(OTTAWA) On s’excuse à ceux qui nous lisent au petit matin de vous réveiller avec ces noms, mais allons-y. Logan Shaw. Michael McCarron. Jacob de la Rose. Alex Galchenyuk.

Ce sont quelques-uns des noms qui composaient la ligne de centre du Canadien à la fin de l’hiver 2018, quand Jake Evans a fini son stage universitaire et s’est amené dans l’organisation du Tricolore. Même si Evans était un projet à long terme, la hiérarchie au centre faisait de Montréal une destination attrayante pour un jeune joueur qui souhaitait faire sa place.

Deux mois plus tard, le CH repêchait Jesperi Kotkaniemi. Quelques jours plus tôt, Marc Bergevin faisait l’acquisition de Max Domi, qui allait nous faire croire pendant un an qu’il était un centre. En septembre, Nick Suzuki s’amenait dans l’organisation, et Phillip Danault arrivait au camp en pleine santé. Plus tard, Nate Thompson s’amène pour un an.

Alors du trafic devant lui, Evans en a déjà vu. Et il s’est déjà faufilé. À voir comment il réagit depuis qu’Eric Staal est membre du Canadien, il ne semble pas exactement ébranlé cette fois-ci non plus. Jeudi, Evans a été un des acteurs principaux d’une autre convaincante victoire des Montréalais, un gain de 4-1 sur les Sénateurs.

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Paul Byron

« Tous les soirs, tu dois avoir la même approche. C’est un honneur pour moi d’enfiler ce chandail et je ne veux pas perdre cette chance, a mentionné Evans, en visioconférence. La pause a fait du bien. Tu ne peux pas trop penser à tous ces facteurs extérieurs. J’essaie juste de me concentrer sur mon travail. »

Evans l’a fait à merveille, son travail. Il a obtenu deux aides, dont une sur une magnifique passe à Paul Byron en désavantage numérique. Sa description du jeu a par ailleurs prouvé qu’on a devant nous un joueur qui veut d’abord accomplir la base de son travail — dans ce cas-ci, écouler une pénalité — avant de penser au reste.

« J’ai vu [Byron] à la dernière seconde. Je pensais surtout à écouler du temps, mais quand je l’ai vu, j’ai tenté ma chance et ça a fonctionné ! », a-t-il décrit. Dans une autre réponse, il rappellera qu’il a aussi « perdu son homme » à quelques reprises. Un éternel insatisfait, une qualité toujours appréciée des hommes de hockey.

Un rôle malgré tout ?

PHOTO MARC DESROSIERS, USA TODAY SPORTS

Brendan Gallagher (11) célèbre son but marqué en troisième période avec ses équipiers.

On ignore si c’était voulu, mais l’arrivée de Staal, combinée aux absences de Tyler Toffoli et de Joel Armia, a donné un électrochoc à des joueurs dont le statut sera menacé quand tout le monde sera en santé.

Byron et Artturi Lehkonen ont chacun trois points en deux matchs. Et Evans, après un creux de vague ces dernières semaines, semble revigoré par la pause.

S’il continue ainsi, le numéro 71 donnera davantage d’arguments à son entraîneur pour le garder dans la formation, même avec Staal aux commandes du quatrième trio. Ducharme l’a dit une première fois mardi et l’a répété après la victoire de jeudi : Evans peut jouer à l’aile. Un autre argument que Ducharme a répété : « Avec le calendrier condensé, on aura besoin de tout le monde. » Et Danault d’ajouter que « des blessures peuvent arriver n’importe quand ».

Ajoutons un autre facteur : Evans est droitier. Au hockey, il n’y a pas de Spike Owen ; des joueurs ambidextres, ça n’existe pas. Staal est gaucher, comme le sont Danault et Kotkaniemi. Le seul centre droitier est Suzuki, et sa performance de 20 % aux mises au jeu jeudi nous a rappelé que cet aspect du jeu demeure un de ses points faibles. Son taux de réussite est de 43,1 % cette saison.

Comme bien des entraîneurs, Ducharme considère les mises au jeu dans ses prises de décisions. Prenez quand il expliquait la présence, il y a quelques semaines, de Danault en avantage numérique, au sein de la même vague que Suzuki. « Ça nous donne une option de chaque côté », avait-il souligné.

Et puis, pour ce que ça vaut, revoyez comment les Sénateurs ont privé Jake Allen d’un jeu blanc en fin de match : en gagnant une mise à jeu à droite, contre le gaucher Danault.

Ne serait-ce que pour cette flexibilité, Evans pourrait demeurer fort utile à son équipe quand Staal arrivera en début de semaine prochaine.

En hausse : Jake Allen

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Jake Allen (34) se dresse devant un tir de Tim Stutzle (18)

Pas qu’il jouait mal à ses derniers départs, mais on devine qu’une séquence de six défaites de suite, ce n’est rien d’agréable. Voilà qui fera du bien à son moral.

