Érigée en 1799, elle est l’une des plus anciennes demeures encore existantes de la seigneurie de La Prairie. L’étalement urbain ayant fait son œuvre, la voici maintenant située à un jet de pierre du carrefour des autoroutes 10 et 30 et du centre commercial qui le caractérise. Classée bien patrimonial, la maison résiste, au bout de son cul-de-sac, dans son écrin de verdure.
En quittant le boulevard Rome pour emprunter le chemin des Prairies à Brossard, on perçoit des relents de l’esprit champêtre caractérisant jadis cette voie de circulation qui, selon la Société d’histoire de La Prairie-de-la-Magdeleine, figurait déjà sur une carte de 1815 réalisée par l’arpenteur Joseph Bouchette. Au bout du chemin, qui est sans issue, se dressent encore aujourd’hui la maison Banlier (aussi appelée Deschamps) et sa voisine Senécal, laquelle a été nommée en l’honneur de la famille qui l’a habitée sans interruption jusque dans les années 1970. Expropriée et menacée de démolition pour faire place à l’autoroute 30, elle a finalement été épargnée par une modification du tracé, après avoir été laissée à l’abandon. En 1984, Jules Journault, un ferblantier, l’achète et entreprend une minutieuse restauration.
Lorsqu’ils ont visité la propriété pour la première fois en 2006, Sylvain Marquis et Caroline Lambert avaient déjà acheté un terrain à Candiac sur lequel ils prévoyaient construire leur maison. Ils avaient commencé à rassembler des images d’inspiration qui rappelaient le style d’une maison ancienne. Puis par hasard, ils sont passés près de la maison Senécal, qui avait été mise en vente. Par curiosité, ils ont demandé à la visiter. « On se pinçait. On ne pouvait pas croire que c’était l’âme de cette maison qu’on essayait de reproduire, mais on n’aurait pas réussi », affirme Caroline Lambert.
Ils ont donc abandonné leur projet de construction neuve et vendu leur terrain pour emménager dans cette maison d’époque avec leurs deux enfants, Jordan et Léa.
Patrimoine culturel
Avec sa maçonnerie de pierre, son toit à deux versants droits, ses cheminées en pierre aux deux extrémités, ses ouvertures asymétriques et l’absence de lucarnes, la résidence est un exemple d’une maison rurale d’inspiration française, selon le Répertoire du patrimoine culturel du Québec. Elle est classée en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel depuis 1975.
Consultez la fiche de la maison dans le Répertoire du patrimoine culturel du QuébecOutre son architecture, sa valeur ethnologique est aussi d’intérêt puisque certains éléments toujours existants témoignent de la manière dont vivaient ses habitants au XIXe siècle. Dans la chambre principale, une petite porte et un palan sont des vestiges de l’entreposage des récoltes dans les combles. Dans la cuisine, un évier en pierre, qui se déverse directement à l’extérieur, a été conservé. Le four à pain intérieur (reconstruit à partir des vestiges du four existant) et la crémaillère sont aussi toujours en place.
En achetant la maison, Sylvain Marquis et Caroline Lambert l’ont rendue plus moderne, tout en en conservant l’essence et les traces du passé. Ils ne souhaitaient d’abord que l’agrandir, mais la designer Rollande Vachon les a convaincus de rafraîchir tout l’intérieur qui était sombre et très coloré. « Elle nous a dit : “Votre maison est trop vieille pour vous” », se rappelle Mme Lambert.
Les murs ont ainsi été peints en blanc, ce qui a eu pour effet d’adoucir l’intérieur et de mettre en valeur les larges lattes de bois du plancher et les poutres d’origine au plafond. Le mariage entre le moderne et l’ancien, accentué par les meubles et les accessoires de décoration, est particulièrement réussi et il se poursuit dans l’agrandissement construit en 2012.
Dans cette vaste pièce aux murs de lattes blanches, surmontées d’imposantes poutres en bois, les plafonds ont une hauteur de 18 pi. De grandes fenêtres offrent une ouverture sur la cour et sur la piscine en béton.
Le projet a nécessité plus de deux ans de démarches pour l’obtention des permis auprès de la municipalité, puisque le terrain a un zonage agricole, et du ministère de la Culture et des Communications, qui exigeait au départ que des couleurs plus contrastantes soient utilisées pour cet ajout. À force d’arguments, les propriétaires ont obtenu l’autorisation de faire le projet tel qu’ils le souhaitaient.
C’est aujourd’hui, parce qu’ils n’en profitent pas assez, ayant trouvé leur bonheur à Lac-Brome, qu’ils ont décidé de vendre leur résidence principale.
On se sent à la campagne ici. Mais on ne peut pas avoir deux chalets. C’est beaucoup d’entretien.
Caroline Lambert, propriétaire
Terrain protégé
« On a une piste d’hébertisme dans le bois. Des chevreuils, des renards, des coyotes », énumère Sylvain Marquis. Le terrain totalise plus de 54 000 pi2 et comprend aussi un garage et une ancienne écurie. Une zone de préservation entoure la maison, ce qui fait qu’aucune construction ne peut se faire à l’intérieur d’un rayon de 500 m, au grand dam des nombreux promoteurs qui cognent régulièrement à la porte des Lambert-Marquis.
La progression du développement urbain dans le secteur est néanmoins indéniable. Depuis l’arrivée de la famille, le Quartier DIX30 ainsi que les maisons-manoirs qui l’entourent ont été érigés. Prochainement, le REM s’arrêtera non loin de la demeure. Sans compter l’autoroute 30 qui passe tout près et dont la présence se fait entendre à l’extérieur, mais aucunement à l’intérieur des épais murs de la maison.
Le couple est conscient qu’il a entre les mains un produit niché et qu’il lui faudra probablement du temps avant de trouver un acheteur. La maison est en vente depuis un an et a subi quelques baisses de prix depuis. « Mais on est contents de ne pas l’avoir vendue vite, souligne Sylvain Marquis. On est bien ici. »
Rectificatif
Une version antérieure de cet article indiquait que la famille Senécal avait habité la maison jusqu’en 1984. Or, elle avait dû la quitter dans les années 1970, après que la propriété ait été expropriée par le gouvernement du Québec pour permettre la construction de l’autoroute 30. Le tracé aura été finalement modifié pour épargner la maison.
Consultez la fiche de la propriétéLa propriété en bref
Prix demandé : 2 498 000 $
Année de construction : 1799
Description : Maison en pierres d’un étage et demi, construite en 1799 et classée patrimoniale. Les aires de vie principales sont situées au rez-de-chaussée alors que les trois chambres ainsi que deux salles de bains sont aménagées à l’étage. Une mezzanine pouvant servir d’espace de bureau surplombe la chambre principale. Le sous-sol, creusé, abrite une salle familiale et une salle d’exercices. À l’extérieur, on retrouve une piscine creusée, une pergola et un foyer ainsi qu’un garage triple détaché et une ancienne écurie transformée en établi.
Dimensions de la maison : 62 pi 10 po X 34 pi 20 po (irrégulières)
Superficie du terrain : 54 584,87 pi2
Évaluation municipale (2022) : 1 316 300 $
Impôt foncier (2021) : 6147 $
Taxe scolaire (2020) : 981 $
Courtier : Charles-Alexandre Sylvestre, RE/MAX Imagine