Course de bruits et de fureur, le 110 m haies, attendu par 1,3 milliard de Chinois, a rendu son premier verdict inattendu avec le forfait du champion olympique et du monde Liu Xiang, dont la rumeur s'était propagée toute la matinée dans les entrailles du Nid d'oiseau.

Champion du monde en 2005, le Français Ladji Doucouré a été le confident de ce drame en coulisses.

«Je le savais avant la course. Dans la salle d'échauffement, j'ai demandé à Liu que je n'avais pas vu depuis longtemps, dans mon anglais un peu bizarre, "comment ça va". Il m'a dit qu'il avait un problème à un tendon (d'Achille). Il m'a quand même souhaité "bon championnat"», a expliqué Doucouré, 2e de sa série.

L'«athlète volant» a tenté d'inverser le cours du destin en se présentant au départ. Mais, il s'est relevé après un faux départ et a repris le chemin des vestiaires en boitant. Il grimaçait déjà et se tenait la cheville droite au moment de chausser ses pointes.

«Je suis triste pour lui mais ça aurait pu m'arriver. C'est le piège des courses du matin. Mais la course continue», a estimé Doucouré, témoin d'autres drames dans le ventre du Stade olympique.

Contraste total que cette catastrophe d'un athlète chéri par tout un pays et un sourire bon enfant de Doucouré, qui répond à la presse en regardant l'écran de télévision débitant tristement ses images.

Lui aussi est passé par des moments difficiles ces deux dernières années. Les haies sont une école de la vie.

Drames en série

Et Ladji suit sur les écrans d'autres drames, dans la 5e série, avec le forfait du Letton Stansilavs Olijars, champion d'Europe, et surtout la blessure de l'Américain Terrence Trammell. Pour le double vice-champion olympique, victime d'un claquage, les Jeux auront duré une haie et demie.

Quelques-uns de ces principaux adversaires à terre, Doucouré a la décence d'éluder l'inévitable question sur ses chances de podium qui augmentent. «Non , et puis ça peut m'arriver», dit-il

Facile vainqueur de la 1re série, le Cubain Dayron Robles, détenteur du record du monde (12.87), a anticipé tous ces drames et l'agitation qui remue le ventre du stade comme autant de diables. Sculptural, le crack de Guantanamo, justaucorps baissé sur la taille, est apparu détendu, hilare.

«Parfait. Tranquille. Tout est parfait: le stade, le public, l'organisation. Le record? Oui, la piste est rapide. Vous avez vu Bolt», champion olympique du 100 m avec record du monde à la clé (9.69), a-t-il débité, dans son habituel style télégraphique.

Avant de lâcher, déjà ailleurs. «Non, 1,3 milliard de Chinois, ça ne me préoccupe pas». Il ne savait pas encore que le match tant attendu n'aurait pas lieu et que le nombre ne fait pas la valeur.