Bob Gainey a souvent répété que la présence d'un dur à cuire n'était pas nécessaire au sein de sa formation.

Mais le DG du Canadien a vu en fin de saison et en séries éliminatoires des choses qui ne lui ont pas plu. «Nos jeunes joueurs de talent n'étaient pas connus en début de saison l'an dernier. Mais plus la saison avançait, plus l'adversaire les ciblait. En séries, on a réalisé que ni les arbitres ni les supériorités numériques ne permettaient de régler le problème»,

C'est pourquoi Gainey a pris la décision, hier, de mettre la main sur le plus redoutable dur à cuire de la LNH, Georges Laraque, devenu joueur autonome, en lui offrant un contrat de trois ans d'une valeur de 4,5 millions.

«Avec Bégin, Kostopoulos, Komisarek, O'Byrne et maintenant Laraque, on peut désormais jouer sur le même terrain que nos adversaires. Il va permettre à nos joueurs de se sentir plus à l'aise n'importe où sur la glace. Georges est un joueur local, peut-être le meilleur de la ligue dans son rôle, il va rendre notre équipe plus difficile à affronter», a-t-il dit hier en début de soirée lors d'un point de presse au Centre Bell.

Laraque, 6'3 et 243 livres, a déjà déclaré à une autre époque qu'il ne souhaitait pas jouer à Montréal mais les choses ont bien changé depuis. Il était fort enthousiaste, hier, en conférence téléphonique depuis sa résidence d'Edmonton.

«J'ai reçu beaucoup d'offres mais j'attendais que le Canadien appelle, a-t-il lancé d'entrée de jeu. Je suis content de rentrer à la maison; ma famille est ici, ma mère, ma soeur et mes proches vont pouvoir venir aux matchs, et le fait que l'équipe soit talentueuse est un boni. J'ai vraiment hâte que la saison commence. Quand je venais jouer au Centre Bell et que la toune de U2 commençait quand les joueurs sautaient sur la patinoire, j'en avais des frissons. Je me voyais déjà dans l'uniforme du Canadien. Je ne peux pas m'imaginer ce que ça sera avec le chandail du Canadien sur le dos...»

«Je voulais jouer ici»

Laraque a fait connaître clairement ses intentions récemment. «J'ai déclaré à un gars des médias que je voulais jouer ici puis Bob Gainey m'a téléphoné hier après-midi (mercredi), puis j'ai parlé à Guy Carbonneau, et tout s'est passé très vite par la suite. Il n'y a pas de secret. C'est une jeune équipe qui a du talent, je sais ce qu'on attend de moi ici. Un autre élément qui m'a incité à venir, c'est le commentaire de Carbonneau qui avait déjà dit qu'il ne voulait pas de dur à cuire à moins que ça soit quelqu'un qui puisse jouer au hockey, et il m'avait cité. J'avais apprécié ce qu'il avait dit.»

En 2003, Laraque avait déclenché une petite controverse en écrivant dans sa chronique sur RDS.ca qu'il ne voudrait jamais se joindre au Canadien en raison de la pression médiatique. Deux ans plus tard, il assouplissait sa position en affirmant qu'il ne dirait plus non au Canadien.

«Quand j'ai dit ça la première fois, j'étais en début de carrière et je trouvais ça déjà assez difficile de percer dans la Ligue nationale sans avoir en plus à vivre avec la pression médiatique, surtout pour un francophone à Montréal. Mais les choses ont changé. J'ai gagné en maturité. J'ai appris à composer avec les médias. Je suis mieux équipé aujourd'hui pour vivre cette expérience. Et je suis content d'arriver à Montréal au sommet de ma carrière pour être en mesure de montrer ce dont je suis capable. J'étais prêt à venir jouer ici il y a deux ans après avoir perdu en finale contre la Caroline avec les Oilers. Mais le Canadien ne m'a jamais téléphoné et j'ai signé avec Phoenix.»

Pas un mauvais joueur

Laraque affirme que l'équipe avait besoin d'un joueur comme lui. «Steve Bégin et Maxim Lapierre sont des gars intenses, mais ce ne sont pas des poids lourds. Un gars comme moi va leur permettre de continuer à déranger sans se faire défier ou recevoir des gants dans la face. Un gars comme Komisarek ne devrait jamais avoir à se battre. Ma présence ici va lui enlever de la pression. Le club ne devrait pas avoir à le perdre pendant cinq minutes au banc des punitions parce qu'il a dû défendre un coéquipier. Quand je jouais contre le Canadien, je pouvais me permettre certaines libertés. Je me rappelle d'une fois contre Francis Bouillon où j'y avais été fort parce que je savais que personne ne viendrait me demander des comptes. Jouer contre le Canadien, c'était comme une soirée facile, et j'en tirais profit.»

Contrairement à plusieurs pacificateurs de la LNH, Laraque ne se débrouille pas trop mal comme hockeyeur. Il a déjà connu une saison de 13 buts, en début de carrière à Edmonton, et il protège bien la rondelle le long des bandes. Il pouvait jouer en moyenne une dizaine de minutes par match à Pittsburgh, ce qui n'est pas banal pour un dur à cuire. «Mon rôle numéro un est de défendre mes coéquipiers mais je peux participer à la feuille de pointage à l'occasion et être responsable dans les deux sens de la patinoire.»

Gainey lui reconnaît des qualités autres que pugilistiques. «J'aime sa maturité, sa façon de contribuer à l'amélioration d'une équipe. Je l'ai vu jouer souvent à Edmonton et je sais qu'il peut jouer en séries.»