Article paru en août 2006.

Maizerets a toujours été enclavé, constate Julien Dallaire, qui propose des visites guidées du secteur. «C'est difficile de faire admettre aux gens qui demeurent dans Maizerets qu'ils font partie des quartiers centraux de Québec, parce qu'ils se sentent à part. Ils ont toujours été à part.»

Le quartier Maizerets a été créé en 1988 lors du fractionnement de Limoilou en trois secteurs: Vieux-Limoilou, Lairet et Maizerets. Il comprend les paroisses Saint-Pie-X au nord et Saint-Pascal-deMaizerets - ou Bienheureux-François-de-Laval - au sud. Grosso modo, il s'étend du boulevard Dufferin au boulevard de la Capitale, et du boulevard Henri-Bourassa à la rue d'Estimauville.

Créée en 1923, la paroisse Saint-Pascal-de-Maizerets s'est lentement développée au départ pour «exploser» dans les années 50. Tellement que Saint-Pie-X a dû être créée en 1955 devant l'abondance de paroissiens.

Le principal attrait du quartier est bien sûr le domaine Maizerets, dont l'histoire a débuté en 1705, alors que le Séminaire de Québec devient propriétaire de ces terres, qui conserveront une vocation agricole jusqu'en 1932. Colonie de vacances pendant près de 40 ans, l'endroit est vendu en 1979 à la Ville de Québec, qui décide d'en faire un parc public.

Ancienne banlieue

Entre le domaine Maizerets et le chemin de la Canardière, une petite zone résidentielle rappelle que ce coin de pays était, il n'y a pas si longtemps, une banlieue de Québec. Un mélange hétérogène de maisons unifamiliales et d'immeubles à logements s'y profile, sous de grands arbres, le long de rues aux noms des premiers colons du coin, ou encore des grands découvreurs, comme Nicolet. Saint-Pascal est encore une banlieue, au fond. Mais c'est une banlieue qui a vieilli, qui a donné le temps à la zone urbaine de la rejoindre, et qui peut maintenant se targuer d'être en ville.

Le chemin de la Canardière agit comme pivot du quartier Maizerets. Elle le coupe en diagonale vers Beauport, rappelant que les paysans beauportois, éloignés de la ville au début de la colonie, y avaient accès par cette route. C'est maintenant l'artère commerciale du secteur.

Aujourd'hui, le parcours Métrobus 800 traverse le quartier. Près du domaine Maizerets se faufile aussi une piste cyclable, le Corridor des cheminots, qui permet aux amateurs de vélo de rejoindre certains coins de la ville, comme le Vieux-Port et la chute Montmorency.

Gilles Vigneault (un autre que celui qui vient nous inévitablement à l'esprit) habite le quartier depuis 11 ans. Il vient tout juste de vendre son bed and breakfast, une magnifique résidence du chemin de la Canardière. «Le quartier est extraordinaire. Ça s'est amélioré d'année en année. Les gens du voisinage savent vivre, se reposer, profiter de la vie.»

Nathalie, Nicolas et leurs deux fils, Alexis et Émile, y vivent depuis un peu plus d'un an. «Pour se permettre une maison, c'était le quartier le plus abordable, explique Nathalie. On ne voulait pas habiter en banlieue, parce qu'on a juste une voiture.» Son copain profite de la proximité de la piste cyclable pour aller travailler en vélo.

«On n'est pas des gens très caractéristiques du coin. C'est pas mal plus âgé», dit celle qui habite la rue Champfleury, près de l'hôpital Enfant-Jésus. "Sur la rue, nous sommes les seuls à avoir de jeunes enfants. (...) Il y a vraiment beaucoup de résidences pour personnes âgées. Y a plein de monde qui me disent: «Ah oui, tu restes dans Maizerets? Ma grand-mère aussi!», rigole-t-elle.

Les jeunes familles s'installent plus au nord. Au parc Bardy, les enfants de Nathalie retrouvent d'autres bambins avec lesquels le plus vieux - qui aura deux ans dans quelques jours - peut s'amuser. Le parc est d'ailleurs multigénérationnel. Le soir, jeunes enfants, adolescents et personnes âgées s'y côtoient.

Multiethnique

Selon le recensement de 2001, 56 % des immigrants de Limoilou habitent Maizerets, soit environ 1000 personnes. «Je pense que c'est le seul quartier multiethnique de Québec, dit Nathalie. On entend parler bosniaque, espagnol. Il y a des gens de l'Europe de l'Est, des Haïtiens, des Sud-Américains. On aime beaucoup ce côté-là.»

Selon Julien Dallaire, la population de Maizerets est surtout ouvrière. Comme partout ailleurs, dit-il, elle vieillit et il n'y a pas beaucoup de jeunes pour remplacer ceux qui nous quittent. N'empêche, il y a suffisamment d'enfants pour que les écoles primaires Dominique-Savio et Saint-Pie-X survivent... et pour que le parc Bardy soit bien grouillant par un beau dimanche après-midi d'été.

Nathalie apprécie le calme de son quartier, mais elle le trouve parfois... trop calme, justement. Un défaut: l'éloignement des commerces. «Éventuellement, on va retourner en ville. Quand on habitait Limoilou, on était habitués de tout faire à pied. On n'aime pas faire nos commissions en voiture. On est des marcheurs. Les petits commerces de quartier nous manquent beaucoup.»

Une étude réalisée cette année sur Saint-Pascal a conclu que «la population de ce secteur est sous-scolarisée». Environ 39 % des habitants de cette paroisse n'ont pas de diplôme d'études secondaires. Dans Maizerets, le taux de chômage grimpait à 15 % en 2001, deux fois plus que dans l'ensemble de la ville de Québec.

L'Institut national de santé publique considère Maizerets comme un secteur à forte pauvreté. Pourtant, le quartier n'a pas l'air défavorisé. «Les gens à faible revenu qui habitent ici sont plus cachés que dans Saint-Roch ou Saint-Sauveur, car l'architecture fait un peu plus classe moyenne», précise Julien Dallaire.

Une visite?

Les visites du quartier Maizerets offertes par Julien Dallaire sont gratuites et durent environ deux heures. Il y a une limite de 20 personnes par groupe; M. Dallaire recommande donc de s'inscrire en appelant au 418-641-6601, poste 3676.

À savoir

Le patronyme Maizerets est apparu en 1848 en l'honneur de Louis Ango de Maizerets (1636-1731), second supérieur du Séminaire de Québec au moment où les séminaristes étaient propriétaires des terres de la Canardière.