Depuis plus de 100 ans, les plex montréalais ont tenu tête aux modes, au point où ils sont aujourd’hui parmi les propriétés les plus recherchées. Les qualités des milieux de vie où ils se trouvent en grand nombre sont multiples, mais les plex trahissent parfois leur âge et ne sont pas des constructions parfaites. Gros plan sur leurs atouts et leurs défauts.

Mixité sociale

Traditionnellement, la majorité des plex sont occupés par leur propriétaire, au rez-de-chaussée, et par des locataires aux étages. Cette formule, toujours présente, favorise la mixité sociale. Les plex réunissent ainsi dans un même immeuble des gens plus ou moins fortunés, des familles, des étudiants, des personnes qui vivent seules… sans être isolées. Cette mixité fait « la promotion de l’égalité des chances, dans une optique de réduction des inégalités sociales », conclut une étude commandée en 2002 par le Service de l’habitation de la Ville de Montréal.

Vitalité et sécurité

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

La ruelle, terrain de jeux pour les enfants et lieu où se côtoie le voisinage

La densité moyenne des quartiers de plex, qui se situe en gros entre 10 000 et 20 000 habitants par kilomètre carré, peut soutenir de nombreux commerces et services de proximité. La population accède ainsi aisément et rapidement à ce dont elle a besoin, souvent en moins de 15 minutes et sans voiture. Cette densité permet aussi de justifier la présence d’un réseau de transport collectif efficace, qui contribue à la réduction des gaz à effet de serre. La proximité du voisinage, qui se côtoie dans des espaces à la fois publics et privés comme les ruelles, participe aussi à la création d’un fort sens de la communauté et d’un sentiment de sécurité. « Si vous être malvenu dans le quartier, vous le savez tout de suite que vous êtes surveillé, observe le professeur retraité David Hanna. Et ça fonctionne : Montréal est connu pour son bas taux de crimes violents. »

Des cours généreuses

Faire pousser des tomates, c’est une pratique répandue dans les cours arrière des quartiers de plex. On y trouve aussi beaucoup d’arbres fruitiers. L’agriculture urbaine, qui se pratique notamment sur les terrains privés, peut alléger en partie le budget des dépenses en alimentation d’une famille, mais aussi réduire les îlots de chaleur, favoriser l’absorption des eaux pluviales et le maintien d’une certaine biodiversité, estime le gouvernement du Québec, qui souhaite favoriser ce type de culture dans le cadre de mesures pour favoriser l’autonomie alimentaire.

De moins en moins accessibles

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Le prix moyen d’un immeuble de deux à cinq logements dans l’île de Montréal s’élève à plus de 850 000 $.

C’est la rançon du succès des plex : leur prix a explosé depuis une génération. Au premier trimestre de 2022, le prix moyen d’un immeuble de deux à cinq logements dans l’île de Montréal a atteint 854 674 $, en hausse de 58 % depuis cinq ans, estime l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec. Sur le Plateau Mont-Royal, ce prix grimpe à 1 179 166 $ (+53 % en cinq ans). Rares sont les jeunes familles qui peuvent aujourd’hui les acquérir, même en comptant sur des loyers pour payer une partie de l’hypothèque. Et ceux qui ont les moyens de les acheter les transforment de plus en plus souvent en maison unifamiliale, ce qui nuit à terme à la diversité des quartiers. Et à leur vitalité aussi : nombre de propriétaires fortunés possèdent une résidence secondaire et leur plex reste souvent… désert.

Sombres, bruyants, froids

En fonction de leur orientation, en particulier au rez-de-chaussée, les plex sont souvent assez sombres. « Les pièces en enfilade ne sont plus adaptées aux modes d’occupation de l’espace habitable contemporain », observe l’architecte Jean Verville. Des propriétaires font ainsi abattre des cloisons pour profiter d’espaces plus ouverts et plus lumineux. Par ailleurs, les bruits et les odeurs n’ont en général aucun mal à voyager d’un logement ou d’un bâtiment à l’autre. Les méthodes d’isolation d’il y a 100 ou 150 ans (papier journal, copeaux de bois ou laine animale) sont en outre peu efficaces et les plex ont la réputation d’être froids et humides en hiver. Heureusement, il existe aujourd’hui des moyens de remédier à la situation, notamment grâce à l’uréthane giclé.

Chers à entretenir

Aimés, soignés, rénovés… malgré leur âge, beaucoup de plex sont encore en très bon état. Mais d’autres ont plus mal vieilli. Des couronnements ouvragés ont disparu, tout comme des balcons ou des escaliers en fer forgé. L’arrondissement du Plateau-Mont-Royal veille au grain. Au moment de délivrer des permis pour des travaux, il peut ainsi exiger de reconstruire à l’identique des couronnements détruits, en se basant sur des photos aériennes d’archives, et ce, même si le propriétaire actuel n’y est pour rien. Les ouvriers capables de réaliser ces travaux ne courent plus les rues. Et la facture risque d’être salée, en dépit des subventions parfois accordées.