la République démocratique du Congo, qui est arrivé au Québec en 2012 sans jamais avoir vu un match de football.

Il était pourtant du NFLPA Collegiate Bowl, le 19 janvier à Pasadena, en Californie, avec plusieurs joueurs vedettes de la NCAA, et n'a pas manqué de faire tourner les têtes des recruteurs de la NFL du haut de ses 6 pi 8 po. Le joueur de ligne offensive des Stingers de Concordia a progressé de façon phénoménale depuis ses débuts au cégep Montmorency et son potentiel intrigue plusieurs équipes.

Tout autant que sa taille, la personnalité de Simba le sert bien au moment d'aborder une étape importante de sa carrière. Souriant, affable, il est animé par un désir continu d'apprendre et retient toutes les leçons.

«Je suis vraiment content de mon expérience aux États-Unis, a-t-il raconté en entrevue. Au début de la semaine, j'étais sur la deuxième équipe, mais on m'a vite promu sur la première et j'ai même été nommé parmi les capitaines pour le match. En l'annonçant, l'entraîneur a vanté mon travail, mon leadership et mes coéquipiers m'ont tous félicité.»

Classé parmi les meilleurs espoirs canadiens pour le repêchage de la LCF, Simba a aussi la NFL à l'oeil. Les représentants d'une vingtaine d'équipes lui ont parlé à Pasadena et il pense avoir fait bonne impression. «Les recruteurs voient le chemin que j'ai déjà parcouru et réalisent qu'il y a quelque chose à faire avec moi.

«Je préfère toutefois ne pas regarder trop loin en avant. Je suis invité à Toronto pour le Combine de la LCF [22-24 mars] et, avec coach [Brad] Collinson, on regarde pour peut-être organiser quelque chose à Concordia. Je serais le premier joueur de l'équipe à avoir son Pro Day.»

Comme Mathieu Betts, Maurice ne lésine pas sur ses études. Lui aussi était de retour en classe deux jours après le Collegiate Bowl et il entend bien obtenir un diplôme, quoi qu'il arrive avec sa carrière au football.

Les deux joueurs sont représentés par Sasha Ghavami, qui travaille aussi avec Laurent Duvernay-Tardif et plusieurs autres joueurs et espoirs québécois. Son expérience est évidemment précieuse pour Betts et Simba et l'agent montréalais n'a pas manqué de leur rappeler qu'ils devaient maintenant se montrer patients.

Malgré l'intérêt manifeste qu'ils ont reçu jusqu'ici, rien n'est acquis. «À ce stade du processus, on n'a encore aucune idée de ce que vont décider les équipes de la NFL, a souligné Ghavami. Tous les scénarios sont possibles; ces joueurs pourraient peut-être être repêchés dans les dernières rondes, mais ils pourraient aussi être embauchés après le repêchage à titre de joueurs autonomes, ou encore recevoir une invitation d'une équipe pour un minicamp de recrues.»

Toutes des façons d'accéder à la NFL, et nos deux aspirants ne souhaitent qu'obtenir une chance de faire leurs preuves. Les rêves viendront bien ensuite.

Photo Olivier PontBriand, archives La Presse

Maurice Simba