Le ligandrol est une drogue. Une merde. Un raccourci qui permet d’augmenter la masse musculaire sans les effets secondaires des stéroïdes. Pas surprenant qu’il soit si populaire auprès des athlètes d’élite.

C’est cette cochonnerie qui a été dépistée cet été dans deux échantillons d’urine de Laurence Vincent-Lapointe.

Comment ça s’est retrouvé là ? Mystère. La canoéiste québécoise cherche toujours. Son entourage a évoqué des hypothèses plus ou moins crédibles. Un ustensile souillé. Un récipient d’eau contaminé. Les chances que ce soit ça ? Aussi élevées que celles de trouver la carte recrue de Wayne Gretzky dans la pile à 10 cennes au marché aux puces. Sachez que le ligandrol est rapidement évacué du corps. Que les échantillons ont été saisis à Montréal. Et qu’aucun autre athlète de son centre d’entraînement n’a subi de contrôle positif.

La réponse est forcément ailleurs.

Laurence Vincent-Lapointe et ses proches ont donc ciblé un autre coupable. Les suppléments alimentaires. Ces potions magiques qui promettent tout ce qu’un sportif de haut niveau souhaite entendre – et même plus.

Sont-elles légales ? Oui. Pour une bonne raison.

Elles n’ont généralement aucune vertu scientifique.

Peu importe. Laurence Vincent-Lapointe en prenait quand même. Le 20 août dernier, elle semblait convaincue qu’un supplément contaminé était la source de son contrôle positif. Tant mieux. C’est facile à prouver. Il faut juste tester les produits. 

J’avais demandé à son avocat, Me Adam Klevinas, si les analyses étaient déjà en cours.

« Les délais dans les laboratoires sont de 10 jours ouvrables. Laurence avait des suppléments avec elle en Europe. Elle en avait à Trois-Rivières. Il faut aussi trouver des suppléments scellés, de la même batch. Il faut tout mettre ça ensemble. »

Ce qui a été fait.

Les échantillons de suppléments ont été remis au réseau des Instituts nationaux du sport du Canada. Celui-ci a chargé un laboratoire, LGC, de mener les tests.

Les résultats viennent de tomber.

A-t-on trouvé des traces de ligandrol dans le lot #1716925 de la poudre de créatine de marque Precision ?

Non.

Dans le lot #20871 de l’huile de poisson NutraSea Omega 3 HP avec des capsules de vitamine D ?

Non.

Dans le lot #8109 de la PowerBar Beta-Alinine ?

Non.

Dans la gomme caféinée MEG à la menthe polaire ?

Non.

Dans celle à la menthe verte ?

Encore non.

Dans celle à la cannelle ?

Non plus.

Conclusion des Instituts nationaux du sport : les suppléments alimentaires consommés par Laurence Vincent-Lapointe n’étaient pas contaminés au ligandrol.

PHOTO FRANK AUGSTEIN, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Laurence Vincent-Lapointe 

C’est embêtant. Car dans les cas de dopage, l’athlète est présumé coupable jusqu’à preuve du contraire. Et là, la preuve commence à être difficile à monter.

J’ai appelé son équipe pour obtenir une réaction. C’est son avocat qui m’a rappelé. Me Adam Klevinas. Le même qui était à ses côtés lors de la conférence de presse du 20 août. Un expert en matière de dopage. Il était d’ailleurs employé de l’Agence mondiale antidopage jusqu’à l’année dernière.

« Je ne peux pas commenter. Nous sommes en train d’enquêter sur toutes les possibilités. » Mais il m’a confirmé que sa cliente a aussi commandé des tests. Sur les mêmes suppléments. À un laboratoire différent, certifié par l’AMA. Elle a reçu les résultats.

« Sont-ils les mêmes que ceux du Centre canadien d’éthique dans le sport ?

— Désolé, je ne peux pas répondre à cela pour le moment. »

Entre-temps, Laurence Vincent-Lapointe purge sa suspension. Elle n’a pas pu prendre part aux Championnats du monde. Sa participation aux Jeux de Tokyo, l’été prochain, est fortement compromise. 

Jusqu’à son contrôle positif, elle représentait le plus bel espoir de médaille olympique pour le Québec.

Maintenant, quelle est la prochaine étape ? Il y a trois scénarios possibles.

1. Un abandon des procédures

Improbable. Laurence Vincent-Lapointe continue de vouloir prouver qu’elle n’a pas ingéré le ligandrol de façon volontaire.

2. Une rencontre avec la Fédération internationale de canoë

C’était le plan A. Le mois dernier, Me Adam Klevinas avait évoqué la possibilité d’une audience – en personne ou à distance – à la mi-octobre. Or, la preuve est loin d’être complétée. Et elle ne le sera pas si rapidement, m’a-t-il dit. Une rencontre à la fin de novembre ou en décembre est plus plausible.

3. Une entente avec la Fédération

Ça, c’est nouveau. Ça n’a jamais été évoqué publiquement avant que Me Klevinas ne m’en parle, hier. « C’est une possibilité », a-t-il laissé tomber. Laurence Vincent-Lapointe pourrait s'entendre avec la Fédération internationale de canoë, qui adhère au code de l'Agence mondiale antidopage. Il cite le cas de la karatéka américaine Joane Orbon. Elle aussi s’est fait pincer avec du ligandrol. Selon Me Klevinas, cette athlète a trouvé un terrain d’entente avec les autorités antidopage. Une suspension de neuf mois plutôt que la sanction habituelle de quatre ans.

Comment ? En prouvant que le ligandrol s’est retrouvé dans son corps… grâce à un supplément contaminé.

Une preuve que Laurence Vincent-Lapointe n’a pas encore faite.

Et qui s’annonce maintenant très difficile.

Une coupe qui fera du bien

Elle est belle, cette Coupe des voyageurs remportée par l’Impact hier soir contre le Toronto FC. Belle, car amplement méritée. L’arbitre avait privé les Montréalais d’un penalty évident en deuxième demie. Les Torontois ont marqué dans les minutes suivantes. Le match a dû se régler en tirs de barrage. Puis un héros improbable s’est imposé. Le gardien réserviste Clément Diop. Un gars qui s’entraîne avec l’Impact depuis deux ans et qui n’a jamais eu la chance de jouer une seule minute en matchs de ligue. Il a réalisé deux arrêts magnifiques pendant la séance de tirs. Un moment magique. Son sourire lors de la remise du trophée a eu l’effet d’un baume sur la saison misérable de l’équipe. L’Impact est maintenant qualifié pour la Ligue des champions de la CONCACAF. Un miracle, considérant l’état dans lequel se trouvait le club il y a seulement huit jours.