La dernière nouveauté des jeunes Britanniques qui veulent jouer aux durs dans les quartiers pauvres? Un chien agressif, dressé pour intimider, qu'ils utilisent comme une arme. Une tendance qui inquiète au pays du bulldog.

«Si je suis avec mon chien, je ne risque rien», assure Tim. Pas difficile à croire. Son bullmastiff n'a peut-être que 6 mois, mais il n'a rien d'un caniche.

Suspendu à une branche par les crocs, Shaw est essentiellement une boule de muscles qui grogne et jappe. Le poil ras, la mâchoire imposante et pourvu d'une grosse chaîne métallique en guise de collier, Shaw est peut-être le meilleur ami de l'homme, mais il pourrait facilement devenir son pire ennemi.

«Plein de gens en ont peur, mais c'est un bon compagnon», soutient son propriétaire, caché derrière des lunettes de soleil. Âgé de 19 ans, Tim fait parti d'un nombre toujours grandissant de jeunes Britanniques qui se baladent avec des chiens imposants.

Si Tim affirme tenir son bullmastiff bien en laisse, il reconnaît du même souffle que nombre de jeunes s'en servent pour impressionner. «Il y a beaucoup de pitbulls dans le coin et j'ai déjà vu leurs maîtres s'en servir pour intimider», admet-il.

Aux prises avec un problème de chiens agressifs, l'arrondissement de Southwark, dans le centre-sud de Londres, a récemment commandé une étude sur le sujet. Sa conclusion? «Les chiens sont devenus l'arme de choix pour un nombre grandissant de délinquants.»

Ces derniers se servent de leurs molosses pour menacer des gens et les forcer à leur remettre leur argent ou leur cellulaire. Nombre de petits revendeurs de drogue se promènent également avec des chiens agressifs dans l'espoir que ceux-ci découragent les policiers de s'approcher trop près.

En 2007, près de 3800 personnes ont été admises aux urgences après avoir été attaquées par des chiens, en Angleterre. Il s'agit d'une augmentation de plus de 40% en quatre ans.

La police est évidemment bien au fait du problème. Entre 2003 et 2006, elle saisissait en moyenne 38 chiens par année à Londres. En 2007, elle en a saisi 480. Sans surprise, 80% des chiens confisqués étaient de type pitbull (staffordshire bullterrier, bullmastiff, etc.).

«Ces statistiques confirment ce que le public, nos inspecteurs et notre hôpital vétérinaire nous disaient: il y a un véritable problème actuellement avec des gens qui utilisent leurs chiens de manière agressive ou pour des combats», déplore Tim Wass, de la Société protectrice des animaux (RSPCA).

Combats illégaux

Alan Jones en sait quelque chose. Chaque jour, il promène son chien Max - un pitbull docile - dans le parc Weaver, dans l'est de Londres. Et il ne peut s'empêcher de noter la présence de jeunes avec des chiens dangereux. «C'est un peu triste à voir, critique le grand gaillard. Ce sont des jeunes qui cherchent à se prouver et ils élèvent leurs chiens pour qu'ils se battent. Ils s'en servent comme d'une arme, pour intimider.»

Les combats illégaux de chiens - populaires au cours des années 70 et 80 au Royaume-Uni - connaissent ainsi un regain de popularité. Alors qu'ils étaient relativement organisés dans le passé, aujourd'hui, ils sont plutôt improvisés dans des coins de parcs ou des recoins d'HLM. En 2004, la RSPCA a reçu 24 appels concernant des combats de chiens contre 358, l'an dernier.

Quatre types de chiens sont bannis au Royaume-Uni (pitbull terrier, dogue argentin, tosa japonais et fila brasiliero). La RSPCA assure que le problème ne vient pas du type de chiens, mais de leurs propriétaires.

«Dans la très grande majorité des cas, c'est le propriétaire qui est la cause du problème, pas le chien. Tous les types peuvent être dressés pour être agressifs, comme tous les types de chiens peuvent être de charmants animaux de compagnie», précise Tim Wass.