Les organisateurs du marathon de Montréal aiment bien souligner que des athlètes des quatre coins du globe viennent disputer leur course, même du Nunavut! Mais ça n'a pas empêché les coureurs du Kenya, malgré une humidité étouffante, de dominer l'épreuve d'hier d'un bout à l'autre.

La 18e édition a ainsi couronné Lamech Mokono en 2:17, 07. Il s'agit d'un temps bien au-dessus de la marque symbolique des 2:15 qu'on souhaitait voir pulvérisée. Mais la chevauchée solitaire de Mokono, échappé victorieux d'un peloton décimé, n'avait rien de décevante.

Chez les femmes, la championne en titre polonaise Violetta Kryza a été détrônée. L'Éthiopienne Yeshi Esayyas a en effet bouclé les 42,2 kilomètres en 2:42,16, terminant première avec plus de quatre minutes d'avance.

Le tout s'est mis en branle sur le pont Jacques-Cartier vers 9h. La bruine qui donnait un air féérique au départ n'a pas découragé les quelque 1800 marathoniens levés de bonne heure. Davantage que la pluie, c'est le facteur humidex élevé qui a fait la vie dure aux coureurs. L'édition 2008 aura d'ailleurs été plus lente que la précédente: l'année dernière, 33 coureurs ont franchi le fil en moins de trois heures, contre seulement 23 cette année.

«Quand j'ai des coureurs à 2h10 sur papier et qu'ils courent en 2h17, c'est certain qu'il s'est passé quelque chose, a expliqué le directeur de l'événement, Bernard Arsenault. Après la course, les coureurs d'élite m'ont expliqué qu'à cause de l'humidité élevée, ils n'arrivaient pas à refroidir leur corps. Ils ont eu chaud!»

Mokono ne flanche pas

Mais ça n'a pas empêché, au coup de pistolet, une quinzaine de marathoniens de prendre les devants avec une cadence d'enfer. Déjà, au cinquième kilomètre, il n'en restera que huit: des Kényans, dont Lamech Mokono et le vainqueur de l'an dernier, Laban Moiben, et aussi deux Éthiopiens, un Américain et un Belge.

Le peloton est ainsi resté groupé jusqu'à la mi-parcours, quand le Kenyan Pius Korir a surpris tout le monde d'un sprint qui condamnait le reste de sa course: Korir voulait rafler les 500$ de prime au 21e kilomètre, ce qu'il a fait à 1:07,11.

Le seul assez fou pour le suivre a été Lamech Mokono. Laban Moiben, qui agissait en seigneur du peloton, a préféré rester en retrait, convaincu que les deux insurgés n'iraient pas bien loin. Il avait raison pour Pius Korir. Avec sa prime de mi-course en poche, l'athlète à bout de souffle s'est installé en fin de peloton. Mais Lamech Mokono, 27 ans, n'a pas flanché. Seul devant, il s'est retourné à quelques reprises pour constater que ses poursuivants se perdaient de plus en plus dans la bruine. Il a terminé sa chevauchée en solo au Stade olympique, avec 400 mètres d'avance et une bourse de 10 000$.

«Korir est allé vite à la moitié, il a gagné la prime, puis il s'est arrêté, a lancé le souriant Mokono après sa victoire. Moi, eh bien, j'ai juste continué de courir. Même si je me suis fait un petit claquage à une cuisse, et que l'humidité m'empêchait de respirer, je n'ai pas lâché.»

Laban Moiben (2:19,13 et deux centièmes) et un autre Kényan, Tefera Teklu (2 :19,13 et trois centièmes), se sont quant à eux livré un sprint de 150 mètres pour la seconde place. «La course était dure. La pluie n'a pas aidé et le parcours est difficile «, s'est lamenté le gagnant de 2007, Laban Moiben.

«Je ne sais pas si je reviendrai l'an prochain, a continué celui qui a remporté le marathon de Los Angeles au printemps. Ce parcours est trop dur, avec toutes ses montées.»

Sublime Esayyas

Chez les femmes, celle qui avait remporté les éditions 2006 et 2007 du marathon n'a pas pu renouveler l'exploit. Violetta Kryza a flanché au 29e kilomètre, laissant la voie libre à l'Éthiopienne Yeshi Esayyas.

«J'ai gagné le marathon deux fois déjà, et aujourd'hui je suis deuxième. C'est bon dans les circonstances, a dit Kryza en découvrant son talon pour montrer une énorme ampoule. J'ai eu très mal au pied, et l'eau dans mes souliers n'a pas aidé.»

Au chapitre de la participation, les organisateurs se disent satisfaits. Depuis 2003 et le retour du marathon de Montréal, on est passé de 2400 à 9000 coureurs (marathon, demi, 10 et 5 km). L'augmentation est notoire au demi-marathon, couru par plus de 3000 participants hier.

«Ce qui a nui au marathon de Montréal dans les années 90, c'est le manque de relève, a rappelé Bernard Arsenault. Ce qu'on a constaté hier, c'est que la relève est là, au marathon et au demi. Les gens ont envie de courir.»