Nicolas Demers habite dans une maison du XVIIIe siècle avec Marie-Michèle Garneau et leurs deux bambins. Il veut quitter cette propriété que ses parents avaient eux-mêmes tenté, en vain, de vendre en leur temps.

Il espère qu'en lisant ceci, des administrateurs de la Ville de Montréal voudront la protéger du pic d'éventuels démolisseurs.

«J'aimerais trouver un acheteur qui aime la maison et non un entrepreneur qui pourrait exploiter la grandeur du terrain pour construire des condos», confie l'ingénieur en mécanique âgé de 31 ans. Construite entre 1750 et 1760 mais non classée, l'habitation de pierre occupe moins de 10% de 20 000 pieds carrés de terrain, «ce qui pourrait faire baver d'envie nombre de spéculateurs immobiliers» écrivait déjà le journaliste et auteur d'ouvrages sur le patrimoine de Montréal Guy Pinard, dans La Presse en... 1991.

Un long article paru le 2 juin cette année-là détaillait les travaux de rénovation - «une folle entreprise» - réalisés par le père de M. Demers. Ce dernier avait raconté au journaliste avoir investi 5000 heures entre 1974 et 1984 pour redonner à la demeure de style français son allure d'antan, après que des propriétaires précédents l'eurent «modernisée», en d'autres mots, défigurée. Les photos «avant» et «après» sont éloquentes: l'ancestrale demeure a bien meilleure mine depuis les années 1980, de l'intérieur comme de l'extérieur.

Trente ans plus tard, toutefois, elle tranche avec les plex environnants et des commerces bigarrés tels un restaurant, baptisé Inoubliable, situé en face.

Deux cuisines, trois escaliers

Le revêtement extérieur est typique de l'architecture montréalaise d'avant 1832: il s'agit de moellons, c'est-à-dire de la pierre des champs noyée dans le mortier. Toutes les chambres ont le cachet de murs en pierre.

L'intérieur, chaleureux comme dans ces vénérables constructions à la charpente de bois exposée, se divise en quatre niveaux reliés par des escaliers vertigineux.

À aire ouverte, le rez-de-chaussée offre une superficie d'environ 95 mètres carrés ou 1023 pi2. Les occupants y ont aménagé leur cuisine. Une première cuisine (d'été) se trouve au niveau inférieur, en rez-de-jardin. Avis aux boulangers du dimanche: un four à pain a été construit près de la crémaillère du sous-sol.

À l'étage, on trouve deux chambres, une salle de bains avec baignoire et douche séparée et un hall constituant le coeur de la maison. C'est là que les parents ont installé le lit de leur fille, Jeanne, âgée de 4 mois. Enfin, il y a une mezzanine jouxtant l'un des murs pignons.

La majeure partie des poutres, des planchers de bois et de la maçonnerie est d'origine, ainsi que les dalles des deux foyers au bois, selon M. Demers. «J'ai une collection d'objets de toutes sortes que nous avons trouvés sur le terrain en creusant, comme des morceaux d'assiettes en porcelaine et de bouteilles, des pipes de plâtre et de la monnaie du XIXe siècle», raconte-t-il.

Sa famille a transcrit un «contrat datant de 1750» passé chez le notaire. Extrait d'une phrase de 325 mots (!): «... renonçant aux dits bénéfices et les uns envers les autres de tous troubles, dettes, hypothèques, dons, douaire, substitution, éviction, aliénation et autres empêchements généralement quelconques, premièrement a été délaissé par le dit Jean-François Prou et ladite Geneviève Augé Baron sa femme au dit Ambroise Ignace Cazalle et à ladite Françoise Huste sa femme, ce acceptant pour eux, leurs hoirs et ayant cause, pour en jouir dès à présent et à toujours, une terre de deux arpents et demi de profond sur quarante arpents de profondeur, située à la rivière des Prairies, paroisse du dit Sault-au-Récollet, tenant sur le devant à la rivière des Prairies et par derrière en profondeur aux terres des habitants de la côte Saint-Michel...»

Au XXIe siècle, l'ancien fief agricole est traversé de boulevards et les Demers veulent quitter leur mode de vie banlieusard. Leur maison conviendrait à des travailleurs lavallois, croient-ils, «parce que nous sommes plus proches du Carrefour Laval que du centre-ville». Il y a une piscine creusée, un jardin, un étang.

«C'est une maison que j'aime beaucoup parce que j'y ai grandi et qu'elle est unique, conclut M. Demers. Nous avons décidé de vendre parce que le terrain demande beaucoup d'entretien durant l'été et nous n'avons plus le temps avec deux jeunes enfants.»

> Prix demandé : 599 000 $

> Année de construction : 1750-1760

> Pièces : 10 " 2 salles de bain

> Évaluation municipale : 461 300 $

> Impôt foncier : 5225 $

> Taxe scolaire : 1100 $

> Courtier : Julie Goulet, Équipe Votre Maison, Re/Max Alliance, 514-374-4000