Dans son nouveau livre Bougez ! Pour un cerveau en santé, l’ex-enseignant en éducation physique Richard Chevalier explique tous les bienfaits « cérébraux » de l’exercice. La bonne nouvelle ? Nul besoin d’être un marathonien pour avoir une meilleure santé mentale et cognitive. Entrevue avec l’auteur.

Q. Vous avez commencé à enseigner l’éducation physique en 1969. En 50 ans, est-ce que les connaissances sur les bienfaits de l’exercice ont beaucoup évolué ?

R. Ça a complètement explosé. En faisant le recensement de toutes les grandes études sur l’exercice et le cerveau, j’ai été surpris de constater à quel point il y en avait. La quantité est phénoménale ! Ça a commencé il y a une trentaine d’années, mais depuis une quinzaine d’années, il y a une flopée d’études sur les bienfaits cérébraux de l’exercice.

Q. Quelle quantité d’exercice faut-il faire pour en ressentir des bienfaits sur le cerveau ?

R. La beauté, c’est que ça n’en prend pas beaucoup. Vingt minutes de marche rapide – ou mieux, trente minutes –, c’est assez pour nous rendre plus calmes et de meilleure humeur. Ça rend aussi le cerveau plus alerte. De belles études ont été faites chez les enfants et les adolescents à qui on a fait faire 20 minutes d’exercice modéré. Chaque fois, on s’est aperçu que les enfants qui ont fait de l’exercice ont une meilleure concentration et de meilleurs résultats à des tests psychométriques. C’est la même chose chez les personnes plus âgées, pourvu que l’exercice soit modéré.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Richard Chevalier

Q. Qu’est-ce que c’est, un exercice modéré ?

R. Dans la zone modérée, on est capable de parler quasiment normalement, mais chanter devient plus difficile. On respire un petit peu plus vite, on peut ressentir aussi un peu de chaleur. C’est accessible à tout le monde.

Q. Comment explique-t-on ces effets immédiats de l’exercice sur l’humeur, l’anxiété, la concentration, la mémoire ?

R. On dit souvent que Platon et Aristote aimaient marcher pour réfléchir. Ça leur faisait du bien, ça les aidait à réfléchir, mais physiologiquement, ils ne savaient pas ce qui se passait. Aujourd’hui, on le sait : un exercice à intensité modérée qui dure 20, 30 minutes provoque un afflux de molécules dans le cerveau, que j’aime appeler les molécules joyeuses. Ce sont des neurotransmetteurs comme la sérotonine, la dopamine et le GABA. Ça agit sur l’humeur, ça nous calme, ça allume notre cerveau et ça améliore notre concentration.

Q. Quand on fait de l’exercice régulièrement, qu’est-ce qu’on peut en retirer de plus ?

R. Les effets sont magnifiques. D’abord, une personne physiquement active va mieux résister aux situations stressantes de la vie de tous les jours et va récupérer plus rapidement qu’une personne sédentaire. L’exercice rend prédominant le système parasympathique – celui qui nous calme – sur le système sympathique – celui qui nous excite. C’est aussi un antidépresseur naturel : ça réduit le risque de faire une dépression, et pour la personne qui souffre de dépression, c’est un traitement d’appoint qui aide à s’en sortir plus rapidement.

Q. L’exercice peut même jouer un rôle dans la prévention de maladies dégénératives, comme la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson…

R. Oui. C’est bien connu que l’exercice modifie le tissu musculaire, qu’il renforce les os, le cœur… Mais ce qu’on ne savait pas jusqu’à il y a peut-être une quinzaine d’années, c’est que l’exercice remodèle aussi le cerveau. Il fait entre autres grossir une composante du cerveau qu’on appelle l’hippocampe, qui est le siège de la mémoire et de l’orientation spatiale. L’exercice a aussi un effet sur le cortex préfrontal où se trouvent la réflexion, la prise de décision et la concentration. Si l’exercice protège nos fonctions cognitives et remodèle notre cerveau pour le mieux, c’est sûr qu’il va nous protéger contre des maladies neurodégénératives.

Q. Vous écrivez que l’exercice est probablement le facteur neuroprotecteur le plus puissant. Vous qui avez enseigné l’éducation physique pendant 30 ans, comment expliquez-vous que tant de personnes soient sédentaires ?

R. L’environnement technologique ne favorise pas l’exercice. Le bras électronique est omniprésent. C’est très facile de passer la journée assis pendant huit heures, encore plus avec la pandémie.

Q. Quels sont vos conseils pour se motiver à bouger ?

R. Beaucoup de personnes s’imaginent qu’il faut en faire beaucoup, mais on sait maintenant qu’une simple petite marche de 10 minutes, c’est déjà bon. L’important, c’est de se mettre en mouvement. La recherche a aussi démontré que, lorsqu’on fractionne 30 minutes d’exercice en trois tranches de 10 minutes, les effets sont cumulatifs.

Q. Outre la marche, y a-t-il d’autres types d’exercices à préconiser ?

R. Je parle de la marche, parce que c’est l’exercice le plus accessible, mais il y a aussi beaucoup d’études sur les exercices aérobiques, le jogging, le vélo, la natation… Il y a aussi les activités à habiletés ouvertes, comme le badminton et le tennis, qui font appel à plusieurs zones du cerveau. Pour avoir le maximum d’effets sur le cerveau, les meilleurs exercices, ce sont les exercices de cardio.

Bougez ! Pour un cerveau en santé

Bougez ! Pour un cerveau en santé

Éditions La Presse

256 pages