Souvent, le consommateur fait aveuglément confiance au promoteur lorsqu'il achète sur plan, constate Me Yves Joli-Coeur, spécialisé en droit de la copropriété. «Il s'accroche à toutes sortes de représentations faites dans le bureau des ventes, qui ne se matérialisent pas toujours.»

Les écarts entre ce qui est présenté et ce qui est livré peuvent toucher par exemple la superficie des appartements - qui n'est pas celle annoncée - ou la qualité des finis.

«Des écarts peuvent être normaux, car tout ne peut pas être prévu, précise l'avocat. Une réglementation municipale, par exemple, peut changer en cours de route.»

Mais il y a aussi des écarts excessifs, qui peuvent mener à un bras de fer entre le consommateur et le promoteur. «Si la justice ne coûtait rien, certaines choses ne devraient pas être acceptées, estime Me Joli-Coeur. Mais les gens se découragent et acceptent facilement les modifications du promoteur en se disant que ce serait trop coûteux de contester.»

Mauvaise expérience

Séduit par un projet dans le Mile End, Éric a déchanté pendant l'année qui a suivi la signature du contrat préliminaire. Une à une, la zone commune sur le toit, la terrasse avec spa sur le côté de l'immeuble et la grande salle commune au rez-de-chaussée ont disparu.

Il a récupéré sa mise de fonds, mais il est ressorti amer de l'aventure. «Il y avait constamment des retards et on ne nous tenait pas informés, déplore l'acheteur déçu. C'était un projet de couple, alors forcément, cela a fini par créer des tensions.»

Ils ont tout accepté jusqu'à ce qu'on leur présente les changements apportés au plan de leur appartement. «Tout le concept était à l'eau, précise Éric. On n'avait plus d'îlot. La cuisine, non fonctionnelle, ressemblait à celle d'un studio pour étudiant.»

Sa conjointe et lui ont finalement emménagé dans un condo existant, plus éclairé, avec une grande terrasse privée sur le toit, pour 50 000 $ de moins. Mais il leur a fallu accepter d'habiter dans un autre quartier.

«Le promoteur a agi avec une impunité totale, sans aucun respect pour les clients, critique-t-il. J'ai mis 70 000 $ en fidéicommis pendant un an, sans toucher d'intérêt. C'est pire pour d'autres, qui ont dû emprunter. On s'est fait niaiser, sans recevoir aucune compensation.»

Se protéger

Lorsqu'il y a mésentente, certains promoteurs remboursent le dépôt, mais d'autres le gardent, fait remarquer Me Joli-Coeur, qui a écrit seul ou en collaboration cinq ouvrages de vulgarisation sur la copropriété. Il collabore aussi régulièrement au site condolegal.com.

«Dans le contrat préliminaire, il faut clarifier les règles du jeu, dit-il. Il faut spécifier que si le condo n'est pas fourni à telle date, le contrat sera nul et le dépôt remboursé. Il faudrait aussi préciser que si certains éléments qui ont mené à l'achat, comme une terrasse sur le toit, une piscine, un centre sportif ou une place de garage, ne sont plus là, il est justifié de mettre fin au contrat préliminaire, sans pénalité.»

Lorsqu'un immeuble en copropriété comprend au moins 10 appartements, les consommateurs ont une meilleure idée de ce qu'ils achètent. Lors de la signature du contrat préliminaire, en effet, le promoteur est obligé de fournir une note d'information.

En vertu du Code civil du Québec, les noms de l'architecte, de l'ingénieur, du constructeur et du promoteur doivent y être indiqués. La note d'information doit aussi renfermer le plan d'ensemble du projet, le résumé d'un devis descriptif, le budget prévisionnel, la description des parties communes, des renseignements concernant la gérance prévue de l'immeuble, ainsi qu'une copie ou un résumé de la déclaration de copropriété, même à l'état d'ébauche.

Info : condolegal.com