Chaque semaine, les journalistes des Sports de La Presse répondent à une question dans le plaisir, et un peu aussi dans l’insolence

Appel à tous

Et vous, quel athlète de votre région natale vous remplit de fierté ?

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Katherine Harvey-Pinard

C’est bien connu : quand on demande à un habitant du Saguenay–Lac-Saint-Jean d’où il vient, il répond généralement « du Saguenay » ou « du Lac ». C’est comme ça. Pour cette raison, j’ai décidé de nommer aujourd’hui deux athlètes de ma belle grande région. Commençons par le Saguenay, où j’ai grandi. J’ai dit dans un précédent « Mauvaise conduite » que j’avais un attachement particulier au patinage de vitesse. Quand j’étais jeune, je vouais une grande admiration à Marc Gagnon. J’ai même conservé une photo de moi en train d’obtenir un autographe du Chicoutimien parue dans le journal local quand j’avais 8 ans. À ce jour, c’est encore l’athlète de chez nous qui me rend le plus fière, pour tout ce qu’il a fait sur la scène internationale et pour l’individu sympathique qu’il a toujours été et est encore aujourd’hui. Du côté du Lac-Saint-Jean, je dois y aller avec le Bleuet bionique. L’Almatois Mario Tremblay est une fierté régionale depuis de nombreuses années. Ai-je vraiment besoin de relater tout ce qu’il a accompli ?

Miguel Bujold

PHOTO MICHEL GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Éric Desjardins

Impossible pour moi de départager ces trois-là : Pierre Turgeon, Éric Desjardins et Stéphane Matteau. En fait, ces trois athlètes formaient en quelque sorte un trio. Ils ont connu de belles carrières dans la LNH après avoir grandi ensemble à Rouyn-Noranda. Ils faisaient même partie de la même équipe dans le midget AA au milieu des années 1980, les Citadelles de Rouyn. Alors enfant, j’allais voir leurs matchs contre les As de Noranda (c’était avant la fusion des deux villes en 1986), les Comètes d’Amos, les Conquérants de La Sarre et les ennemis jurés des Citadelles, les Apollos de Val-d’Or. Que de doux souvenirs. Desjardins a gagné la Coupe Stanley avec le CH en 1993 et est devenu le premier défenseur de l’histoire à réussir un tour du chapeau en finale. Il a aussi été le capitaine de mon club préféré, les Flyers (mon allégeance vacille...). Matteau a gagné la Coupe Stanley à son tour l’année suivante avec les Rangers. C’est lui qui avait marqué le but en prolongation du septième match contre les Devils en finale de l’Est. C’est également lui qui avait marqué le but qui m’avait permis de gagner 1700 $ avec une mise de 5 $ à Mise-o-jeu quelques mois plus tôt (c’est une histoire pour une autre fois). J’ai travaillé à son mariage comme serveur deux mois après la conquête des Rangers (non, je n’invente rien). Turgeon, lui, avait été le tout premier choix du repêchage de 1987, sélectionné par les Sabres. Il aurait probablement pu faire carrière au baseball et avait représenté le Canada lors des Séries mondiales des petites ligues à Williamsport, en Pennsylvanie, en 1982. Matteau aussi. Rouyn était passé bien près de vaincre Taiwan, qui avait gagné 10 des 13 Séries mondiales précédentes, en demi-finale. De bons athlètes, vous dites ?

