On peut lire dans certaines annonces des phrases comme «Cottage situé à deux pas du futur métro», «Maison à distance de marche de la station Montmorency» ou «À cinq minutes du métro».

On peut lire dans certaines annonces des phrases comme «Cottage situé à deux pas du futur métro», «Maison à distance de marche de la station Montmorency» ou «À cinq minutes du métro».

Plus la date de l'ouverture du métro approche, plus leur propriété prend de la valeur. «Si l'administration municipale met en valeur les alentours des trois futures stations et en favorise l'accès, le prix des maisons existantes va certainement augmenter, croit Jacques Saint-Pierre, titulaire de la chaire SITQ en immobilier de l'UQAM. Cette hausse va aussi se poursuivre après l'ouverture si le temps de passage sur les ponts vers Montréal ne s'améliore pas.»

Agent immobilier pour Sutton, Maxence Renaud constate le récent engouement pour les propriétés situées à proximité du métro. La maison d'un de ses clients est située tout près de la future station de la Concorde. «Tous ceux qui la visitent prennent le futur métro en considération, note-t-il. On a fait visiter la maison à un couple qui habitait plus au nord et qui était attiré par la perspective de pouvoir prendre le métro sans habiter à Montréal.»

L'agent ajoute aussi que ses clients demandent un prix légèrement plus élevé pour leur maison parce qu'ils sont conscients de la plus-value que le métro lui apporte.

Montréal sans y être

Deux coins de rue plus loin, sur un terrain contigu à la station Montmorency, le promoteur Le Versant pilote le chantier Urbania. Les 500 appartements de la première phase permettront aux résidants d'atteindre le centre-ville montréalais en ne mettant le nez dehors qu'une minute ou deux.

«Plus on approche de la date d'entrée en service du métro, en juillet 2007, plus on voit les acheteurs potentiels tourner autour du chantier, dit Lucie Martel, vice-présidente du groupe Le Versant. Laisser sa voiture dans le garage et se rendre à pied à la Place des Arts en 30 minutes, c'est sûr que c'est attirant!»

Les banlieusards de la couronne nord qui visitent le chantier Urbania se désolent de brûler chaque jour de l'essence à gros prix. Tous les matins, ils sont coincés au milieu des 85 000 automobilistes qui utilisent les ponts vers Montréal.

En restant à Laval, ils paient toutefois moins cher leur appartement, vivent dans un quartier moins densément peuplé et habitent à moins de 30 minutes des Laurentides et des centres de ski. Ils rêvent donc de la ville... sans vraiment vouloir y vivre.

Le compromis des environs du métro leur plaît: une fois le terrain libéré de la machinerie lourde nécessaire à la construction de la station Montmorency, Le Versant entend ajouter deux phases à son projet.

Le mot clé: TOD

«Le métro seul ne va pas changer grand-chose au chapitre du développement de Laval», prévient toutefois Florence Junca-Adenot, professeure d'urbanisme à l'UQAM et ancienne directrice de l'Agence métropolitaine de transport.

Pour vraiment profiter d'une expansion du transport en commun, trois lettres importent: TOD, pour Transit Oriented Development, ou en français «développement axé sur le transport en commun». Les maires et les gestionnaires prononcent ces lettres comme si elles étaient la clé d'un secret.

«L'idée du TOD, c'est de tout mettre en oeuvre pour que la population près d'une gare ou d'une station de métro utilise ce service, explique Mme Junca-Adenot. Pour cela, il faut d'abord des logements, des services comme des établissements d'enseignement et des garderies. Les commerces s'implantent ensuite d'eux-mêmes.»

Le stationnement incitatif ne suffit donc plus: certaines villes de banlieue retournent au concept quasi ancestral d'un village où la plupart des dépla-cements se font à pied. Les villes de Sainte-Thérèse et Mont-Saint-Hilaire, au Québec, ainsi qu'Arlington, en banlieue de Washington, ont tenté l'expérience avec succès.

Le maire de Laval, Gilles Vaillancourt, affirme que sa ville fera de même autour de ses trois nouvelles stations de métro. Dans 10 ans, le quadrilatère formé par les boulevards de la Concorde, du Souvenir, de l'Avenir et Le Corbusier pourrait d'ailleurs devenir le centre-ville piétonnier dont Laval rêve depuis sa formation, en 1969.

Avec le collège Montmorency, la salle de spectacles André-Mathieu, la Maison des arts de Laval, des pavillons universitaires et des appartements en construction, le développement du quartier est déjà bien entamé.

«On verra bien où les Lavallois décideront de s'établir, tempère toutefois le maire. Une ville, c'est une entité vivante, toujours en mouvance. Le coeur de Montréal n'a pas toujours été au même endroit. On trace les grandes lignes et on s'adapte.»

«Je fais le pari que les alentours des stations de Laval vont changer de visage d'ici 10 ans, ajoute Florence Junca-Adenot. Mieux, je crois qu'avec une bonne desserte des autobus municipaux, le métro aura des impacts sur le marché immobilier d'autres quartiers plus éloignés.»