Au Québec, aucune loi ne régit le calcul de l'aire des appartements à vendre. Certains constructeurs incluent le balcon dans la superficie, alors que d'autres ne considèrent que les espaces intérieurs. Les uns comme les autres agissent en toute légalité.

Au Québec, aucune loi ne régit le calcul de l'aire des appartements à vendre. Certains constructeurs incluent le balcon dans la superficie, alors que d'autres ne considèrent que les espaces intérieurs. Les uns comme les autres agissent en toute légalité.

Un appartement de 1000 pieds carrés peut donc être plus petit que celui de 900 pieds carrés d'un autre complexe. «Voilà pourquoi il est primordial de demander au vendeur comment son entreprise a procédé au calcul, explique Me Papineau. On peut alors comparer des pommes avec des pommes.»

Une cliente de l'avocat est actuellement en plein litige avec son promoteur après la livraison de son appartement du Vieux-Montréal. Les plans lui promettaient une superficie de 720 pieds carrés, mais l'arpenteur-géomètre a confirmé ses impressions: le condo ne fait en réalité que 561 pieds carrés, soit 22 % de moins qu'escompté.

«Soudainement, son achat est passé d'un petit appartement à un grand garde-robe, estime l'avocat. Elle s'attendait à ce qu'il y ait une légère différence entre les plans et la réalité, mais jamais autant. Même la banque a des réticences à lui octroyer un prêt parce qu'elle juge le prix au pied carré trop élevé pour le marché.»

Il est rarissime qu'un promoteur arrive à livrer un appartement dont les dimensions s'avèrent exactement les mêmes que celles promises. Les aléas de la construction entraînent inévitablement une modification des plans originaux. Une poutre supplémentaire à la demande d'un ingénieur, un conduit d'aération à déplacer... voilà de précieux pieds carrés qui peuvent disparaître sans la moindre malhonnêteté du constructeur.

La Chambre des notaires du Québec suggère d'ailleurs aux promoteurs d'avertir leurs clients que les mesures des plans d'architecture sont approximatives. De plus, ces documents tiennent souvent compte des murs et les colonnes, des espaces évidemment inhabitables.

«Pour toutes ces raisons, on s'attend à une légère différence entre les calculs du promoteur et de l'arpenteur-géomètre, consent Me Papineau. Pour 5 %, on ne montera pas sur nos grands chevaux. Par contre, à 20 % il y a un problème. Il est essentiel de s'entendre clairement avec le constructeur sur sa façon de calculer l'aire, parce que malheureusement, ils ne sont pas tous honnêtes.»

L'exemple français

Depuis 1997, la France impose à ses citoyens un mode de calcul unique pour l'aire des habitations. La Loi Carrez oblige les vendeurs à considérer seulement l'espace de plancher, et uniquement lorsqu'il se trouve sous un plafond à plus de 180 centimètres.

Les acheteurs savent alors que deux appartements de 600 pieds carrés s'équivalent vraiment. Clairement à leur avantage, la Loi leur permet de ne pas payer pour les recoins d'une pièce mansardée. Même s'ils peuvent très bien y installer une commode ou un canapé.

Gare aux vendeurs tentés de tourner les coins ronds : en cas d'erreur de plus de 5 % en leur faveur, la Loi les oblige à dédommager les acheteurs. Pour un studio de 400 pieds carrés, il ne s'agit que de 20 pieds carrés, soit la dimension d'environ un garde-robe...

Le promoteur Jacques Vincent, coprésident de Prével, serait en faveur d'une réglementation unique, histoire d'éviter les malentendus. «Nous calculons la superficie de nos appartement en n'incluant pas les balcons, mais en comptant les murs extérieurs et mitoyens, explique-t-il. Par contre, quand un acheteur achète un condo sur un coin, il se retrouve avec deux murs extérieurs, ce qui diminue un peu plus l'espace intérieur. Il peut être surpris. Nous tâchons de bien informer nos clients, mais si c'était partout pareil, ce serait peut-être plus simple.»