En raison de la flambée des prix, acheter une maison unifamiliale pour moins de 350 000 $ dans la grande région de Montréal relève de l’exploit par les temps qui courent. Mais il est encore possible de trouver la perle rare, à la condition d’avoir l’œil avisé et, surtout, d’être le premier à déposer une offre d’achat ! Tour d’horizon.

Patricia Iacampo, 32 ans, est au bord du découragement. « Ça fait plus de trois mois qu’on cherche de façon intense, et on ne trouve rien ! », lance la jeune femme, qui souhaite acheter à Laval avec son conjoint une maison unifamiliale d’environ 350 000 $.

« Les vendeurs demandent trop cher pour des maisons qui demandent des rénovations, déplore-t-elle. Et si la propriété nous intéresse, on se retrouve plusieurs en même temps à tenter de l’acquérir. »

Jusqu’à présent, elle a visité une vingtaine de demeures sans parvenir à faire une seule offre d’achat. Là encore, elle refuse d’embarquer dans le jeu de la surenchère pour mettre la main sur la propriété convoitée.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, LA PRESSE

Patricia Iacampo visite des maisons mais ne parvient pas à faire
une offre d’achat dans un marché nerveux où les vendeurs tirent avantage de la rareté des maisons en vente.

C’est frustrant. On se sent pris dans une spirale. On a l’impression, mon conjoint et moi, que des courtiers contribuent à faire monter les prix en concentrant les visites la même journée !

Patricia Iacampo

Patricia reconnaît néanmoins qu’elle n’a pas eu de véritable coup de cœur depuis le début de ses démarches.

La jeune femme avait prévu, avec son conjoint, conclure une transaction ce mois-ci, mais elle a changé ses plans.

« On vise maintenant plus tard à l’automne, dans la mesure où on tombera sur la maison qui nous convient. J’ai tendance à m’impatienter, mais mon conjoint, plus patient, me rappelle qu’il est préférable de prendre le temps nécessaire. Il a sans doute raison ! »

Prix médian pour une maison unifamiliale (variation annuelle)

— Île de Montréal : 505 000 $ (+ 6 %) 
— Laval : 355 000 $ (+ 8 %) 
— Boisbriand/Sainte-Thérèse : 321 750 $ (+ 12 %) 
— Vieux-Longueuil : 345 000 $ (+ 12 %)
Source : Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec — août 2019

Moins de choix

Chose certaine, relève de son côté Éric Lemieux, directeur adjoint, analyse de marché, à l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ), le marché de la revente de maisons unifamiliales, dans la région métropolitaine de Montréal, demeure très ferme, avec des hausses de prix qui ont atteint 15 % dans certains secteurs.

« L’offre diminue et ça fait grimper les prix, précise-t-il. Faut-il rappeler qu’en août, on en était au 47e mois d’affilée avec un inventaire en baisse ? Dans ce contexte, les acheteurs doivent parfois s’éloigner de la ville et éviter les quartiers à la mode pour respecter leur budget. »

Un marché de vendeurs ? Plusieurs ont tendance à le croire.

907 : Nombre de maisons à vendre à un prix variant entre 300 000 $ et 350 000 $ dans la région métropolitaine de Montréal

Être aux aguets

Kim Ouellet-Roy, 29 ans, espère elle aussi conclure une transaction immobilière d’ici à la fin de l’année. « Mais on se rend compte qu’on est confrontés à un marché de vendeurs », se désole la mère de deux jeunes enfants.

Depuis un mois, elle a visité avec son conjoint Marc-Antoine Bergeron, 37 ans, une dizaine de maisons unifamiliales à Repentigny et à Boucherville. Chaque fois, c’est la déception.

« C’est souvent plus de 400 000 $, et il y a des rénovations à effectuer, dit-elle. Et il n’est pas question d’acheter sous pression avec des offres multiples ! On a hâte d’avoir notre maison, mais on va choisir celle qui nous plaît. »

Le couple se fait accompagner par un courtier pour améliorer ses chances de mettre la main sur la propriété au bon prix, dans le bon quartier.

On va aller vivre en banlieue en fonction de notre budget [pour l’acquisition de la maison] parce qu’à Montréal, on le voit bien, ce n’est pas achetable !

Kim Ouellet-Roy

Elle continue d’espérer que la prochaine fois sera la bonne. « On reçoit des alertes sur notre téléphone intelligent pour nous avertir qu’une maison est nouvellement sur le marché. On est aux aguets ! »

Kim et Marc-Antoine découvrent un peu plus chaque jour que le marché immobilier fait des gagnants et des perdants. « Nous avons mis trois ans à vendre notre condo, faute d’acheteurs, et là, nous sommes en appartement en attendant de trouver notre maison. On verra bien ce qui arrivera ! »

Faire vite

Chose certaine, relève pour sa part le courtier immobilier Marc Forget, chez Royal LePage, l’offre pour des maisons à 350 000 $ est plutôt mince dans la grande région de Montréal.

« C’est rendu qu’on est prêt à payer 400 000 $ et plus pour un shoebox à Montréal qu’on visite en moins de trois minutes », illustre-t-il.

Il conseille à ses clients de « faire vite » dès qu’ils croient avoir trouvé la propriété dans le bon quartier, et à leur prix.

Le courtier Sylvain Gagnon, chez Via Capitale Accès, vient tout juste de vendre une propriété située à Anjou, qui était inscrite à 349 000 $.

« Il y a eu 16 visiteurs, 3 courtiers, et l’offre d’achat a été déposée lors d’une visite libre, un dimanche après-midi, explique-t-il. Dès que j’ai ouvert les portes [de la maison], j’ai senti une grande fébrilité ! »

Il souhaite ne pas dévoiler le prix de la transaction, mais il précise que « c’était un prix pour une vente rapide par la succession ».

Le courtier habite une maison semblable à celle qu’il a vendue pour ses clients qu’il avait lui-même payée 104 500 $ en 1998…

Il constate que les acheteurs doivent aller de plus en plus vers l’est (Pointe-aux-Trembles, Rivière-des-Prairies), pour améliorer leurs chances de réaliser une transaction satisfaisante.

Et ceux qui « magasinent » une propriété à Laval constatent parfois qu’ils devront traverser un autre pont pour conclure une transaction… dans la couronne nord de Montréal.

« J’ai des clients qui souhaitaient acheter en ville et qui sont rendus à Blainville, soulève Hans Joseph Laurent, courtier chez Royal LePage. Ils font ce choix rationnel de passer plus de temps dans la circulation, matin et soir, pour réaliser leur rêve d’avoir une maison avec une piscine dans la cour arrière pour les enfants. »

Pendant ce temps, à Trois-Rivières…

Vous avez un budget de 350 000 $ pour une maison ? À Trois-Rivières, seulement six propriétés sont proposées à ce prix sur le marché.

« On peut les qualifier de maisons très luxueuses, dans des secteurs aisés », souligne Julie Montembeault, courtière immobilière au Groupe Sutton Alliance.

Depuis le début de l’année, seulement deux maisons se sont vendues dans cette fourchette de prix, dans un délai moyen de 90 jours.

« Une des deux maisons a [même] été négociée à la baisse pour un montant de 40 000 $ », précise-t-elle.

Contrairement au marché dynamique de la région métropolitaine de Montréal, le marché de la revente d’unifamiliales dans cette ville de la Mauricie évolue plutôt lentement.

« Chose certaine, il n’y a pas de surenchère ! », observe avec humour la courtière.