Après avoir réalisé son propre album de chansons et lancé son site de bien-être, l’animatrice Julie Bélanger coche un autre projet sur sa liste de vie : écrire un livre. Dans Être bien, qui se veut un réconfort en temps de crise, elle se révèle sans retouches et sans filtres. Non sans un léger vertige. C’est le prix d’une authenticité à laquelle elle aspire sans compromis.

Être bien donne l’impression de feuilleter un journal intime. Pourquoi avoir eu envie de dévoiler tes prises de conscience ou tes états d’âme ?

Le sujet s’est imposé avec la dépression d’un de mes proches [qui a aussi été à l’origine du lancement de son blogue Être bien, il y a quatre ans]. Communiquer a été ma façon d’agir. J’ai eu envie de faire partager tous les outils que j’ai découverts dans mon propre cheminement lors de mon burnout [à 33 ans]. Ça passe par des thèmes qui, oui, sont très personnels. Et en même temps, je me dis que plus on est dans l’intime, plus les gens peuvent se reconnaître. On passe tous par des bouts plus tough. Autre raison, je n’ai pas d’enfant à qui transmettre mes valeurs et mes façons de voir la vie. Pour moi, ça passe par l’écriture et si ce legs très humble peut aider, tant mieux. J’ai aussi une pensée pour ma filleule, Emma, qui aura ce livre, si un jour elle veut savoir qui est sa tante Julie, profondément.

Parler d’hygiène mentale est devenu ce que tu appelles « ta mission de cœur ». Quelle est ta propre hygiène pour être bien ?

C’est un paquet d’affaires. Des petits gestes aussi insignifiants que de prendre du temps pour moi, de mettre mes limites. Ça peut passer par l’entraînement, qui me fait un bien fou, parler aux gens que j’aime ou allumer des chandelles juste pour moi. Ce sont des petites choses que je m’autorise sans me sentir coupable et pour savourer un peu plus la vie. Ça ne veut pas dire que j’y arrive tout le temps, par contre. Il y a des jours où je suis dans l’anxiété, je bougonne et j’ai le réflexe de sortir le fouet plutôt que la caresse. Mais ma quête, c’est vraiment ça : apprendre à me connaître et à m’assumer pleinement pour être bien aussi souvent que possible.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Julie Bélanger

Ce livre semble en être un de bilans. L’âge participe-t-il à une remise en question ? Es-tu en crise de la quarantaine, finalement ?

[Rires] En crise ? Je ne pense pas. Mais dans la partie plus assumée de la quarantaine, oui. J’ai 46 ans, ça fait partie du cheminement. Je n’aurais jamais pu sortir ce livre il y a 10 ans. Je n’avais pas les outils. Je n’avais pas encore craqué. Cette dépression a été le tournant dans ma vie. Avant ça, j’étais dans mes vieux réflexes de performance et de perfectionnisme à outrance. Je n’aurais pas pu tougher ça toute ma vie. J’ai passé ma jeunesse à vouloir plaire, à vouloir être invisible, à ne pas vouloir attirer l’attention. Alors de sortir ce livre et de dire « voilà qui je suis », c’est l’ultime étape d’assumer pour moi. C’est immensément libérateur.

Plus ça va, et plus je tends vers cette vulnérabilité. Je trouve que la vraie force, c’est d’être complètement soi et de l’assumer.

Julie Bélanger

Il y a une dualité chez toi : on te découvre timide et frondeuse, contemplative et hyper-performante, peureuse et audacieuse… Es-tu difficile à saisir ?

Peut-être que je suis difficile à mettre dans une case, en effet, mais je ne hais pas ça. J’aime me sentir libre. J’ai sorti un album il y a six ans. Pas pour faire une carrière de chanteuse, mais parce que la musique fait partie de moi. Mais après avoir foncé, j’ai toujours un moment de panique. Je suis entre deux pôles : intense dans l’action et les projets ; intense quand je veux déconnecter et qu’on me sacre patience. Je trouve mon équilibre dans ces extrêmes. Tout ça fait partie de moi. Je pense qu’on est beaucoup plus que juste un rôle dans la vie. Avec le temps, justement, j’accepte davantage ces nuances-là, même si ça peut parfois déranger.

Tu dis avoir longtemps voulu être dans l’ombre. Or, ton métier t’impose de vivre dans la lumière. Est-ce difficile pour toi ?

J’ai décidé d’accepter ce qui venait avec ce métier parce que ça me faisait vibrer, mais j’essaie toujours de mettre la lumière sur les autres, d’où mon rôle d’animatrice. Et je suis comme ça dans ma vie personnelle aussi. Quand l’album est sorti, ça m’a terrorisé d’être sous les projecteurs. Mais pour la sortie de ce livre, je suis dans le bonheur et la joie. Avec les réseaux sociaux, ça fait longtemps que j’ai découvert qu’on ne peut pas faire l’unanimité. Je n’aime pas tout le monde non plus. Ça va dans les deux sens. Ça m’aide à dédramatiser et à lâcher prise là-dessus. Tu fais de ton mieux pour que ça marche et, après, advienne que pourra.

En tant qu’anxieuse, comment vis-tu cette pandémie ?

Au printemps, comme tout le monde, j’ai trouvé ça difficile. Ce qui me ramenait, c’était des choses très simples : aller marcher au bord de l’eau avec mon chien, par exemple. Mais là, ça va mieux. Il y a quelque chose de plus doux dans cette deuxième vague. Un cocooning qui fait du bien, une forme d’acceptation de l’incertitude. On vit un exercice planétaire de lâcher-prise. Tout ce qu’on peut contrôler, c’est notre petite personne et nos réactions. J’essaie vraiment toujours de me ramener à ça : cultiver mes petits plaisirs, cultiver la joie. Je trouve d’ailleurs que c’est le plus beau des sentiments. Il y a quelque chose de puissant là-dedans.

Tu écris : « J’ai hâte de découvrir l’autre partie de ma lune. » Comment imagines-tu cette deuxième phase de ta vie ?

Je vois deux mots-clés pour la suite : force et liberté. Je veux continuer à créer parce que j’ai vraiment besoin de projets. Ça me stimule et ça me nourrit. Je suis rendue à savourer et à explorer ce que je peux faire. L’anxiété, la fragilité et les doutes, je veux donc que ça fasse partie du passé ! Je sais que je ne suis jamais à l’abri d’un autre épisode, mais il y a une confiance qui s’installe avec le temps qui me plaît beaucoup. Longtemps, j’ai eu envie de mettre mon dimmer à low. Là, il est à high et je ne le baisserai pour personne !

Être bien, Julie Bélanger, les Éditions Cardinal, 2020, 156 pages

PHOTO FOURNIE PAR LES ÉDITIONS CARDINAL

Être bien, par Julie Bélanger