Larry Fitzgerald est-il le meilleur receveur de sa génération? En tout cas, il est le plus tranquille. Et le plus modeste. Notre journaliste a rencontré la vedette des Cards, un «oiseau rare» qui détonne dans le monde de la NFL peuplé de divas.

Ce n'est pas un secret, les receveurs de la NFL sont souvent des gars assez détestables. Des noms? Terrell Owens. Steve Smith. Randy Moss. Tous d'excellents receveurs, certes, mais aussi des types qui, trop souvent, ont l'habitude de faire jaser pour leurs écarts de conduite et leurs sautes d'humeur.

 

Avec Larry Fitzgerald, c'est très différent.

Le receveur des Cards ne danse pas après un touché. Il ne dit jamais de folies. Attirer l'attention, ce n'est pas son truc. Quand il explique les succès de son équipe, il parle des autres, surtout du quart Kurt Warner. Et quand on lui dit qu'il est devenu le meilleur receveur du football américain, il hausse les épaules d'un air embarrassé.

Modeste? Plutôt, oui.

«J'ai toujours été un fan de Barry Sanders, explique-t-il, en parlant de l'ancien demi des Lions de Detroit. Quand Barry réussissait une belle course, il n'essayait jamais d'humilier l'adversaire. Il retournait dans le caucus, et il se préparait pour le jeu suivant. J'essaie de faire la même chose.»

Nous sommes à l'hôtel des Cards de l'Arizona, pas très loin du centre-ville de Tampa. C'est la semaine du Super Bowl. Dans cette pièce, il doit bien y avoir 500 membres des médias. Pendant une heure, Larry Fitzgerald va répondre à toutes les questions, souvent d'un ton amical, en regardant son interlocuteur droit dans les yeux. Dans un monde de divas, dans le monde assez spécial de la NFL, ce gars-là détonne. «J'ai toujours su garder les deux pieds sur terre, c'est comme ça que j'ai été élevé», explique-t-il.

Il a été élevé par une mère qui lui manque terriblement. Carol Fitzgerald est décédée d'un cancer il y a six ans. Larry garde le permis de conduire de sa mère sur lui en tout temps. Son père se nomme Larry Sr., journaliste sportif pour un journal du Minnesota. Papa est ici, à Tampa, avec la meute journalistique, et tente de rester objectif.

Fiston, lui, en sera à son premier Super Bowl. Si les Cards de l'Arizona ne sont plus une mauvaise blague, c'est pas mal grâce à lui, qui a assommé les Eagles de Philadelphie il y a deux semaines, avec neuf attrapés pour 152 verges de gains et trois touchés.

Avec tout ça, on allait oublier: avant tout, Larry Fitzgerald adore jouer au football.

«J'aime parler avec les joueurs légendaires, j'aime appeler les Jerry Rice, Lynn Swann ou Emmitt Smith pour savoir comment ils faisaient. Tous les bons joueurs ont rayonné lors du plus grand match, le Super Bowl. Tous ces gars-là ont connu leur jour de gloire non pas en finale de conférence ou en finale de division, mais bien au Super Bowl. Les plus grands offrent leurs meilleures performances sur la plus grande scène. Et ça, c'est le Super Bowl.»

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On oublie parfois que Larry Fitzgerald n'a que 25 ans. Qu'il est arrivé dans cette ligue à 20 ans, et qu'il a déjà trois saisons de plus de 1400 verges au compteur. On oublie parfois que sa carrière ne fait que commencer.

Le jeune est modeste, ça oui, mais ça ne l'empêche pas de viser haut. Parmi ses buts, il y a celui-ci: devenir l'un des meilleurs receveurs à avoir jamais joué dans cette ligue. Rien de moins.

«C'est l'une des raisons pour lesquelles je joue au football, pour gagner et pour devenir l'un des meilleurs... Je crois qu'un joueur qui ne cherche pas à devenir l'un des meilleurs ne devrait même pas jouer. Je suis né avec ce talent, et je vais tout faire pour atteindre mes buts. À l'entraînement, j'essaie d'attraper au moins 200 ballons par jour...

«Je crois sincèrement que ce que j'ai fait lors du match précédent ne veut plus rien dire. J'ai la chance d'une vie cette semaine à Tampa... Les Steelers ont une très bonne équipe, probablement la meilleure équipe qu'on aura à affronter cette saison. Je vais devoir offrir ma meilleure performance de l'année pour aider notre équipe à l'emporter.»

Tout le monde le sait, le joueur que les Steelers vont devoir arrêter demain soir, c'est le numéro 11 des Cards. Par ici à Tampa, c'est son nom que les experts prononcent sans arrêt. Si les Cards causent la surprise contre la défense de fer des Steelers à ce 43e Super Bowl, ce sera sans doute parce que Larry Fitzgerald aura réussi à semer les monstres défensifs de Pittsburgh.

Et si jamais le jeune homme se retrouve dans la zone des buts? Alors là, ne vous attendez pas à quelque chose de spécial. Oui, c'est le Super Bowl, mais aussi bien vous le dire tout de suite, Larry Fitzgerald n'a rien préparé pour l'occasion. Pas de petite danse, pas de célébration, rien.

De toute façon, ce ne serait pas son genre.

«La vérité, c'est que je ne sais pas vraiment danser, explique-t-il d'un ton embarrassé. Et puis, quand je marque un touché, je suis si épuisé que la seule chose que je veux vraiment faire, c'est de retourner au banc pour boire de l'eau!»