En baisse : Victor Mete

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Alexander Romanov (27) et Victor Mete (53)

Le vrai bonnet d’âne de la soirée revient à Thomas Chabot, qui n’avait pas sa prestance habituelle. Mais chez le Tricolore, Mete a connu un début de match assez difficile. Il finit néanmoins la soirée à +2.

Le chiffre du match : 3

Le Canadien a réussi le rare exploit de marquer un but en désavantage numérique sur lequel trois attaquants ont obtenu un point. C’est que Lehkonen est venu donner un coup sur la rondelle pour permettre à Evans de la récupérer, puis de la passer à Byron, qui venait de remplacer Lehkonen.

Dans le détail

En attendant les buts

Il est souvent question, depuis l’automne 2019, d’un nouveau Jonathan Drouin, plus conscient de son jeu d’ensemble et davantage disposé à prêter main-forte en zone défensive. On en a justement eu un magnifique exemple en première période. Il a tenté une passe audacieuse dans le haut de la zone offensive vers Alexander Romanov, audacieuse parce que le Sénateur Colin White était directement dans la ligne de passe. White a ainsi amorcé ce qui aurait pu être un 3 contre 2, mais Drouin a pris ses jambes à son cou et a empêché le troisième homme, Connor Brown, de prendre ce qui aurait été un tir dangereux. Drouin a terminé son travail en séparant Artem Zub de la rondelle, évitant ainsi aux Ottaviens de la reprendre. Drouin aimerait certainement avoir plus que deux buts au compteur, mais il continue à amasser les points et à offrir des efforts vaillants comme celui mentionné ici.

Les six moins bonnes minutes

Si jamais la prochaine session vidéo des entraîneurs du CH prend le format « la fleur et le pot », on devine qu’ils ne chercheront pas bien longtemps pour trouver le pot. Il suffira d’aller voir les dernières minutes de la deuxième période, quand les Montréalais ont été incapables de générer quoi que ce soit en avantage numérique. Le jeu brouillon en zone neutre rappelait pratiquement les pires soirées montréalaises en prolongation. Le troisième essai, en fin de match, était un peu mieux, mais la présence du Tricolore en zone adverse a pris fin quand Jesperi Kotkaniemi a visé Tomas Tatar sans voir qu’il rentrait au banc parce qu’il avait perdu son casque. Résultat des courses : un seul tir en six minutes d’avantage numérique.

Des questions à Ottawa…

Il n’y a pas qu’à Montréal où on tape du pied quand un jeune est trop souvent laissé de côté. Il y avait beaucoup d’incompréhension à Ottawa, jeudi, quand il a été su que le troisième duo de défenseurs pour le match serait celui des colosses Josh Brown et Braydon Coburn, pendant que le prometteur Erik Brannstrom était laissé de côté. Brannstrom, il importe de le rappeler, était l’élément principal que les Sénateurs ont obtenu en échangeant à Vegas l’excellent Mark Stone. Le problème, c’est qu’il a encore des carences, ce qui est normal pour un arrière de 21 ans. Le Suédois a fait un séjour productif dans la Ligue américaine (8 points en 10 matchs), mais on juge que son sens du jeu collectif n’est pas à point. Cela dit, on peut comprendre les amateurs de s’interroger en voyant jouer Coburn, un vétéran de 36 ans, en dernière année de contrat, de même que Brown, qui joue généralement un rôle réduit quand il est en uniforme…

« Tout le monde est dévoué »

Il nous manque, mais une équipe avec une bonne culture trouve le moyen de gagner sans sa vedette. On respecte le système match après match. C’est ce qu’on fait en ce moment. Tout le monde est dévoué et c’est bon à voir.

Phillip Danault, au sujet des trois victoires de suite en l’absence de Tyler Toffoli

On se soutient très bien, nos gardiens sont fantastiques. On fait bien circuler la rondelle. On est bons offensivement. Mais ça commence défensivement, on tue les jeux et ça ne prend pas 3-4 passes avant de la sortir. Une passe et c’est fait.

Phillip Danault

J’ai joué derrière de très bonnes équipes par le passé et ce soir, je sentais que j’étais de retour derrière une de ces très bonnes équipes. On ne forçait rien, on était patient. Ça peut prendre du temps avant que les changements de Dom fassent effet. J’ai été témoin de quelques changements d’entraîneur, ça prend toujours quelques semaines.

Jake Allen

J’ai déjà eu des blanchissages que je ne méritais pas, d’autres que j’ai perdus à la fin. Le blanchissage perdu ne me dérange pas du tout.

Jake Allen

Ils sont affamés pour des points et on devrait l’être aussi. Ce ne fut pas notre meilleur effort, mais nous avons la chance de nous reprendre samedi et nous devrons apprendre de ce qui est survenu ce soir. Nous n’étions pas prêts, pour une raison obscure.

Chris Tierney

On a bien patiné dans les cinq premières minutes, mais moins ensuite. On a donné un but alors qu’on était en avantage numérique et c’est la dernière chose qu’on veut faire. On peut jouer mieux que ça.

Nick Paul

Propos recueillis par Richard Labbé et Guillaume Lefrançois, La Presse