Mathias Brunet

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Emmanuel Fernandez

Je suis né au carré Saint-Louis, à deux pas de la rue Prince-Arthur et du célèbre Café Cherrier. Le carré Saint-Louis a vu naître des poètes, des chanteuses, des politiciens, mais de grands athlètes ? Je n’en connais guère. Mais j’ai aussi grandi à Outremont au début de l’adolescence. À quelques pâtés de maison de l’immeuble où j’habitais se trouvait un jeune gardien de niveau atome qui rêvait à la LNH. J’étais un peu plus vieux que lui, mais nous partagions la même passion pour le hockey-bottine. Emmanuel Fernandez voulait faire carrière dans la Ligue nationale, je voulais devenir journaliste à La Presse. Je me rappelle son cran. Même à - 25 °C, même si la balle de plastique orange lui laissait de grosses traces rougeâtres sur les cuisses, il ne voulait jamais quitter son but. J’étais dans les gradins à l’aréna d’Outremont pour son premier match au niveau pee-wee, alors qu’il venait d’être rappelé en renfort malgré son jeune âge. C’est aussi avec lui que j’ai perdu ma première dent sur une patinoire extérieure, à un jet de pierre de l’aréna où nous jouons désormais ensemble dans une ligue de garage le jeudi. Je me souviendrai aussi toujours de ma première visite au Forum de Montréal. C’était avec lui. Chanceux, nous avions eu le droit de passer quelques instants dans le vestiaire. Il faut dire que « Manu » avait un oncle célèbre, Jacques Lemaire, l’entraîneur du Canadien. J’approchais pour la première fois mes idoles, j’étais tout remué de voir les Robinson, Lafleur et Gainey en chair et en os. Emmanuel Fernandez a accédé à la Ligue nationale plusieurs années plus tard. Il a joué pour Dallas, pour le Minnesota de son oncle Jacques et pour Boston. Le carré Saint-Louis peut être fier de Pauline Julien, Gaston Miron et Gérald Godin, moi aussi d’ailleurs, mais sur le plan du hockey, je suis pas mal fier de mon vieil ami Manu...

Nicholas Richard

PHOTO TIMOTHY T. LUDWIG, USA TODAY SPORTS

Jonathan Huberdeau

Saint-Jérôme a mis au monde l’un des meilleurs joueurs de la LNH, Jonathan Huberdeau, et on n’en est pas peu fiers. Actuellement parmi les trois meilleurs pointeurs de la ligue et certainement un prétendant sérieux au trophée Hart, Huberdeau demeure l’un des joueurs les plus sous-estimés de la LNH. Pas le plus volubile, pas le plus exubérant, mais certainement l’un des joueurs les plus polyvalents, efficaces et sympathiques du circuit. À l’image des Jérômiens... Ce qui est d’autant plus fascinant chez Huberdeau, c’est qu’il revient souvent dans son patelin, notamment pour rendre visite aux élèves de l’école secondaire Cap-Jeunesse, où il a étudié et où le programme de hockey a fait ses preuves. Dans le quartier, tout le monde connaît « Hubby ». Non seulement parce qu’il a remporté la Coupe Memorial, qu’il a été repêché au troisième rang au total, qu’il a mis la main sur le trophée Calder ou qu’il est devenu le meilleur pointeur de l’histoire des Panthers, mais aussi parce que les gens d’ici sont fiers de voir où il est rendu aujourd’hui. Il n’a jamais perdu de vue ses valeurs et il est resté le même garçon, de Saint-Jérôme à Sunrise.

Richard Labbé

PHOTO ARMAND TROTTIER, ARCHIVES LA PRESSE

Le gardien Richard Sévigny (au centre)

Richard Sévigny. J’ai su tout récemment – car il me l’a dit ! – que Richard Sévigny avait sauté sur les mêmes glaces que moi dans ma jeunesse, celles du quartier Rosemont à Montréal, en particulier à l’aréna Marquette. C’est extrêmement cool de réaliser qu’un gardien de la LNH, en plus un gagnant du trophée Vézina, a commencé sa carrière sur cette patinoire qui ne paie pas de mine, mais qui est un peu légendaire dans ma tête ; j’ai un fils gardien qui a commencé là, lui aussi, et ensuite, un fils défenseur qui a commencé au même endroit. De l’aréna Marquette à la Ligue nationale, c’est une très longue route, mais Richard Sévigny y est parvenu, en plus avec un formidable masque tout aussi aérodynamique que spectaculaire.

