Faire appel à un expert en sinistre indépendant à la suite d'un désastre majeur peut aider les victimes à mieux traverser le processus de réclamation auprès de leur assureur.

Quand un sinistre d'envergure survient, les processus de réclamation sont longs et souvent épineux et les négociations avec les compagnies d'assurances, pas toujours faciles. Pour ne pas être seules devant ce séisme, de nombreuses victimes font appel à des experts en sinistre indépendants, dits « publics ». Conseils.

En pleine nuit, un incendie dévore une propriété. Les occupants ont juste le temps de sortir avant que les flammes n'embrasent tout le rez-de-chaussée puis se propagent dans le plafond. Une fois l'incendie éteint, plusieurs heures plus tard, le constat est sans appel : la maison est à reconstruire entièrement, fondations comprises. La famille doit se reloger et racheter toutes ses affaires. Meubles, vêtements, jouets : tout est parti en fumée.

Dans un cas de sinistre de grande ampleur comme celui-là, le processus de réclamation auprès de la compagnie d'assurances est long. Et l'assureur nomme son propre expert pour estimer les dégâts et évaluer l'indemnité à verser. « Il est tenu par le code de déontologie des experts en sinistre d'accompagner l'assuré et de ne pas négliger ses intérêts même s'il est employé par la compagnie d'assurances », précise Maya Raic, PDG de la Chambre d'assurance de dommages (ChAD), qui a publié un Guide d'accompagnement du sinistré

EXPERT INDÉPENDANT

Or, avec les délais et les complications, les relations avec la compagnie d'assurances peuvent devenir tendues. Plusieurs obstacles peuvent en effet ralentir le processus, voire motiver le refus de payer de l'assureur.

« Ce qui allonge les délais, c'est d'abord l'ampleur du sinistre. S'il y a perte totale, c'est plus long et plus complexe », explique Caroline Phémius, conseillère en affaires publiques au Bureau d'assurance du Canada (BAC).

« Si l'origine du sinistre est suspecte, s'il s'agit d'un acte criminel, l'assureur va mener une enquête supplémentaire, poursuit Mme Phémius. Il peut également refuser de payer s'il y a eu aggravation de risque par l'assuré, comme une activité professionnelle ou la mise en location fréquente de la résidence sans avoir prévenu l'assureur. »

Ce que beaucoup d'assurés ignorent, c'est qu'ils ont tout à fait le droit d'embaucher un expert en sinistre public à n'importe quel moment de la procédure. « Il s'agit d'un expert en sinistre indépendant, qui est tenu d'être inscrit auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et dont le rôle est d'accompagner, de conseiller et de représenter auprès de la compagnie d'assurances l'assuré qui lui a donné le mandat », indique Maya Raic.

VEILLER AUX INTÉRÊTS DE L'ASSURÉ

Un tel expert connaît parfaitement les procédures, et « toutes les pièces importantes à fournir aux assureurs pour monter un dossier solide », souligne Caroline Phémius. Il est très utile pour aider les victimes à dresser l'inventaire des choses qu'elles détenaient et à prendre des décisions durant la procédure, pour négocier en direct avec l'assureur et veiller aux intérêts de l'assuré.

Car le problème, c'est que « l'assuré est seul face à tout ça et il ne connaît pas ses droits », observe Paul Morissette, président de la firme d'expertise en sinistre Roy Morissette, à Québec, qui gère de 30 à 45 dossiers de sinistres par an.

« Les gens pensent qu'ils doivent accepter toutes les demandes de l'assureur alors que ce n'est pas le cas. Ils peuvent par exemple refuser de prendre les fournisseurs conseillés par la compagnie d'assurances pour la reconstruction de la propriété ou la réparation des dégâts », poursuit Paul Morissette, qui assure pouvoir « faire gagner aux assurés de 15 à 25 % d'indemnité supplémentaire que s'ils étaient seuls ».

Par exemple, « si l'assuré ne veut pas reconstruire [sa propriété], il doit toucher la valeur à neuf de sa résidence moins la dépréciation. Or, les compagnies d'assurances soustraient généralement des frais administratifs et les taxes, ce qui n'est pas correct. Nous, on le sait, donc on va négocier avec elles pour les faire supprimer », explique Paul Morissette.

Sur 3000 experts en sinistre au Québec, une trentaine seulement sont dits « publics » et travaillent pour le compte d'assurés. Les autres sont employés ou mandatés par les assureurs. 

À noter : ces experts publics sont payés par les assurés et leur rémunération est calculée au tarif horaire ou selon un pourcentage. Selon Paul Morissette, la facture représente « souvent 10 % des sommes versées par l'assureur ».