L'arrondissement de Ville-Marie a modifié, cette année, certains paramètres de hauteur et de densité pour autoriser la construction d'immeubles plus hauts dans certains secteurs au pourtour du centre des affaires qui gagnerait à être densifié. Parallèlement, il a limité ailleurs les hauteurs pour protéger la vue sur la ville et le mont Royal.

Le Cadre de révision des hauteurs et densités du centre-ville a été soumis à la consultation publique avant d'être adopté. L'exercice permettra de donner un nouveau souffle à certains terrains vagues et terrains de stationnement, en les rendant plus intéressants aux yeux des promoteurs, explique Marc Labelle, directeur de l'aménagement urbain et des services aux entreprises de l'arrondissement.

«La révision des hauteurs n'a eu aucune incidence sur les projets actuellement en cours, qui avaient déjà tous été adoptés, précise-t-il. Les premiers effets devraient se faire sentir au printemps 2013. On pourrait alors peut-être voir des projets d'immeubles de plus de 50 étages, mais c'est difficile à prévoir.»

Selon lui, le moment était propice, cette année, pour réviser certaines hauteurs et soutenir ainsi le dynamisme du marché immobilier, notamment dans le secteur résidentiel.

«On n'a pas connu une telle effervescence depuis 1976, avec les Jeux olympiques», souligne-t-il.

Avec la révision du cadre des hauteurs et densités, 13 500 logements et 750 000 m2 de bureaux pourraient potentiellement être construits dans le centre des affaires et son pourtour immédiat, estime l'arrondissement.

Tuer la poule aux oeufs d'or

C'est avec appréhension que Dinu Bumbaru, directeur des politiques d'Héritage Montréal, entrevoit la hausse accentuée de la construction d'immeubles en hauteur au centre-ville sans pouvoir en visualiser les effets réels sur le paysage montréalais. Il y a lieu de se questionner, croit-il.

«C'est formidable qu'il y ait un tel dynamisme à Montréal, mais est-ce que quelqu'un a une vue d'ensemble, autre que quantitative, pour rechercher une certaine harmonie? demande-t-il. Quand il y a un chef d'orchestre, tout le monde ne se comporte pas en soliste. Or, le centre-ville n'est pas juste un terrain de jeu pour les promoteurs et les collecteurs de taxes. Il y a un attachement au centre-ville un peu insaisissable. C'est notre poule aux oeufs d'or. Il ne faudrait pas le détruire en cherchant à trop en faire.»

Une muraille de tours ne créera pas une belle entrée de ville, estime-t-il. «La construction de tours avec chacune leur look différent est un peu cacophonique et on risque de perdre les vues essentielles à la personnalité de Montréal. Il faudrait, par exemple, que la Place Ville-Marie et la Tour IBM Marathon demeurent visuellement dominantes.»

Il aimerait un peu plus de planification pour avoir le sentiment que tous profiteront de la construction des nouveaux immeubles. «Les grandes tours ne sont pas toujours des succès au niveau de la rue, créant souvent des tourbillons de vent, la perte de l'ensoleillement et des microclimats très désagréables, précise-t-il. Il y a un effet cumulatif qu'il faut évaluer. Les commerces au rez-de-chaussée, quant à eux, représentent un beau potentiel pour soutenir la vie de quartier. Mais il faut aussi anticiper quelle sera la nouvelle réalité des gens qui vont habiter ces édifices. Vont-ils participer à l'amélioration de la vie urbaine ou s'agira-t-il plutôt d'investisseurs qui n'y résideront pas? Il y a plein d'avantages à construire des tours au centre-ville, mais c'est peut-être illusoire si personne n'y habite!»