Au baseball comme dans plusieurs autres sports, les équipes sont impatientes de participer aux séries éliminatoires de fin de saison. Les Royals du West Island midget A seront toutefois privés des leurs en raison d’un oubli administratif de leurs entraîneurs. Au grand désespoir de ceux-ci.

Chaque année, les entraîneurs des équipes de baseball mineur doivent se plier à un certain nombre de règles dictées par la fédération provinciale, Baseball Québec.

Dans la catégorie qui nous intéresse, une de ces règles veut qu’au moins un entraîneur de chaque équipe suive une formation annuelle avant le 15 juin, sans quoi l’équipe sera privée de toute participation à un tournoi provincial, aux séries éliminatoires ou à un championnat régional ou provincial.

Alain Cloutier est l’entraîneur-chef des Royals du West Island. Voilà six ans qu’il est entraîneur bénévole au baseball mineur. L’année dernière, il a complété la formation annuelle à temps, permettant à son équipe de prendre part aux éliminatoires. Cette année toutefois, ça lui a échappé, comme à ses trois adjoints.

« On savait qu’on devait le faire ; je ne peux pas me plaindre qu’ils ont changé la règle, que ce n’était pas clair », reconnaît-il d’entrée de jeu.

Chaque année, les entraîneurs reçoivent des courriels leur rappelant qu’ils n’ont pas complété la formation. Sauf que l’entraîneur-chef des Royals affirme que les courriels ne se sont jamais rendus à lui. Encore au début de juillet, il discutait avec ses adjoints à savoir lequel d’entre eux ferait la formation… alors que la date butoir était passée depuis quelques semaines déjà.

Autrement dit, un manque de communication y est peut-être un peu pour quelque chose. Mais les quatre hommes ne se mettent pas la tête dans le sable : ils reconnaissent leur erreur.

Comme ça fait six ans qu’on entraîne, on connaît la règle. On a été négligents, on a été lents. Ça, c’est notre faute. Je le reconnais en premier.

Alain Cloutier, entraîneur-chef des Royals du West Island

Seulement voilà : à la mi-juillet, ils ont été avertis que la date butoir était passée et que leur équipe ne pourrait pas participer au tournoi prévu le 18 juillet, ni aux éliminatoires.

Des pistes de solution qui ne mènent à rien

Les quatre entraîneurs sont un peu tombés des nues en réalisant leur oubli. À ce moment, leur équipe comptabilisait 12 victoires et 2 défaites. Depuis six semaines maintenant, ils tentent de « trouver une façon de s’entendre » avec l’organisation du lac Saint-Louis.

Ils affirment avoir proposé différentes pistes de solution, notamment de trouver des entraîneurs remplaçants ou de simplement ajouter une formation au calendrier dont ils assumeraient les frais. Leur objectif est simple : permettre à leurs joueurs de participer aux séries éliminatoires, avec ou sans eux sur le banc.

« On est comme un poisson dans le fond de la chaloupe, déplore M. Cloutier. Il est trop tard, et on se bat. »

« Baseball Québec a une bonne réputation, je peux comprendre pourquoi. Ce sont les seuls qui demandent une formation continue ; je suis professeur, je ne peux pas être contre, c’est une bonne idée.

Moi, je dis : “Punissez-moi.” Dites-moi que je suis suspendu, que ce n’est pas moi qui vais coacher mon équipe dans les séries, et trouvez un entraîneur qui a la certification de cette année. Mais laissez les garçons jouer…

Alain Cloutier

Les séries doivent commencer dans quelques jours, le 25 août, mais il n’y a rien à faire, regrette-t-il.

« C’est nous qui avons le plus de blâme à prendre, mais on est encore incapables de se faire à l’idée que ce sont les joueurs qui paient le prix de ça », laisse-t-il tomber.

Baseball Québec se défend

Dans une discussion téléphonique avec La Presse, le directeur général de Baseball Québec, Maxime Lamarche, rappelle que ladite règle a été instaurée il y a quelques années et votée par les membres de Baseball Québec.

Il insiste sur le fait que de multiples rappels ont été envoyés aux équipes avant la date limite et mentionne au passage que M. Cloutier en a reçu un le 17 juin, alors que la date butoir avait été repoussée jusqu’au 25 juin.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Maxime Lamarche, directeur général de Baseball Québec

On devient, à un certain moment, insensibles à des situations comme celle décrite par le West Island.

Maxime Lamarche, directeur général de Baseball Québec

« Les formations sont tellement simples, surtout pour le récréatif, qu’on n’accepte plus [de se faire dire] : “je suis juste un bénévole, je n’ai pas le temps de faire cette formation-là”, ajoute-t-il. Si tu n’as pas le temps de la faire, avise ton association et elle va mettre un autre entraîneur à la place, qui lui va aller la prendre. C’est non négociable pour nous à ce niveau-là. »

Selon M. Lamarche, de telles situations arrivent « partout au Québec ». Sur 2098 équipes à travers la province, « 178 n’ont pas respecté la règle, donc environ 8 % ». Il réitère néanmoins qu’il comprend que « tout le monde fait des erreurs », précisant qu’il y a une part de justice dans tout ça pour tous ceux qui ont pris le temps de compléter la formation, peut-être à contrecœur.

Il arrive un certain moment où on ne peut pas faire la différence entre celui qui a fait une erreur de bonne foi, celui qui a fait une erreur de mauvaise foi, l’autre qui a essayé de tricher.

Maxime Lamarche

« On ne peut pas dire : on va tous les prendre un par un et essayer de voir dans leur face s’ils sont honnêtes ou pas. C’est pour ça qu’on se dote de règles, pour ne pas avoir à trancher si c’est correct pour telle personne ou pas correct pour telle personne. »

Le directeur général insiste sur l’importance de la responsabilisation des fautifs. « S’il y a tout le temps des portes de sortie, des solutions, on se ramasse à continuer cette roue-là de gens qui se disent qu’ils n’ont pas besoin d’être à leur affaire, de faire leurs choses à l’avance, de se préparer parce que ce n’est pas grave, [se disent que les organisations] vont le laisser passer, [qu’ils sont] juste une exception.

« On veut tellement ne pas en arriver à une conclusion poche qu’on vous envoie plein de rappels, de chances. C’est quand que tu dis : je laisse tomber et qu’ils s’arrangent avec les conséquences ? »

Maxime Lamarche rappelle d’ailleurs que les entraîneurs des Royals sont membres de la fédération depuis des années et donc qu’ils « savent déjà comment ça marche ».

Une solution

Concernant la solution proposée par les Royals de changer tout le personnel d’entraîneurs pour permettre aux jeunes de participer aux séries, M. Lamarche indique que « ça va complètement à l’encontre du principe de : tu prends une équipe en charge du début à la fin ».

La seule solution, indique-t-il, est d’accepter leur erreur et de proposer un changement de règle quand viendra le temps de la révision des règles du jeu de Baseball Québec, en septembre.

« Il faut que ces gens-là se responsabilisent et qu’ils disent : je l’ai échappé, mais on va travailler fort pour que la règle soit différente et que personne ne soit pénalisé l’année prochaine. Mais ce n’est pas à nous de changer ça pendant la saison, ça n’a pas de sens. Sinon, ça sert à quoi de mettre des règles en place ? »