Elles sont inoffensives pour la santé, minuscules et si fragiles qu'il suffit d'une pression du bout du doigt pour les écraser. Et pourtant, elles sont si tenaces et désagréables que leur éradication est presque assez pénible pour figurer sur la liste des 12 travaux d'Hercule. Petit mode d'emploi pour en finir avec les «mites» alimentaires et vestimentaires, sans sortir l'artillerie chimique.

Mites vestimentaires

Des mites, vraiment?

Le mot est passé dans l'usage courant, mais ne le prononcez pas devant un entomologiste pour parler des papillons dans votre placard: «Ce ne sont pas des mites que l'on trouve dans les vêtements, mais des teignes», précise Marjolaine Giroux, entomologiste à l'Insectarium de Montréal. Facile à retenir: une teigne, c'est une personne méchante et tenace, lit-on dans le dictionnaire. Comme ces insectes, qu'on ne peut que détester lorsqu'elles dévorent notre pull breton favori.

Où?

Mauvaise nouvelle, les teignes ne s'attaquent pas qu'au garde-robe, mais à tout ce qui contient des fibres naturelles: un tapis, une chaise rembourrée, etc. «Il faut absolument bien identifier la source du problème, sinon il reviendra toujours», note Pierre Racine, directeur général du Groupe de gestion parasitaire Cameron. Le plus facile est d'installer des pièges autocollants en divers endroits: le plus populaire révélera le pot aux roses.

Les éviter

Contrairement à la croyance populaire, les teignes ne se nourrissent pas de fibres naturelles mais plutôt des dépôts organiques (sueur, urine, cheveux, nourriture, jus, etc.) qui s'y trouvent, avalant au passage une bouchée puis une autre de votre chandail. La règle d'or est donc de ne remiser les vêtements - surtout si ce sera pour une longue période - qu'après les avoir parfaitement lavés. Comme les teignes détestent aussi la lumière, on les passera aussi - si possible - quelques heures au soleil, et on rangera les vêtements parés dans des sacs ou des boîtes de plastique parfaitement hermétiques. Les copeaux de cèdre frais peuvent repousser les insectes mais ne les tueront point.

Les éradiquer

Les teignes sont déjà bien installées chez vous? Oubliez la naphtaline (les boules à mites), à l'odeur si désagréable. «Elles tuent les teignes adultes et les jeunes larves, mais c'est un produit potentiellement dangereux pour la santé, rappelle Marjolaine Giroux. Il faut absolument, si on en utilise, bien ventiler nos vêtements pour ne pas respirer ces émanations, surtout si on a des enfants.» Pierre Racine est du même avis et privilégie plutôt - après une bonne identification des insectes - la pose de pièges à phéromones, non toxiques, permettant de capturer les mâles sur des bandelettes collantes. Autre option: on tuera les insectes et leurs larves en plaçant les vêtements infestés 24 heures au congélateur, ce qui n'est pas possible si le foyer d'infestation est situé dans une chaise ou un tapis: il faudra alors sans doute recourir à un insecticide, prévient M. Racine.

Mites alimentaires

Des mites, vraiment?

Eh oui, le terme «mite» n'est pas plus approprié pour les papillons ravageurs des penderies que pour ceux qui infestent les garde-manger. Il faut alors parler de pyrales indiennes ou méditerranéennes, les unes préférant les grains entiers, les noix, et les autres, les farines moulues de toutes sortes. Même la nourriture pour animaux peut être contaminée.

Les prévenir

Les pyrales supportent mal le froid: un séjour au congélateur de 24 heures leur sera fatal, mais attention, il peut aussi altérer la qualité des denrées. «Et le fait est qu'il y aura encore des insectes, et probablement leurs excréments, dans vos aliments», relève Marc Fournier, du Laboratoire de lutte biologique de l'UQAM. Il recommande surtout de placer les aliments dans des pots parfaitement hermétiques, toujours bien fermés. Si on a le malheur d'acheter un produit infesté, les insectes s'y développeront mais ne pourront se propager aux autres: on pourra identifier plus facilement la source du problème et jeter le contenu d'un seul pot, plutôt que tout un garde-manger. «Maintenez les armoires très propres, ne laissez pas de miettes traîner sur les tablettes», conseille aussi Marjolaine Giroux.

À l'achat

Inspectez bien les emballages et laissez de côté ceux qui ont de petits trous, symptômes d'une activité larvaire. Retenez où vous achetez les produits: si ceux d'un même marchand sont régulièrement infestés, sans doute vaut-il mieux l'exclure de votre route.

S'en débarrasser

Une femelle pyrale peut pondre jusqu'à 300 oeufs dans sa (courte) vie. «L'été, quand il fait chaud et humide, on peut vite être aux prises avec une épidémie», prévient Pierre Racine. Pour en finir avec le problème, il faut impérativement déterminer sa source précise en plaçant des pièges à phéromones, non toxiques, en divers endroits. Contrairement à ce qui se passe dans le cas des teignes, ils ne suffiront pas à venir à bout du problème, mais permettront de s'y attaquer de manière plus ciblée. Après, on jette toutes les denrées infestées et on nettoie soigneusement les étagères avec de l'eau savonneuse, on passe l'aspirateur, «et on jette le sac après!», dit Pierre Racine.

La lutte biologique est de plus en plus développée et l'on peut maintenant acheter, dans les boutiques spécialisées, des trichogrammes, un insecte de la famille des guêpes qui ne pique pas, est presque invisible à l'oeil nu (de la taille d'un grain de poivre) et se nourrit des oeufs de pyrales. «La colonie mourra dès lors que vous n'aurez plus de problème de pyrale», explique Pierre Racine. La toxicité est nulle et l'efficacité telle que des meuneries ont eu recours à ce procédé.

Victoire?

Le cycle de vie des pyrales est d'environ un mois: si vous n'apercevez aucune pyrale pendant six semaines, vous pouvez crier «victoire!», mais sans jamais baisser la garde en rentrant de faire les emplettes. Sinon, la lutte sera à recommencer dans quelques semaines...