Vous tombez amoureux d'un appartement dans le quartier que vous convoitez, tout en sachant qu'il s'agit d'une copropriété indivise? Prenez la peine de vous renseigner, car les implications juridiques et financières ne sont pas les mêmes qu'en condo.

«La copropriété divise, appelée communément condominium, et la copropriété indivise ont chacune leur place, estime Me Ginette Allard, notaire spécialisée en copropriété au sein du cabinet de Grandpré Joli-Coeur. Dans certains secteurs de Montréal, à cause de l'interdiction de convertir les immeubles en copropriété divise, beaucoup de logements sont en copropriété indivise. Il y a des avantages, mais aussi des désavantages.»

L'indivision, précise-t-elle, permet à plusieurs personnes d'être propriétaires d'un immeuble, tout en partageant les frais d'exploitation. Les parties privatives et les parties communes ne sont pas déterminées. Les propriétaires possèdent une quote-part de l'édifice.

Des conjoints qui achètent une maison, des frères et soeurs qui héritent de la propriété de leur père et trois amis qui acquièrent un triplex sont tous copropriétaires indivis.

«Il est important d'avoir une convention d'indivision, car celle-ci règlemente les droits et les obligations de chacune des parties, insiste Me Allard. Il est question alors de copropriété indivise organisée. Toute offre d'achat devrait être conditionnelle à la lecture de la convention et celle-ci devrait être lue par un notaire expérimenté dans le domaine.»

Les logements en copropriété indivise organisée sont plus fréquents dans Rosemont, Villeray, le Plateau Mont-Royal, Outremont et Ville-Marie, où il y a environ 20 ans, des amis se mettaient souvent ensemble pour acheter chacun un étage d'un triplex, indique Marie-Josée Houde, courtière en immobilier au sein de l'équipe Houde Sauvageau, chez Re/Max du Cartier.

«Dans le Plateau et Outremont, par exemple, les appartements en copropriété indivise représentent de 15 à 20% du marché de la revente, constate-t-elle. Encore aujourd'hui, la copropriété indivise demeure la porte d'entrée vers la copropriété divise.»

Acheter en connaissance de cause

Selon Mme Houde, deux grandes différences concernent les acheteurs. Lors de l'acquisition d'une copropriété indivise organisée, ceux-ci doivent mettre une mise de fonds minimale de 20% du prix d'achat. La Société canadienne d'hypothèque et de logement (SCHL) n'assure pas, en effet, les prêts pour les copropriétés indivises.

«Plusieurs personnes ont la capacité d'emprunter, mais elles n'ont pas nécessairement la mise de fonds, constate Mme Houde. Pour un logement de 400 000$, cela prend 80 000$. Cela réduit le bassin d'acheteurs.»

Autre contrainte: depuis l'entrée en vigueur du nouveau Code civil du Québec, en 1994, la Banque nationale du Canada et les Caisses Desjardins offrent des prêts à responsabilité limitée. Dans de petites copropriétés indivises, chacun des copropriétaires a donc une hypothèque indépendante. Les banques canadiennes à charte fédérale, quant à elles, ne proposent pas ce type de prêt.

Il faut aussi savoir que dans la plupart des cas, les conventions d'indivision ne permettent pas la location. D'ailleurs, un copropriétaire qui aurait loué son logement n'aurait aucun recours pour le reprendre. «Au retour d'un séjour de deux ans au Bali, un locataire malcommode ne pourrait pas être évincé», souligne Mme Houde.

Le bon côté

Les copropriétaires «indivis», qui partagent les dépenses et versent leur quote-part, paient moins cher de taxes municipales et scolaires.

Pour l'instant, en effet, un seul compte de taxes est émis pour l'immeuble en entier, ce qui est avantageux pour les copropriétaires.

«Pour le reste, la copropriété indivise est pas mal pareille à la copropriété divise, croit Mme Houde. Le toit à refaire ne coûtera pas moins cher.»

Étonnamment, les copropriétés indivises organisées plus dispendieuses (de 400 000$, 500 000$ et 600 000$) se vendent plus facilement que celles de 160 000$ ou 180 000$, à cause de la mise de fonds exigée.

«Elles plaisent à des acheteurs qui obtiennent l'argent nécessaire en vendant leur propriété, souligne la courtière en immobilier. Ceux qui accèdent à la propriété et ont les moyens d'acheter un condo de 160 000$, quant à eux, n'ont pas eu le temps d'amasser la mise de fonds demandée.»

Me Yves Joli-Coeur, une des sommités en droit de la copropriété au Québec, déplore qu'en copropriété indivise, il n'y ait pas d'obligation légale de créer un fonds de prévoyance et d'effectuer des travaux préventifs.

«La plus grande recommandation que je pourrais faire est d'assurer la pérennité du bâtiment en constituant un fonds pour être en mesure d'effectuer les réparations majeures nécessaires, le moment venu», dit-il.

Dans son prochain livre de la série Tout ce qu'il faut savoir, qui traitera de l'achat et la vente d'une copropriété, il consacrera un chapitre à la copropriété indivise. L'ouvrage, publié aux Éditions Wilson&Lafleur Ltée, sera lancé en février prochain dans le cadre du Salon Habitation du Stade olympique.

Info: condolegal.com