Que restera-t-il de nos nouveaux comportements en mode et en beauté ? Une fois la pandémie terminée, nous séparerons-nous de nos survêtements ? Remettrons-nous à nouveau robes, jupes étroites et talons hauts ? Les experts ont répondu à nos questions.

Marie-Ève Faust, directrice et professeure à l’École supérieure de mode ESG UQAM, fait d’abord un rappel historique. Elle souligne que les femmes, à l’époque de l’après-guerre, ont opté pour le New Look de Christian Dior et ont adopté, dès 1947, la nouvelle silhouette très gracieuse avec la taille cintrée et les jupes amples. « En d’autres mots, soit les femmes remettent à nouveau leurs talons hauts et leurs jupes droites ou alors elles y renoncent et gardent leur style décontracté. En tout cas, on va réfléchir à notre comportement vestimentaire », analyse la professeure.

Elle ajoute qu’avant la pandémie, il y avait déjà une tendance vers le confort et vers ce qu’on appelle le casual chic. À voir si cela perdurera.

Richard Simons, vice-président aux achats chez Simons, croit que ce changement est temporaire. « Actuellement, les consommateurs adaptent leur garde-robe à leurs besoins, mais le goût du style reste, remarque-t-il. Déjà, pendant l’été, on a senti le désir d’acheter une belle robe et de bien s’habiller, alors je crois que ça va revenir, tout comme le goût pour les sorties, les restaurants et les voyages. La seule question, c’est quand ? Juin ? Juillet ? Un peu plus tard ? »

PHOTO PASCAL RATTHÉ, ARCHIVES LE SOLEIL

Richard Simons, vice-président aux achats chez Simons

Le vice-président d’Aldo, Andrew Vieira, estime que de nombreuses femmes cherchent encore des raisons de s’habiller chic.

Qu’il s’agisse de se mettre en valeur pour un cocktail virtuel avec des amis ou de se glisser dans des bottes à talons pour faire des courses, les femmes sont toujours à la recherche de ce lien émotionnel avec les talons hauts. Nous ne pensons pas que cela va disparaître.

Andrew Vieira, vice-président d’Aldo

« La chaussure est un accessoire qui nous définit. En ce moment, elle est inexistante, car on ne porte pas nos escarpins à la maison ni devant notre ordinateur ! », lance Marie-Ève Faust. La professeure va plus loin : « Notre pied va-t-il changer de forme parce qu’on ne porte plus de talons, voire plus de chaussures du tout à la maison ? », s’interroge-t-elle.

Du côté de la beauté, on prévoit le retour du maquillage.

« Selon la société d’études de marché Mintel, près de 86 % des femmes qui ont réduit leur utilisation du maquillage prévoient retourner à leur routine d’avant, une fois la pandémie terminée. Par contre, la situation économique précaire risque d’avoir une incidence sur les dépenses dans ce domaine », affirme Marie-Krystine Morin, directrice marketing, Prestige, du Groupe Marcelle. Pour ce qui est des soins, elle pense que les nouvelles habitudes resteront. « La pandémie a mis en valeur l’importance de prendre soin de sa santé, et la santé de la peau en fait partie. »

Ali Fakih, directeur général de L’Oréal Paris au Canada, croit que les consommatrices garderont la routine beauté découverte pendant la pandémie. « En matière de soins pour le visage et pour les cheveux, on voit qu’on peut se les faire à la maison et qu’il y a de beaux résultats, alors je pense que ça va rester. »

« On a le sentiment qu’on va retrouver un esprit d’après-guerre quand les gens vont recommencer à sortir. Tout ne va pas changer radicalement, mais il va y avoir un nouvel engouement pour le rouge à lèvres, le maquillage, pour sortir, s’habiller, aller au restaurant », estime Carl D. Morisset, directeur général, designers internationaux, comme Valentino et Yves Saint Laurent.