Simon-Olivier Lorange

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Maxime Talbot avec la Coupe Stanley à Saint-Bruno-de-Montarville

Il y a des villes qui sont des pépinières d’athlètes, amateurs comme professionnels. Saint-Bruno-de-Montarville, petite municipalité qui m’a vu grandir sur la Rive-Sud, n’en est pas une. Il y en a bien sûr quelques-uns qui se sont démarqués. Je lis dans l’hebdo local que deux Montarvilloises étaient aux Jeux olympiques de Tokyo, et je les en félicite. Mais cela demeure l’exception. Du côté du hockey, sport que je suis de près, il n’y a pas de vedette planétaire non plus. Le site Elite Prospects rapporte que c’est la ville d’origine de José Théodore, mais son nom y est rarement (voire jamais) associé. La plus grande fierté locale sera donc Maxime Talbot. C’est dans cette banlieue qu’il a joué au hockey mineur et qu’il est allé à l’école primaire. Surtout, c’est près du lac du Village qu’il a présenté la Coupe Stanley en 2009, indice assez significatif de l’attachement d’un joueur à son patelin. Après sa retraite et un passage dans les médias, le voilà aujourd’hui entraîneur adjoint dans la Ligue américaine. L’orgueil de Saint-Bruno pourrait donc rayonner de nouveau dans la LNH avant longtemps.

Guillaume Lefrançois

PHOTO ROBERT NADON, ARCHIVES LA PRESSE

Luc Robitaille

J’ai grandi à Montréal-Nord, et honnêtement, je ne peux pas me plaindre des infrastructures sportives. Il y avait trois arénas, dont un – l’aréna Garon – qui avait des gradins des deux côtés de la patinoire ! L’association de hockey mineur avait même le budget pour me fournir de l’équipement de gardien, qui n’était pas vraiment à notre portée financièrement. Bref, j’avais l’impression que les ressources étaient adéquates, mais pour une raison ou une autre, Montréal-Nord ne semblait pas produire des tonnes d’athlètes du plus haut niveau. La fierté de la ville semblait surtout résider dans son bas niveau d’endettement, grâce au très économe maire Yves Ryan. Mais il y en a un dont j’entendais souvent parler, et c’était Luc Robitaille. Bien honnêtement, j’ignore l’étendue de son œuvre à Montréal-Nord ; il a joué sa dernière saison pour les Angevins de Bourassa quand mon âge se comptait en mois, et est ensuite parti chez les Olympiques de Hull. La génération actuelle a toutefois pas mal plus de modèles, grâce notamment aux frères Mathieu et Pierre-Olivier Joseph, de même que Chris Boucher et Luguentz Dort.

Jean-François Tremblay

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Danny Desriveaux

Laval n’est pas seulement surnommée la « Prague de l’Amérique » pour son architecture médiévale unique, c’est aussi un terreau athlétique fertile. Parmi les plus grands athlètes de l’endroit, l’actuel entraîneur du Canadien Martin St-Louis, ou Jean Pascal, qui a appris son art à Laval-des-Rapides, ou celui qui a osé le 60 devant le filet, José Théodore, ou la multiple médaillée en plongeon Meaghan Benfeito. Mais « mon » athlète de Laval est Danny Desriveaux. Pourquoi ? Parce qu’il a fréquenté Marcel-Vaillancourt, comme moi, puis Saint-Maxime, comme moi. En fait, il a été dans ma classe pendant cinq ans. Alors j’ai toujours eu ce brin de fierté à le voir réussir tout ce qu’il a entrepris sur les terrains, où il a gagné trois fois la Coupe Grey avec les Alouettes et les Argonauts. Mais aussi dans sa vie professionnelle, sa vie personnelle et maintenant médiatique, puisqu’il est devenu un incontournable des diffusions du football à RDS. On a même travaillé ensemble l’année dernière avec ses capsules « Les mots justes » dans lesquelles il parlait de la réalité des athlètes noirs. Danny ne l’admettra jamais, mais j’étais meilleur que lui au football en secondaire II. Sauf qu’il aurait été malaisant que je me nomme moi-même dans cette rubrique, donc mon vote va à Danny, le deuxième meilleur joueur de football en secondaire II !